La Maison du Futur est une institution fondée en 1975 par le président Amine Gemayel. Elle entend être un lieu de recherche, d'analyse et de dialogue pour une meilleure compréhension et appréhension des conflits. Progressivement, elle s'est imposée comme un des think tanks les plus importants de la région. Ses locaux ayant été détruits pendant la guerre civile, l'institution se trouve désormais dans le sérail de Bickfaya. Après son inauguration il y a deux semaines, la Maison du Futur s'est associée à la Fondation Konrad Adenauer, représentée par Peter Rimmele, pour l'organisation du séminaire sur le plan Marshall arabe qui s'est tenu samedi et qui lui a donné un nouveau souffle.
Si le titre du séminaire a de quoi surprendre, on comprend mieux le choix des organisateurs au fil des discours des intervenants. Au cours de cette journée, les comparaisons ont associé les pays du Moyen-Orient, encore happés dans le tourbillon du printemps arabe, à l'Allemagne au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Un parallèle, tracé par l'ambassadeur allemand Christian Clagg, associe les réfugiés syriens aux réfugiés de Sarajevo lors de la crise en Bosnie-Herzégovine. Heureusement, on parvient à éviter de malheureux raccourcis ; l'histoire n'est pas si simple.
Plusieurs positions défendues par des participants libanais, allemands, américains, égyptiens, koweïtiens et bahreïniens ont reflété la spécificité et la complexité du contexte propre au Proche et Moyen-Orient. Où s'arrête le religieux et où commence le politique? Il est nécessaire de redéfinir l'État moderne arabe, un État démocratique qui serait capable d'intégrer le fait religieux sans l'isoler.
Les panélistes sont d'abord partis d'un constat des situations géopolitiques composant les États de la région et ont abordé ce que les historiens appellent le « miracle allemand », le spectaculaire redressement du pays dès 1947. Pour Sami Aoun, professeur à l'École de politique appliquée de l'Université de Sherbrooke, « le Moyen-Orient se trouve actuellement dans une période de transition précédant une nouvelle polarisation du Liban et de la région ».
Lors d'une deuxième discussion, il a été question d'avancer des analyses sur les évolutions possibles en soulignant l'important rôle des différents partenaires extérieurs. Certains comme l'Américain S. Enders Wimbush ont agité l'épouvantail chinois, dont la présence – notamment militaire – est croissante et favorisée par un manque de réactivité des États-Unis. Le rôle de l'Europe a été un sujet récurrent. Si pour Wimbush, l'Union européenne est très loin d'être en mesure d'intervenir de quelque manière que ce soit, Hassan Mneimneh, dirigeant de Middle East Alternatives à Washington, DC, estime au contraire que l'Europe continuera d'être un partenaire privilégié pour les pays arabes. Selon lui, les États-Unis, la Chine et l'Inde ne sont pas des interlocuteurs 100 % fiables et un partenariat euro-méditerranéen est impératif.
Enfin, lors d'une troisième conférence a été soulevée la pertinence d'un partenariat global dans la veine du plan Marshall dans l'exemple du cas allemand. Pour Amine Gemayel, le but ultime est de replacer l'humain au centre des préoccupations, et en ce sens le plan Marshall ne se borne pas à une dimension uniquement financière. Tous les intervenants se sont accordés pour insister sur l'influence cruciale de l'éducation, par laquelle tout est à jouer.
Ce séminaire, placé sous le signe du dialogue et de l'échange, est parvenu à lancer une réflexion sur la mise en place d'un plan Marshall pour le monde arabe. Le challenge sera de trouver un consensus, incontournable critère de légitimité, comme l'a rappelé Amine Gemayel dans son discours introductif, sur les modalités d'application de ce fameux plan.
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