Le président français François Hollande, qui est arrivé samedi au Liban, première étape d'une tournée de quatre jours au Moyen-Orient qui le mènera ensuite en Égypte puis en Jordanie, a annoncé depuis le Grand Sérail une aide "immédiate" aux forces armées libanaises, ainsi que 100 millions d'euros sur trois ans pour aider le Liban qui accueille plus d'un million de réfugiés syriens.
"Nous aurions souhaité accueillir le président français en présence de son homologue libanais, mais malheureusement, le poste est vacant depuis deux ans, en raison de l'échec des députés à élire un chef de l’État", a souligné le chef du gouvernement libanais, Tammam Salam, lors d'un point de presse commun avec le president français. "Cette question a été au centre de nos discussions, a-t-il fait savoir. Nous avons souhaité devant M. Hollande que la France poursuive les efforts qu'elle a entrepris en vue d'aider à élire un président le plus tôt possible. (...) Nous avons également insisté sur la nécessité de tenir le Liban à l'écart des crises qui l'entourent et nous avons enfin évoqué le dossier des réfugiés syriens au Liban, et l'aide nécessaire de la part de la communauté internationale, afin que le Liban puisse supporter ce fardeau", a conclu le Premier ministre.
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Le chef de l'Etat français arrive dans un pays qui vit une crise institutionnelle et n'a pas de président depuis mai 2014. M. Hollande a rappelé qu'il s'agissait de sa deuxième visite au Liban en tant que président, après celle qu'il a entreprise en 2012, au début de son mandat.
Prenant ensuite la parole, le président français a donné l'assurance qu'"aujourd'hui, comme hier, la France se tient aux côtés du Liban, (...) notamment en raison des liens historiques et linguistiques".
Et d'ajouter : "Aujourd'hui je viens, non pas pour rencontrer le président de la République, mais pour souhaiter que l'élection d'un (chef de l’État) se tienne au plus tôt. La France fait confiance au Parlement libanais pour élire un président, et cela est dans l'intérêt du pays, de la région, et de la communauté internationale. Le temps ne peut pas résoudre les problèmes à la place des hommes. Nous devons le faire nous-même".
"Il est dans l'intérêt de la France de mobiliser la communauté internationale au service du Liban. Le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault prévoit une réunion du groupe international de soutien au Liban pour fédérer tous les dons". L'entourage de M. Hollande précise que le chef de la diplomatie se rendra le 27 mai au Liban à cette fin.
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"Aide immédiate"
François Hollande a ensuite affirmé que "la sécurité du Liban est corollaire de celle de la France". "Moi-même et M. Le Drian (Jean-Yves Le Drian, ministre français de la Défense), nous allons apporter une aide directe et immédiate aux forces armées libanaises afin de les soutenir dans leur combat contre le terrorisme. M. Le Drian va évaluer le coût de cette aide afin qu'elle soit mise en place au plus tôt".
Un important contrat de 2,2 milliards d'euros (dit "Donas") de fourniture d'armements français au Liban conclu en avril 2015, a été suspendu à l'initiative de l'Arabie saoudite qui devait le financer par un don. En janvier dernier, l'entourage du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian avait annoncé la reprise des livraisons au printemps.
Concernant l'aide à la gestion de la crise des réfugiés, M. Hollande a annoncé que celle-ci s'élèvera cette année à "50 millions d'euros, et atteindra 100 millions d'euros d'ici trois ans. Et la France, avec l'aide du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, va participer à l'accueil de familles de réfugiés syriens".
Le président français a ensuite abordé le volet culturel des relations franco-libanaises, notamment dans le domaine de l'éducation et des arts.
"Revenir au Liban au plus tôt"
Avant sa rencontre avec M. Salam, le président français s'était rendu au siège du Parlement libanais, place de l'Etoile, où il a été reçu par le président de la Chambre, Nabih Berry.
"Je voudrais revenir au Liban au plus tôt pour rencontrer le prochain président de la République, mais la réponse à cela n'est pas entre mes mains. Il revient à vous d'élire un président de la République, et j'ai confiance en vous. Je suis persuadé que vous allez le faire", a affirmé M. Hollande, lors d'un point de presse en compagnie de M. Berry.
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"Mon message est simple"
"Nous sommes avec vous, car autour du Liban il y a des crises, des guerres, et le Liban veut vivre en sécurité. En plus de ces guerres, il y a les menaces terroristes. Le pays accueille plus d'un million et demi de réfugiés, et la France apporte son aide au pays, compte tenu des liens (...) qui nous unissent", a déclaré M. Hollande.
Et de conclure : "Mon message est simple : la France est aux côtés du Liban".
Au début du point de presse, M. Berry s'est contenté de rapporter les sujets qu'il a évoqués avec le président français : "Nous avons évoqué l'aide à l'armée libanaise, les violations israéliennes et la question des réfugiés (...)", a-t-il déclaré.
Un peu plus tôt, M. Hollande, accompagné de son ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, s'est réuni en petit comité avec le ministre libanais de la Défense, Samir Mokbel, en presence de Mahmoud Berry, le frère du président de la Chambre, selon les informations de notre correspondante sur place, Scarlett Haddad.
Une réunion élargie et qui a duré environ 30 minutes s'est également tenue entre le président français et les membres du Bureau du Parlement libanais, notamment les députés Serge Ter-Sarkissian, Ahmad Fatfat, Antoine Zahra et Michel Moussa. Durant cette rencontre détendue, les députés libanais ont abordé divers sujets avec le chef de l'Etat français, notamment la guerre en Syrie, et le rôle de la France au sein de la coalition internationale anti-terroriste.
S'adressant plus tard à la communauté française à la Résidence des pins, il a insisté une nouvelle fois sur l'élection présidentielle. "Ce ne sont pas des puissances étrangères, pas même la France, qui peuvent décider à la place des Libanais". "Alors je fais confiance au Parlement libanais pour qu'il puisse (...) trouver la voie d'un compromis pour élire un président de la République, former un gouvernement d'unité nationale, procéder à des élections législatives", a-t-il insisté. Le président français a ensuite rencontré à la Résidence des Pins le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt et le chef du Courant Marada, Sleiman Frangié.
A son arrivée au Liban, M. Hollande a été accueilli à l'aéroport international de Beyrouth par le vice-président du conseil des ministres et ministre de la Défense Samir Mokbel.
Cette "visite de travail" de deux jours doit être en particulier consacrée à la crise des réfugiés résultant de la guerre en Syrie, un conflit qui a fait plus de 270.000 morts depuis 2011 et poussé des millions de personnes à fuir les combats. Voisin de la Syrie, le Liban accueille 1,1 million de réfugiés syriens enregitrés, soit l'équivalent d'un quart de sa population. M. Hollande doit notamment se rendre, demain, dans un camp dans la Békaa, où il rencontrera des familles syriennes qui espèrent obtenir l'asile en France.
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commentaires (15)
Alors que ses agissement sur le plan intérieur tardent a porter leur fruits, et confirmer son engagement initial , la politique étrangère de François Hollande demeure audacieuse , pertinente et contraste avec la prudence attentive de ses alter ego européens. Cette aide pour l'armée et les réfugiés est providentielle car désintéressée et non conditionnée par des enjeux partisans qui pourraient accentuer le clivage entre communautés. Bien qu'il cherche à rassembler il ne peux s'empêcher toutefois de dénoncer le drame des chrétiens d'orient gravement menacés, cible de tous les obscurantismes, contraints à l'exil faute d'avenir dans leur monde originel... berceau de la chrétienté. Sa relation particulière avec les deux grand antagonismes chiite et sunnites : récente et dans l'expectative avec le premier stratégique et loyale avec le second lui permet une intermédiation précieuse pour le Liban. Mais les différent belligérants ont franchit plusieurs fois leur Rubicon pour réclamer à ce stade la paix des braves . Les Chrétiens d 'orient , eux ont tant souffert que leur regard s'est tourné vers l'occident, ils souhaitent se défaire cette nouvelle Dhimitude qu' il n'avaient pas connu depuis l'empire ottoman .
ANDRE HALLAK
00 h 43, le 18 avril 2016