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Vues imprenables

Bravo et merci, Messieurs les Anglais, pour avoir eu, avant même l'état-major libanais, l'idée de ces miradors permettant de mieux surveiller – car d'un peu plus haut – notre frontière avec la Syrie. Et merci encore pour être passés de la pensée à l'acte en édifiant une douzaine de ces ouvrages appelés à se multiplier au cours des prochains mois !


Longue de 375 kilomètres, controversée, attendant toujours d'être délimitée et trouée comme un gruyère est ladite frontière, que notre pays n'est jamais parvenu à contrôler. Une telle vulnérabilité, aucun des innombrables régimes qui se sont succédé à Damas ne s'est évidemment privé d'en abuser. Or, voici que par la même malédiction, ce sont les plus dangereux des rebelles de Syrie qui se jouent à leur tour, aujourd'hui, des barrières étatiques.


De ces miradors, nul n'attend vraiment des miracles. Comme pour relever le défi, c'est précisément dans la région de Ras-Baalbeck, censée bénéficier la première de ces observatoires, que les jihadistes lançaient hier même une attaque meurtrière contre une patrouille de l'armée. Mais il faut bien un début à tout, et l'initiative britannique demeure en ceci remarquable qu'elle est la toute première à aborder concrètement, quoique avec de modestes moyens, la nécessité d'aider notre pays à blinder sa frontière orientale : objectif au moins aussi vital que les fournitures occidentales d'armements à l'armée.


Cette sollicitude, il est vrai que la Grande-Bretagne nous la doit. Et avec elle, la France, coparraine de ces mêmes lignes Sykes-Picot qui façonnèrent les divers États du Levant, et que s'acharnent à liquéfier les forcenés de Daech, al-Nosra et consorts. Avec elles deux, last but not least, la superpuissance américaine, héritière des empires coloniaux disparus et qui ne s'est pas encore dotée d'une stratégie claire, nette, visible et efficace face à la déferlante du terrorisme jihadiste.


Mais quelle puissance au monde pourra-t-elle aider les Libanais à abattre ces frontières intérieures qui les empêchent de conserver et de consolider leur place au soleil dans cette région entrée en ébullition ? Il n'est guère besoin de miradors, britanniques ou autres, pour observer cette incapacité structurelle, originelle de notre establishment politique à accorder ses violons dans les heures graves. Depuis quatre mois que plus de deux douzaines de soldats et d'agents de l'ordre sont retenus en otage par les terroristes, qu'ils risquent à tout instant la décapitation videofilmée, les autorités demeurent divisées sur les modalités d'un marché avec les ravisseurs.


Grevée d' une aussi tragique confusion, la position négociatoire du Liban est loin d'être idéale, hélas. Même la grosse prise annoncée hier – l'interception, à un poste de contrôle, d'une des épouses du calife de l'État islamique et de son enfant – n'y changera sans doute pas grand-chose : cela à supposer, bien sûr, que le sanguinaire Abou Bakr al-Baghdadi se soucie, un tant soit peu, de récupérer ce qui n'est probablement qu'une infime partie de son harem.

Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb

Bravo et merci, Messieurs les Anglais, pour avoir eu, avant même l'état-major libanais, l'idée de ces miradors permettant de mieux surveiller – car d'un peu plus haut – notre frontière avec la Syrie. Et merci encore pour être passés de la pensée à l'acte en édifiant une douzaine de ces ouvrages appelés à se multiplier au cours des prochains mois !
Longue de 375 kilomètres,...