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Liban - Santé publique

Fin prête, la station d’épuration de Jiyeh attend depuis 5 ans d’être raccordée au réseau des égouts

Quel plaisir de se baigner en Méditerranée. Beaucoup de Libanais en sont cependant dissuadés à cause de la pollution de l’eau, provoquée par les rejets d’eaux usées.

L’eau des égouts se déverse dans la mer.

La majorité des Libanais apprécient le littoral sud pour ses plages. De Jiyeh jusqu’à Tyr, la mer y est belle et il fait bon s’y baigner. Ils passent la journée ou l’après-midi sur les plages privées, éclatantes de propreté. Mais l’eau laisse à désirer. Rien que l’odeur de la mer dégoûte les touristes et, surtout, les habitants, pourtant heureux de pouvoir vivre près de la Méditerranée. À quelques mètres des plages, les égouts de Jiyeh se déversent dans la mer, tout juste à côté de la toute nouvelle station d’épuration. Il suffit de se promener sur le littoral et de se fier à son odorat pour trouver un long ruisseau bien noir. Idem à Beyrouth, où un cours d’eau sombre et nauséabond jouxte la seule plage publique. Même paysage au niveau de Dbayé, Jbeil... Bref, aucune région n’échappe au tableau.
Georges Azzi, président du conseil municipal de la ville de Jiyeh, tient à préciser que les touristes viennent parce que l’eau n’est pas polluée lors de la saison estivale. « Pendant l’été, il n’y a rien », explique-t-il, avant d’insister sur le fait que « l’eau des égouts est acheminée loin dans la mer, très profondément, grâce à des canalisations », curieusement invisibles à l’œil nu.
Selon lui, la station d’épuration n’est toujours pas terminée car les autorités n’avaient pas pu en achever la construction, en suspens depuis 2006. Mais du côté de la station, le son de cloche est totalement différent. Le gardien note que la station est prête, mais que « personne n’envoie les eaux usées ». « Un ingénieur vient régulièrement pour assurer la maintenance », dit-il. Cet entretien coûte 5 000 euros par mois, soit 3 à 4 % du coût total, pour une usine qui ne fonctionne pourtant pas.
Un habitant de la région témoigne de la présence de canalisations d’égouts dans la ville, mais reconnaît ne pas savoir où elles débouchent. En marchant, on découvre qu’elles s’arrêtent à quelques mètres seulement de la station. Un simple petit raccord pourrait suffire pour rendre la mer un peu plus propre. Alors pourquoi cette station ne fonctionne pas ?

Les réseaux d’égouts, un problème crucial
Entamée dans les années 90, l’installation de stations d’épuration des eaux usées au Liban est financée par des fonds étrangers qui passent par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR). Youssef Karam, responsable du département de l’irrigation, de l’eau, des eaux usées et de l’infrastructure au sein de cet organisme, confirme que la construction de la station de Ras Nabi Younès (région de Jiyeh) est terminée, tout en précisant que celle des réseaux d’égouts ne l’est toujours pas.
Les eaux usées qui se jettent dans la mer à côté du bâtiment ne constituent pas la totalité des eaux à traiter de la région, explique-t-il, relevant que
le débit reste faible et ne permet pas de faire tourner l’usine d’épuration. Le débit minimal doit être de 4 000 à 5 000 m3 pour éviter que l’établissement ne coûte très cher pour un rendement écologique faible. « La station de Ras Nabi Younès devrait fonctionner fin 2012, début 2013, sachant qu’il est possible de la mettre progressivement en service si l’on parvient à assurer un
débit suffisant », soit au courant de l’année 2012, selon M. Karam.

La lenteur de l’administration
Entre 1991 et 1999, le ministère français des Finances, par l’intermédiaire du Protocole français, a financé la construction de cinq usines d’épuration, à Nabatiyeh, Chekka, Jbeil, Batroun et Ras Nabi Younès. Pour cette dernière, les gouvernements français et libanais ont débloqué 13,1 millions d’euros, à hauteur de 68 % pour la France et 32 % pour le Liban. La décision de construire cette infrastructure avait été prise en 1998 par le Conseil des ministres et les travaux de construction ont commencé en janvier 2004, selon M. Karam. Il qualifie le rôle du CDR de « maître d’ouvrage délégué », chargé de mission par le ministère de  l’Énergie et des Ressources hydrauliques.
La construction de l’usine a pris fin en mai 2006, la guerre de juillet de cette même année n’ayant que faiblement touché les installations. Youssef Karam explique que « le réel problème de cette usine est le réseau de collecte des eaux usées qui reste inachevé ». La station a été prête avant l’assainissement de l’eau. À l’origine, la construction de ces canalisations relevait des municipalités avant d’être attribuée, dès 2001-2002, aux offices des eaux. Pourtant, la priorité de ces établissements n’était pas l’acheminement de l’eau usée, mais celle de l’eau potable. Par la suite, le Conseil des ministres avait délégué cette tâche au CDR qui a lancé un appel d’offres, auquel les fonds arabes ont répondu favorablement fin 2008, mais qui n’a été approuvé par le Parlement qu’au début de 2011 à cause de la crise politique dans le pays.
Le réseau d’égouts, qui englobe toute la partie montagneuse de cette région, a commencé à être construit depuis 4 mois par la société Greenline et devrait être prêt en 2013.

Autre frein : l’absence de données
Pendant la guerre, les déchets étaient jetés n’importe où et l’absence totale d’inventaires officiels des réseaux existants rend aujourd’hui la tâche encore plus complexe. « Ce qu’on fait n’est pas extraordinaire, mais c’est beaucoup si l’on tient compte des moyens dont on dispose », commente M. Karam. Le manque de statistiques sur le nombre d’habitants complique également le travail du CDR, qui a construit la station d’épuration de Batroun pour une population initiale de 10 000 personnes. Aujourd’hui, la ville avoisine les 20 000 résidents.
De nos jours, l’Agence française de développement, qui remplace le Protocole français, a financé les réseaux de Batroun et de Chekka. Mais dans les années 90, les Français préféraient investir dans des secteurs où les machines achetées pouvaient être uniquement françaises. Le réseau des égouts n’en faisait pas partie. Pourtant, il est plus complexe à mettre en place, à cause de l’irrégularité du sol qui nécessite parfois des stations de pompage. La tâche est donc grande et difficile, mais l’ampleur et l’intensification de la pollution aussi.

La majorité des Libanais apprécient le littoral sud pour ses plages. De Jiyeh jusqu’à Tyr, la mer y est belle et il fait bon s’y baigner. Ils passent la journée ou l’après-midi sur les plages privées, éclatantes de propreté. Mais l’eau laisse à désirer. Rien que l’odeur de la mer dégoûte les touristes et, surtout, les habitants, pourtant heureux de pouvoir vivre près de la...

commentaires (4)

C'est vraiment un gachis monumental. Etant contribuabkle et en France et au Liban, je suis doublement scandalisé.

Philippe Nicolas

10 h 03, le 23 août 2011

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Commentaires (4)

  • C'est vraiment un gachis monumental. Etant contribuabkle et en France et au Liban, je suis doublement scandalisé.

    Philippe Nicolas

    10 h 03, le 23 août 2011

  • Quelque soit le gouvernement au pouvoir, les questions liees a l' amelioration de la vie quotidienne du Libanais n'est clairement pas une priorite. Mais dans ce cas precis, et pour une fois, le gouvernement n; est pas le seul a blamer. Chaque Libanais qui se permet de jeter ne serait-ce qu'un megot de cigarette par la fenetre de sa voiture ou de son balcon est a blamer!! On ne connait pas la valeur de notre pays, et pour ca, on ne peut en vouloir qu'a nous-meme! On a le pays le plus beau du monde et on n'est pas foutu de le preserver au jour le jour!! Paurvre Liban!! Bravo Muriel pour ton article!

    Margot EL KHOURY

    05 h 38, le 23 août 2011

  • Pauvre pays... Nous lui en faisons voir de toutes les couleurs aussi... Mais c'est le plus beau des pays...

    Jad Cuffat Oleik Younes

    04 h 15, le 23 août 2011

  • Qui était au pouvoir depuis 2006?? Où va l'argent destiné à ce genre de projets??? Qu'ont fait l'état et les personnes concernées? Il n'y a pas que la méditerrannée qui se trouve souillée au Liban. Tout le pays est souillé. Les libanais se considèrent propres, lorsqu'ils ont un des pays les plus sales. Les gens balancent des peaux de bananes, des sacs en plastique, des boîtes de cigarettes vides de la fenêtre de leurs voitures.... Sincèrement, on en arrive à dire que le Libanais est sale.... Je ne généralise pas, mais quelquechose est à faire.

    Nayla Tahan Attié

    03 h 28, le 23 août 2011

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