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Culture - Sculpture

Entre ses mains, la trachy-andésite se métamorphose

Ses fines sculptures en pierre de roche ressemblent étrangement à des moucharabieh : Thierry Courtadon, artiste auvergnat, « pierreux » de son état, investit les jardins parisiens du Palais-Royal.

Thierry Courtadon, tailleur de pierres.

En orfèvre de la pierre, il cisèle dans la roche volcanique de fines et délicates lettres en dentelle. Le sculpteur auvergnat Thierry Courtadon investit les jardins du Palais-Royal, à Paris, pour une exposition entre transparence et monumentalité.
Gare de Volvic (Puy-de-Dôme). Au milieu des blocs massifs de pierre de lave qui s'enchevêtrent dans la cour poussiéreuse de l'atelier familial, l'artiste s'attelle à la création d'une vingtaine d'œuvres contemporaines (dont 15 inédites) qui prendront place au cœur de la capitale française.
« Une exposition comme celle-là, c'est 18 mois de travail. Il s'agit d'une opportunité exceptionnelle, qui ne se présentera peut-être qu'une seule fois dans ma carrière », se réjouit le tailleur de pierre, qui entend mêler dans ses créations le minéral au végétal.
Toiles d'araignées, cocons de lave, parterre d'herbes folles comme figées par le vent. Entre ses mains calleuses, la trachy-andésite – nom savant de la pierre de Volvic – se métamorphose. Un travail graphique et technique qui repousse les limites de la matière devenue souple et légère, capable de se tordre et d'onduler tel un ressort. Cet ambassadeur de la candidature de la Chaîne des Puys et de la Faille de la Limagne au patrimoine mondial de l'Unesco entend redonner, dans l'écrin du Palais-Royal, ses lettres de noblesse à cette roche provenant d'anciennes coulées de lave figées tout près de son atelier.
« Au départ, vous avez un caillou. Mais pour moi, c'est une pierre semi-précieuse, qui revêt la même noblesse que le marbre. Je veux montrer de quoi ce matériau est capable et changer les a priori qu'on en a aujourd'hui », fait valoir cet hyperactif sensible et habité par la passion. Il faut dire que la pierre de Volvic a longtemps servi à la réalisation de voiries, de parements de façades et autres monuments funéraires. À Clermont-Ferrand, elle a façonné au cours des siècles l'identité de la ville, à l'image de sa cathédrale gothique dont les immenses flèches noires s'étirent vers le ciel.

Pierreux de père en fils
« C'est une roche souvent perçue comme funèbre. J'essaie de la rendre sensuelle, de faire en sorte qu'on ait envie de la toucher, de la caresser comme si c'était du velours », s'enthousiasme l'artisan pour qui la couleur sobre de la roche, aux nuances de gris anthracite, est « parfaitement actuelle ».
Le sculpteur qui a depuis longtemps quitté l'univers des stèles funéraires, est un « pierreux », comme il aime à se définir lui-même. « Un amoureux de sa matière », élevé dans les guêtres de son père, lui-même tailleur de pierre qui l'initia dès ses cinq ans.
« Je ne vois pas vraiment ce que je pouvais faire d'autre », confie l'homme qui a suivi « sans même y réfléchir » la voie tracée par son grand-père et son arrière-grand-père, après une formation aux Beaux-Arts de Lyon. À 45 ans, il est le dernier rejeton d'une dynastie au sein de laquelle il a puisé un savoir-faire et des techniques ancestrales, dont il se sert aujourd'hui pour créer un esthétisme aérien et épuré. L'une de ses pièces maîtresses : un parchemin de dentelles, entre le moucharabieh oriental et la calligraphie, qu'il décline au fil des commandes.
Ses créations versent aussi dans le design : pour Peugeot, il a réalisé un sofa entièrement sculpté dans la lave, fusionnant avec de la fibre de carbone. L'objet, plus conceptuel que confortable, a été exposé dans des salons du constructeur automobile à Milan et Pékin.
Le façonneur de lave exporte aussi ses créations à l'étranger, des États-Unis au Moyen-Orient, jusqu'en Australie et au Japon. Il a également conçu des éléments pour la salle de bains de la reine d'Angleterre. Son futur projet artistique : ciseler des œuvres éphémères « à la lisière du land-art ». « Il y a quelques années, j'étais capable d'effectuer tout ce que je pensais, aujourd'hui je suis capable de réaliser tout ce que je rêve », livre l'artiste à l'imagination inépuisable.

Karine ALBERTAZZI / AFP

En orfèvre de la pierre, il cisèle dans la roche volcanique de fines et délicates lettres en dentelle. Le sculpteur auvergnat Thierry Courtadon investit les jardins du Palais-Royal, à Paris, pour une exposition entre transparence et monumentalité.Gare de Volvic (Puy-de-Dôme). Au milieu des blocs massifs de pierre de lave qui s'enchevêtrent dans la cour poussiéreuse de l'atelier familial,...

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