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Liban - Feuille de route

Inqilab ?

En perse, inqilab signifie « révolution ». En arabe et en libanais, l'inqilab, c'est le « coup d'État ». C'est dire toute la différence entre les deux cultures, cristallisée au sein d'un seul vocable... Certes, il ne s'agit aucunement de minimiser la grandeur de la culture perse de Khawarizmi, Ferdawsi et Ibn Sina, ou encore celle de Mohsen Makhmalbaf, Abbas Kiarostami ou Shirin Ebadi. Tout au contraire. Cette culture-là fait honneur au monde entier.
Mais ce n'est pas cette Perse-là - loin de là - qui tente aujourd'hui de porter sa révolution islamique au sommet du pouvoir au Liban, en volant, par la contrainte, la victoire des forces du 14 Mars obtenue lors des législatives de 2009, à travers un coup d'État outrancièrement maquillé en processus constitutionnel et démocratique... Après Damas, Gaza et Bagdad, c'est Beyrouth qui est aujourd'hui menacée, d'ici à quelques heures, de tomber sous l'emprise des mollahs. Après l'écrasement de la révolution verte à Téhéran, c'est l'ensemble des acquis de la révolution du Cèdre qui est aujourd'hui en péril : la souveraineté, l'indépendance, les libertés publiques.
Cette réalité cataclysmique, toutes les offensives de charme et de séduction n'y changeront rien. Toutes les tentatives d'enrober cette insurrection froide sous le label de la « modération » et du « centre » ne sont en effet qu'un leurre. Il n'y a pas de « centre » politique aujourd'hui au Liban. Il existe une bataille autour de la place du Liban dans le monde, de son positionnement au cœur du système international, de son respect du droit international. L'attachement au Tribunal spécial pour le Liban cristallise aujourd'hui cette confrontation. Or le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a reconnu hier clairement que l'objectif de la bataille du 8 Mars n'était autre que la chute du TSL, et que c'est cette revendication qui avait motivé la démission des ministres de l'opposition du cabinet Hariri, au début du mois - ce faisant, il a d'ailleurs détruit l'argumentation que s'est laborieusement acharné à construire le chef du CPL, à savoir qu'il menait une nouvelle jacquerie contre « la corruption ».
En acceptant d'être le candidat du 8 Mars, c'est-à-dire du Hezbollah et de la Syrie, Nagib Mikati aurait-il avalisé cette bataille visant à torpiller le TSL ? Que Mikati ait décidé aujourd'hui de « jouer le jeu », avec le fol espoir de sauver la République, est peut-être compréhensible : tout homme est animé par de nobles ambitions et peut se sentir, l'espace d'un instant, à la hauteur de la mission la plus insurmontable. Mais la réalité est bien plus dure. Rien ne prédestinait a priori le maréchal Pétain à permettre les atrocités qui ont été commises durant l'occupation allemande ; il était après tout le héros de Verdun. Est-ce cette volonté aveugle de « préserver la France » qui en a fait un complice de facto des atrocités commises ? La question se pose - mais Dieu préserve Nagib Mikati d'une aussi odieuse comparaison...
Le visage avenant de ladite « révolution » - comme celui du patron du Hezbollah hier durant son intervention - n'est en effet qu'un masque qui cache la plus hideuse, la plus monstrueuse des répressions. L'histoire est parsemée d'expériences similaires : les sourires les plus angéliques et les voix les plus sulfureuses sont autant de loups de carnaval derrière lesquels se dissimulent l'enfer et ses damnations.
Au terme d'un simulacre constitutionnel, aujourd'hui, marqué par l'usage de la contrainte - notamment à l'égard de Walid Joumblatt, sa famille, sa communauté et son bloc parlementaire - pour forcer les députés à rentrer dans les rangs, cet inqilab pourrait bel et bien devenir une réalité, dans une gifle retentissante assénée à la volonté générale du peuple libanais, de sa souveraineté et de son indépendance. Et le Liban risque, en l'espace de quelques heures, de faire un bond de quinze ans en arrière.
Quinze ans. Car il n'y a pas que le Hezbollah à l'œuvre. Le véritable maître de marionnettes, c'est encore une fois le régime syrien qui, d'une part, se pose en interlocuteur modéré de la communauté internationale pour gagner du temps, et de l'autre, harangue délicatement ses alliés à Beyrouth pour prendre le pouvoir, l'objectif étant, ultimement, le même : la chute du tribunal international.
Inqilab ? Certainement. Réussi ? Les heures à venir, bien au-delà des consultations parlementaires, les semaines, les mois permettront de le dire. Car, pour une fois, le temps n'est pas l'arme de Damas uniquement.
Car, à La Haye aussi, il y a un temps. Celui de la justice internationale, qui n'a que faire des soubresauts de la démocratie au Liban. Et ce temps-là, il en faudra bloquer des tours d'horloge et de sablier pour réussir à l'abattre.
En perse, inqilab signifie « révolution ». En arabe et en libanais, l'inqilab, c'est le « coup d'État ». C'est dire toute la différence entre les deux cultures, cristallisée au sein d'un seul vocable... Certes, il ne s'agit aucunement de minimiser la grandeur de la culture perse de Khawarizmi, Ferdawsi et Ibn Sina, ou encore celle de Mohsen Makhmalbaf, Abbas Kiarostami ou Shirin...

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