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Cinema- - Docudrame

« La grande famine » : quand le cinéma complète le livre d’histoire...

Retracer dans un film de 77 minutes quatre années d'horribles souffrances vécues par la population du Mont-Liban, ce n'est certainement pas faire du cinéma de divertissement. D'autant que Paul Farchakh, le réalisateur, met le doigt sur des zones sensibles de l'histoire du Liban.

L’affiche de « La grande famine »

Certains psychologues libanais (dont pas mal d'autoproclamés...) expliquent souvent les débordements de leurs compatriotes par le spectre de la grande famine vécue par leurs aïeux au début du siècle dernier. Une période terrible qui a décimé, entre 1915 et 1918, près du tiers de la population libanaise de l'époque. Et a laissé exsangue les survivants... Un triste épisode qui, malgré le chiffre impressionnant de ses victimes (autour des 200000 morts sur un total de 450000 habitants), n'est cependant signalé dans le livre scolaire d'histoire («unifiée») qu'assez brièvement...

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Un siècle après ces événements, Paul Farchakh, artiste-peintre et ex-professeur de cinématographie à l'Iesav, revient dans La grande famine, un film de 77 minutes, sur les principales étapes de cette plongée de toute une population dans l'horreur.
À commencer par le double blocus enduré par les populations du Mont-Liban au cours de ces années de Première Guerre mondiale. Le premier imposé par les Alliés en Méditerranée pour couper le ravitaillement des Ottomans. Et le blocus terrestre décrété par Jamal Pacha, qui a empêché le blé de rentrer dans cette entité autonome de l'Empire ottoman, sous prétexte qu'il craignait que ses habitants, majoritairement chrétiens maronites, n'en fassent profiter les Français. S'ensuivront les persécutions de toutes sortes que fera subir l'armée ottomane aux habitants appauvris et affaiblis par les privations jusqu'au coup de grâce apporté par une invasion de sauterelles en 1915. Celle-ci durera 100 jours. Elle ravagera – avec l'aide des envahisseurs, semble-t-il – les récoltes et introduira une vague d'épidémies (typhus, malaria et choléra..) qui anéantiront des familles entières.
Partant de ses recherches approfondies sur les causes qui ont mené à cette hécatombe, le cinéaste a produit et réalisé, au moyen de documents et d'images d'archives animées en time-laps et soutenues par une narration à deux voix en arabe, une sorte d'histoire illustrée de la grande famine sur grand écran. Découpé en séquences temporelles, le film suit la progression crescendo des événements. Ce qui donne lieu parfois à des longueurs et répétitions.
«Il ne s'agit pas d'un pur documentaire. D'abord, parce qu'il dépasse les 52 minutes réglementaires et puis parce que je ne peux pas assurer qu'il ne comporte pas une part de subjectivité. Ne serait-ce qu'à travers le choix des ouvrages de références sur lesquels je me suis basé dans mon travail », affirme Paul Farchakh.

Savoir d'où l'on vient...
En effet, ce dernier a principalement puisé les faits et témoignages qu'il rapporte dans son film de deux ouvrages écrits par deux principaux témoins de ces événements. À savoir : Béchara al-Boueiri, l'homme qui a dirigé toute la communication entre les Alliés et le Liban, et qui a publié en 1926 à New York le récit de ces Quatre ans de guerre, ainsi que le père Antoun Yammine, de Beit-Chabéb, qui a consigné dans ses moindres détails les épreuves mais aussi les persécutions, voire même le génocide dont ont été victimes les Libanais. Principalement les chrétiens. « Quant aux statistiques que je donne dans le film, je les ai prises de L'Histoire de la grande famine au Mont-Liban, du professeur Antoine Boustany », signale le réalisateur.
C'est en présence du ministre de la Culture, Rony Arayji, dont le ministère sponsorise cette production, qu'a été présentée au théâtre Béryte de l'Iesav cette page d'histoire filmée. Un opus d'esprit didactique que son auteur verrait volontiers projeté dans les écoles. Et cela afin de rappeler aux générations actuelles que « ce pays a été érigé, depuis 1860, sur des crânes humains. La grande famine est, à ce titre, la cause indirecte de l'émergence de l'État du Grand-Liban. Il faut que les gens sachent d'où l'on vient », conclut Paul Farchakh.
Et s'inquiètent aussi peut-être de savoir où l'on va, et si l'histoire se répète, non ?

Certains psychologues libanais (dont pas mal d'autoproclamés...) expliquent souvent les débordements de leurs compatriotes par le spectre de la grande famine vécue par leurs aïeux au début du siècle dernier. Une période terrible qui a décimé, entre 1915 et 1918, près du tiers de la population libanaise de l'époque. Et a laissé exsangue les survivants... Un triste épisode qui, malgré...

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