Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Épidémie

« Ebola est extrêmement agressif, explosif, et te détruit en quelques jours, comme un tsunami »

À Madrid, le combat fou d'une équipe de médecins et d'infirmiers...

Trois nouveaux cas suspects sont arrivés ces derniers jours à l’hôpital Carlos III de Madrid. Pierre-Philippe Marcou/AFP

Mar était avec ses enfants. Belen en cours de Pilates, Marta et Fernando mangeaient une glace à Palerme. Le 6 octobre, la vie de ces médecins madrilènes a basculé avec celle de Teresa Romero, première patiente infectée par le virus Ebola hors d'Afrique. Ce jour-là, Mar Lago, 45 ans, Belen Fernandez, 47 ans, Marta Arsuaga, 32 ans, et Fernando de La Calle, 33 ans, ont appris qu'une de leurs collègues au sein de l'hôpital Carlos III de Madrid, référent en matière de traitement d'Ebola, était contaminée.
Ce lundi-là ils tentaient de se détendre, après deux mois intenses où ils avaient déjà affronté, au sein d'une équipe d'une cinquantaine de personnes, le virus africain, en soignant deux missionnaires rapatriés et décédés l'un après l'autre. Leur service, avec un mort par paludisme en trois ans sur quelque 12 000 patients, affichait soudainement un taux de mortalité de 100 %. Et d'Ebola, ils ne savaient rien, racontent-ils pendant une pause à l'hôpital : « La recherche existante sur Ebola tient sur une quinzaine d'études », explique le docteur Lago en mimant une pile de papiers bien mince.
Ce lundi-là donc, le message est arrivé sur la messagerie WhatsApp de Mar Lago. À travers Teresa Romero, 44 ans, aide-soignante contaminée par le deuxième religieux qu'ils avaient soigné, Ebola venait de frapper Madrid et pour la première fois en dehors du continent africain. « C'était un désastre », raconte Mar. « Je me suis dit : ce n'est pas possible », ajoute Marta Arsuaga, qui l'a appris à 18h00 alors qu'elle commençait tout juste une glace chocolat citron et des vacances avec son ami Fernando de la Calle. Cette nuit-là, Belen, biologiste, est restée à l'hôpital pour s'occuper des analyses de Teresa Romero et de deux autres cas suspects. « C'était fou. Les téléphones sonnaient sans arrêt. C'était comme un bouillonnement de messages : familles, amis, journalistes », se souvient-elle. Au cœur de l'ouragan déclenché par la nouvelle, l'équipe se serre les coudes, ne répond plus au téléphone et tente de sauver la patiente.

« Nous sommes des pionniers »
Les gardes s'enchaînent. Trois de 24 heures en une semaine pour Mar, qui ne voit pratiquement plus son fils adolescent. Il faut soigner Teresa dans des conditions extrêmes. Les combinaisons sont difficiles à mettre et à enlever. « On palpe mais on ne peut pas ausculter. » On rassure tout en parlant derrière un masque. On tente d'entrer le moins possible dans la chambre, en communiquant par interphone. On surveille le langage corporel par vidéo. Ebola, « moche », « malin », dit Mar. Un virus « extrêmement agressif, explosif, et qui te détruit en quelques jours, comme un tsunami », en s'attaquant très vite aux organes, résume Fernando. Mar, sans livrer de détails cliniques, évoque une de ces nuits « où Teresa aurait pu partir dans l'autre monde », car, dit-elle, « des moments critiques, il y en a eu ».
Belen avoue avoir prié avant de commencer sa journée et montre sa médaille en argent de la Vierge miraculeuse. Fernando, pas du tout religieux par ailleurs, extirpe de son pantalon blanc un rosaire légué par sa grand-mère. Teresa doit vivre, car c'est leur collègue. Teresa doit aussi vivre car elle incarnera alors la réussite des traitements qui pourront servir à d'autres en Afrique, continent avec lequel ils ont des liens à travers des missions humanitaires. Belen se rend tous les ans en Angola et Marta a travaillé en Éthiopie. L'aventure médicale les porte. « J'aime les affections aiguës », avoue Mar. « Nous sommes des pionniers », ajoute Fernando en expliquant que sur le terrain, les ONG déployées ne peuvent pas tester de traitements, mais seulement tenter de contenir le mal qui a déjà fait près de 5 000 morts. « Au début, reprend le jeune docteur De La Calle, en août, avec le premier missionnaire, on ne savait même pas avec qui échanger des informations ». Désormais, chaque semaine, l'OMS organise une conférence téléphonique entre spécialistes des grands hôpitaux confrontés à Ebola. « Hier, on a échangé avec les gens de l'hôpital de Dallas », sur les traitements appliqués. Il y a quelques semaines, c'était avec la France.
Dix jours ont passé et l'état de Teresa s'est amélioré. Elle parle avec eux, réclame même de la musique et des photos de proches. L'espoir semble l'emporter. Mais quelques heures plus tard, leur course folle contre le virus a repris, avec l'arrivée de trois nouveaux cas suspects à l'hôpital.

Mar était avec ses enfants. Belen en cours de Pilates, Marta et Fernando mangeaient une glace à Palerme. Le 6 octobre, la vie de ces médecins madrilènes a basculé avec celle de Teresa Romero, première patiente infectée par le virus Ebola hors d'Afrique. Ce jour-là, Mar Lago, 45 ans, Belen Fernandez, 47 ans, Marta Arsuaga, 32 ans, et Fernando de La Calle, 33 ans, ont appris qu'une de leurs...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut