Matthias Schoenaerts, nom méconnu, visage omniprésent

Les réalisateurs se l'arrachent et il donne la réplique à certaines des plus grandes stars du cinéma. En moins de deux mois, Matthias Schoenaerts a joué un nazi mélomane dans Suite française, un berger en quête d'amour dans Loin de la foule déchaînée, a donné la réplique à Kate Winslet dans Les jardins du roi, et était récemment à Cannes pour présenter Maryland dans la section Un certain regard. Celui que personne ne connaissait il y a quelques années, pas même dans sa Belgique natale, est aujourd'hui omniprésent sur nos écrans.
Parfaitement trilingue, français/anglais/néerlandais, il fait partie de la (très) rare catégorie d'acteurs à pouvoir jouer dans des films de pays et de langues différentes. C'est à quinze ans qu'il fait ses début au cinéma en tenant un petit rôle dans le film belge Daens, dans lequel joue aussi son père, considéré comme l'un des meilleurs acteurs flamands d'après-guerre.
Avec trente kilos de muscles en plus pour les besoins du tournage, c'est son rôle d'éleveur bovin dans Tête de bœuf qui révèle véritablement Matthias Schoenaerts en Flandre, d'abord, et dans le reste de la Belgique, ensuite. Le succès du film, bien que relativement confiné aux frontières du petit royaume, suffit à lui tailler une place dans la courte liste des jeunes acteurs courtisés par les plus grands. L'année suivante, malgré deux cents personnes auditionnées, c'est sur lui que Jacques Audiard jette son dévolu pour incarner Ali dans De rouille et d'os, gaillard bourru et fauché qui fait la rencontre de Stéphanie (Marion Cotillard), amputée de ses deux jambes après un accident. Acclamé par le public et la critique, Matthias Schoenaerts remporte le césar du meilleur espoir masculin, devenant ainsi le premier acteur belge à recevoir ce prix.
De son partenaire à l'écran, Marion Cotillard dira qu'il est « un homme puissant avec un regard et un sourire d'enfant » et « un acteur immense ». Séduite par son charisme, elle décide de le présenter à son acteur et réalisateur de mari, Guillaume Canet, qui le fera jouer dans son film Blood ties, le remake américain des Liens du sang. Présent sur l'affiche aux côtés de Clive Owen, Mila Kunis et Zoe Saldana, le thriller franco-américain est un échec en salle, mais représente la porte d'entrée de Schoenaerts à Hollywood.
Tout s'enchaîne alors pour l'acteur qui s'internationalise, mais reste prudent, refusant par exemple d'endosser le rôle principal dans la superproduction Robocop, préférant garder un pied dans son pays natal. Entre fin 2014 et début 2015, il est à l'affiche de deux films produits par des Américains, mais réalisés par des Belges. Il y a d'abord Quand vient la nuit, de Mickael R. Roskam, le réalisateur de Tête de bœuf, et puis le remake américain de The Loft, où il interprète Filip, rôle qu'il tenait déjà dans la version belge originale.
D'ici à 2016, il sera à l'affiche de pas moins de six films, dont le très attendu The Danish Girl, où il donnera la réplique à Eddie Redmayne qui remportait en février dernier l'oscar du meilleur acteur. Il y a quelques années, peut-être même quelques mois, personne n'aurait osé lui souhaiter de décrocher lui aussi un tel prix. Aujourd'hui, la perspective de voir un jour le nom de Matthias Schoenaerts gravé sur une statuette en or ne semble plus si absurde.