Rechercher
Rechercher

Cinema- - Cannes 2015

Des histoires, des femmes et un président à deux têtes

Ethan et Joel Coen, deux présidents en un.

On dira ce qu'on veut. Sauf que le Festival de Cannes se renouvelle d'année en année avec chaque fois de nouvelles propositions.
Bien sûr, c'est le même tapis rouge de 60 mètres qu'on déroule – mais il est changé avant chaque projection officielle, soit 180 mètres de tapis utilisés chaque jour.
Bien sûr, ce sont les mêmes stars qui viennent des quatre coins du monde, habillées par les mêmes grands couturiers – mais ce ne sont jamais les mêmes histoires qu'elles racontent.
Bien sûr, ce sont les mêmes fans et les mêmes paparazzis qui s'agglutinent : on décompte à peu près 36 000 professionnels accrédités dont environ 4 500 de la presse – mais rien ne vaut un bonheur de spectateur ou, parfois, une photo volée.
Bien sûr, ce sont les mêmes nuits trop arrosées – mais ces soirées mégaglam, on les attend de pied ferme pour faire de belles, ou si les étoiles le veulent bien, de très belles rencontres.
Bien sûr – mais il y a une seule magie. Et elle est unique. La magie d'un film qu'on voit pour la première fois : 83 longs-métrages projetés cette année dont 53 en sélection officielle. Des films qu'on découvre. Avec un regard neuf – d'enfant... Un certain regard, peut-être un regard certain ?
Cannes, c'est la découverte à chaque coin de rue, dès qu'on s'engouffre dans une salle de cinéma, qu'on s'enfonce dans un siège plus ou moins confortable, qu'on voyage sans avion, sans visa...Ce n'est pas tant les paillettes qui brillent à Cannes, mais la lumière qui éclaire, revigore, rajeunit. Malgré ses soixante-huit ans, le festival n'a jamais paru aussi frais. Et pour cause...

Maïwenn, Valérie, Agnès...
Après avoir pensé à Mad Max comme film d'ouverture, c'est avec un grand plaisir que les cinéphiles ont appris que c'est Isabelle Bercot qui ouvrira le bal avec La Tête haute, avec Catherine Deneuve et un (très jeune) nouveau venu dont on dit déjà un énorme bien : Rod Paradot.
Scénariste et actrice, Isabelle Bercot était déjà en 2011 à Cannes pour Polisse, qu'elle a coécrit avec Maïwenn. Celle-ci revient également et sera en haut de l'affiche avec Mon Roi, dont l'interprète principale est... Emmanuelle Bercot. Le cinéma français est décidément une petite famille. Cette fois, Maïwenn semble décidée à viser plus haut que le Grand Prix du jury.
Une autre réalisatrice française est également en compétition cette année. Valérie Donzelli, dont on avait follement aimé La Guerre est déclarée, primé à la Semaine de la critique en 2011. Cette fois, elle concourra pour la Palme d'or avec Marguerite et Julien, un film dans lequel Anaïs Demoustier donne la réplique à Jérémie Elkaïm. Deux réalisatrices françaises contre deux cinéastes hommes : Jacques Audiard, encore, et Stéphane Brizé.
Sans oublier, aussi, une Parisienne d'adoption, Nathalie Portman, qui présente son premier film en tant que réalisatrice, Tale of Love and Darkness, projeté en séance spéciale. La femme-cygne, compagne du chorégraphe Benjamin Millepied, prouve qu'elle a plus d'un tour dans son sac.
Cerise sur le gâteau, on apprend que la grande Agnès Varda recevra une Palme d'or d'honneur le jour de la cérémonie de clôture. Une première pour une femme réalisatrice puisqu'à ce jour, seuls trois hommes ont obtenu la précieuse distinction : Woody Allen, Clint Eastwood et Bernardo Bertolucci. Décernée au nom du conseil d'administration du Festival de Cannes, elle est attribuée à un réalisateur de renom dont l'œuvre fait autorité dans le monde, mais qui n'a pourtant jamais reçu de Palme d'or. L'hommage fait à cette artiste malicieuse et passionnée, compagne de Jacques Demy et pilier de la première heure de la Nouvelle Vague, qui a marqué l'histoire du rendez-vous cannois à plusieurs reprises, relève de la même dynamique qui a accouché de l'affiche de Cannes 2015 : le poster est dédié à une autre femme fondamentalement indépendante, Ingrid Bergman.

Bicéphale
En attendant, il y a Pierre Lescure qui succède à Gilles Jacob, après un long règne à la tête du festival. Et il y a aussi cette toute autre nouveauté, ces deux présidents du jury, pour cette édition 2015 : Ethan et Joel Coen. Bicéphale ? À y réfléchir calmement, cette décision n'est pas si étrange que cela. Parce que les frères Coen sont quasiment une seule personne. Un esprit dans deux corps. Une identité cinématographique dans deux noms. C'est vraiment à s'y méprendre. Car qui peut vraiment confirmer lequel de Joel (le grand brun) ou d'Ethan (le petit aux cheveux châtain) fait quoi ? Si l'un produit (Ethan) et l'autre réalise (Joel), les deux cogitent et écrivent. Et accouchent.

De feu...
Tout aussi bipolaire est Ingrid Bergman, l'égérie de ce 68e festival. Actrice suédoise connue pour son regard d'ange et son incroyable douceur, elle avait réellement un volcan qui sommeillait en elle. Elle s'était d'ailleurs attirée les foudres d'une Amérique puritaine et d'une Italie catholique en tombant passionnément amoureuse du réalisateur Roberto Rossellini.
En dévoilant l'affiche, les organisateurs avaient souligné que c'était une « icône moderne, une femme libre, une actrice audacieuse. Star hollywoodienne et figure du néoréalisme, elle changeait de rôles et de pays d'adoption au gré de ses passions, sans jamais perdre ce qu'elle avait de grâce et de simplicité ».
La comédienne a tourné avec d'illustres réalisateurs, outre Rossellini : Alfred Hitchcock ou Ingmar Bergman, notamment, et elle avait aussi présidé le jury du Festival de Cannes en 1973. Pendant l'événement, un documentaire inédit sur la comédienne, In Her Own Words de Stig Björkman, sera également projeté dans le cadre de Cannes Classics. Le festival s'associera au Ingrid Bergman Tribute (puisqu'on célèbre le centenaire de l'actrice), un spectacle à partir de la correspondance échangée entre l'actrice et Roberto Rossellini, que leur fille, Isabella Rossellini, proposera en septembre.

... et de glace
Pour la clôture, Luc Jacquet, le réalisateur oscarisé de La Marche de l'empereur, présentera son quatrième long métrage, La Glace et le ciel dimanche 24 mai dans le grand théâtre Lumière du Palais des festivals.
Dans ce documentaire, le cinéaste évoque les découvertes du scientifique Claude Lorius, parti en 1957 étudier les glaces de l'Antarctique et qui, en 1965, a été le premier à s'inquiéter du réchauffement climatique et de ses conséquences pour la planète. Aujourd'hui âgé de 82 ans, il continue d'envisager l'avenir avec espoir : « Je crois que l'homme va se redresser. L'homme va trouver la solidarité qui mènera les gens qui vivent sur cette planète vers un autre type de comportement. »
Visionnaire ou utopiste ? Peu importe. Cannes est là pour lui assurer la visibilité dont il manquait. Parce que Cannes, bien sûr, est avant tout, et à chaque fois, éminemment politique. Comme le cinéma. Tous les cinémas.

C. K.

On dira ce qu'on veut. Sauf que le Festival de Cannes se renouvelle d'année en année avec chaque fois de nouvelles propositions.Bien sûr, c'est le même tapis rouge de 60 mètres qu'on déroule – mais il est changé avant chaque projection officielle, soit 180 mètres de tapis utilisés chaque jour.Bien sûr, ce sont les mêmes stars qui viennent des quatre coins du monde, habillées par les...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut