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Lifestyle - La mode

Le bijou comme un fruit

Sélim Mouzannar vient d'inaugurer en douceur, en face de sa propre bijouterie, rue Schehadé, à Achrafieh, un élégant salon vintage décoré par sa sœur Pascale Mouzannar-Allemand, conçu comme un incubateur de talents. Baptisé « Macle », nom donné à des réseaux de cristaux qui semblent avoir « poussé » sur une même racine, il réunit les travaux de jeunes créateurs de bijoux internationaux et libanais.

Sélim Mouzannar.

Une petite rangée de vitrines minimalistes annonce un espace en longueur, récupéré sur un alignement d'anciennes boutiques de quartier dont on devine un passé d'épiceries et de quincailleries surchargées. La conversion est surprenante : un élégant salon inondé de lumière naturelle, un sol traditionnel en mosaïque terrazzo qui définit les lieux en se laissant oublier, des chauffeuses et une table basse des années 50. Sous une belle hauteur de plafond qui contribue au confort diffus de l'atmosphère, de grands murs blancs recèlent des rangements invisibles, mais surtout une série de petites vitrines qui encadrent les bijoux comme des œuvres d'art. Et c'est bien d'art qu'il s'agit dans cette brillante scénographie qui met en avant les créations d'une poignée de designers choisis parmi les plus doués de leur génération. Véritable cabinet de curiosités contemporain, Macle est parfaitement adapté à sa vocation qui est de rapprocher les inspirations de bijoutiers du monde entier, y compris libanais.

 

Dix créatrices du monde entier
Des créations organiques de Sia Taylor, britannique formée à la sculpture au Royal College of Art, en passant par Sara Beltran, texane qui signe du nom de Deszo des créations où se mélangent matériaux précieux et semi-précieux, fossiles et dents de requin ; à Polly Wales, qui tourne le dos à la perfection pour ne laisser place qu'à l'émotion ; à Charlotte Chenais, venue de la mode avec Nicolas Ghesquière pour parrain, et dont l'univers se rattache aux années Gainsbourg et aux films de la nouvelle vague ; à Buja, la Londonienne formée auprès d'artisans florentins, et qui s'attache à combiner pierres précieuses et style brutaliste ; à Annick Tapernoux, orfèvre formée à Anvers avant d'obtenir son master au Royal College of Art de Londres et qui, après avoir collaboré avec Hermès, vit désormais à Beyrouth où elle donne à découvrir la poésie de ses objets martelés ; à Lito, qui a parcouru le mode, de l'Inde au Mexique, en passant par l'Afrique et le Japon, pour nous restituer des pièces uniques et inspirantes qui ont séduit Kenzo et Jean-Paul Gaultier ; à Carine Larretgère, venue de chez Marc Jacobs et Louis Vuitton et qui signe de sa marque « Aimée. Aimer » des bijoux perfectionnistes où la couleur des gemmes s'harmonise avec les nuances de l'or ; à Catherine Lévy, qui s'attache, sous sa marque « Dorette », à dessiner des bijoux doux, légers et fluides où le précieux se mélange à la verroterie ; à Brooke Gregson, venue de l'univers de la maille qu'elle dessinait pour Marni et Louis Vuitton, et qui poursuit sa passion en tressant des métaux précieux ; à Dina Kamal, enfin, la Dinh Van libanaise, architecte de formation et qui transforme, par son approche minimaliste et raffinée, le bijou oriental traditionnel en objet à la fois intemporel et contemporain ; on se demande comment un espace de dimension aussi modeste peut offrir avec une telle lisibilité un aussi vaste panel d'inventeurs dédiés au plus précieux des ornements. Et c'est dire la magie de Macle qui fonctionne à la manière d'un petit musée sous la houlette de Pascale Habis.

 

Un joaillier atypique
Arrêté par les Khmers rouges sous Pol Pot, à une époque où il travaillait dans une mine de rubis, Sélim Mouzannar garde de cette expérience une passion pour la justice et la non-violence. Ce combat se traduit dans tout ce qu'entreprend ce bijoutier-joaillier atypique, qui salue chaque lever de jour d'un joyeux « Vive la vie ! » lancé à travers les réseaux sociaux. Descendant d'une lignée de bijoutiers, réputée dans la région depuis le XIXe siècle, initié dès l'enfance aux secrets et au savoir-faire du métier, notamment dans les anciens souks de Beyrouth, il refuse le statut d'héritier et lance en solo sa propre griffe. Aussitôt, il modernise et remet à l'honneur le bijou ottoman dit « falamanki ». Les collections se succèdent, célébrant tour à tour l'architecture du vieux Beyrouth, la terre, le lien, la Méditerranée. Par-dessus tout, son métier est prétexte à susciter des rencontres, rapprocher les gens, lancer des débats comme au temps des vieux souks où les boutiques étaient avant tout ces lieux où l'on s'arrêtait pour prendre un café, tenir compagnie au commerçant et refaire le monde. Avec Macle, Sélim Mouzannar ne fait qu'élargir cette confrontation d'idées au domaine de la création joaillière, en abattant les frontières à sa manière et en invitant le monde dans un mouchoir de poche.

 

Mille et une nuits de diamants
Cette saison, Sélim Mouzannar cisèle des arcades et recrée la voûte céleste de l'Orient en myriades de tanzanites et de diamants pour raconter à sa manière les contes des Mille et Une Nuits. L'or rose est serti de rhodium noir et les brillants jouent les étoiles. À la croisée de la poésie, de l'histoire et d'un savoir-faire ancestral, cette nouvelle ligne interprète une fois de plus la nostalgie du passé avec une surprenante modernité.

 

Pour mémoire

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