Accusations de tentative de manipulation de la justice et de mensonges au plus haut niveau, intrigues de couloirs, déclarations changeantes : la classe politique française --partis traditionnels mais aussi l’Élysée-- est éclaboussée par un scandale qui pourrait une fois de plus profiter à l'extrême droite.
"On est vraiment sur une affaire toxique du point de vue de l'opinion, parce que ça touche la gauche et la droite", analyse le politologue Frédéric Dabi de l'institut de sondages Ifop à propos du scandale "Fillon-Jouyet" du nom de ces deux principaux protagonistes. "Marine Le Pen les remercie", titre dans son éditorial le journal le Figaro, en référence à la présidente du Front national.
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Au départ, deux journalistes du Monde affirment que François Fillon, ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, a sollicité le secrétaire général de l’Élysée Jean-Pierre Jouyet pour lui demander d'accélérer les procédures judiciaires contre son ancien patron, devenu rival à la course à la présidentielle 2017.
François Fillon a démenti formellement, portant plainte contre Le Monde, mais l'affaire a pris de l'ampleur lorsque M. Jouyet a revu sa version des faits. Après avoir nié jeudi, il a reconnu dimanche avoir évoqué avec M. Fillon la procédure judiciaire portant sur les comptes de campagne de M. Sarkozy.
On est ainsi passé d'une possible "affaire Fillon" à une "affaire Jouyet", de nombreuses voix demandant la démission du secrétaire général de l'Elysée pour avoir "menti aux Français". Ancien secrétaire d’État du gouvernement de droite de François Fillon, M. Jouyet est aussi un ami de longue date du socialiste François Hollande, dont il est devenu le bras droit à la présidence.
Les deux grands partis UMP (droite) et Parti socialiste sont désormais empêtrés dans l'affaire, chacun tentant de se renvoyer la balle.
'Tous pourris'
A droite, l'affaire montre que le combat des chefs fait toujours rage et que tous les coups semblent permis.
Depuis juin, François Fillon assure avec deux autres anciens Premiers ministres, Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin, la direction provisoire de l'UMP, en grave crise financière. Nicolas Sarkozy est candidat à la présidence du parti et l'élection doit avoir lieu à la fin du mois.
Il entend se servir de la fonction comme d'un tremplin en vue de 2017 mais MM. Fillon et Juppé sont aussi sur les rangs.
A gauche, c'est un nouveau coup dur pour François Hollande, qui bat déjà des records d'impopularité. Si les versions concordent pour dire que le président a refusé d'intervenir dans les affaires judiciaires, son choix de faire venir M. Jouyet à ses côtés est désormais en cause.
En cas de démission de M. Jouyet, M. Hollande serait obligé de nommer un troisième secrétaire général, un des postes clés du pouvoir en France, en moins de trois ans.
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L'affaire met aussi en lumière les relations, surprenantes pour le citoyen lambda, entre des dirigeants politiques issus souvent des mêmes écoles et accusés de connivence malgré leurs désaccords politiques affichés.
Si le quotidien Les Echos estime que Nicolas Sarkozy, empêtré dans plusieurs procédures judiciaires, peut aussi profiter du scandale car il donne "corps à son statut autoproclamé de +victime+", la plupart des analystes estiment que c'est l'extrême droite et Marine Le Pen, déjà donnée en tête des sondages au 1er tour pour la prochaine présidentielle, qui peuvent tirer les marrons de feu.
"Cette succession d'affaires va entretenir le +tous pourris+, l'idée que les politiques dans leur comportement personnel ne sont pas à la hauteur", estime le politologue Frédéric Dabi.
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LA LIBRE EXPRESSION
09 h 23, le 11 novembre 2014