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Moyen Orient et Monde - Ukraine

La guerre des mots encore et toujours entre Moscou et l’Occident

Le PM Iatseniouk en visite dans l'est pour tenter d'apaiser la confrontation avec les séparatistes prorusses.

Des militants prorusses à Donetsk se réchauffent autour d’un feu de bois près d’une barricade. Alexander Khudoteply/AFP

Le Premier ministre ukrainien s'est rendu hier dans l'est du pays pour tenter d'apaiser la confrontation avec les séparatistes prorusses, alors que le ton est encore monté entre Occidentaux et Russes.

Arseni Iatseniouk a fait une visite de quelques heures à Donetsk, l'une des deux villes de l'est russophone où plusieurs milliers d'activistes prorusses se sont emparés de bâtiments publics. Des troubles qui ont fait craindre une intervention russe, Moscou ayant massé selon l'OTAN jusqu'à 40 000 hommes à la frontière, et le président Vladimir Poutine s'étant engagé de longue date à protéger « à tout prix » les populations russes de l'ex-URSS. Les activistes, pour certains armés, occupent depuis dimanche le bâtiment de l'administration régionale à Donetsk et celui des Services de sécurité (SBU) à Lougansk, villes situées à quelques dizaines de kilomètres de la frontière russe.

Arsen Avakov, ministre de l'Intérieur, avait menacé les séparatistes qui ne déposeraient pas les armes de recourir à la force, mais M. Iatseniouk est venu hier tendre un rameau d'olivier. Affirmant qu'il n'y avait « pas de voie pour la force », il a offert des garanties, qui risquent toutefois de ne pas satisfaire les contestataires les plus radicaux. Le Premier ministre s'est engagé à proposer avant la présidentielle anticipée du 25 mai des révisions constitutionnelles pour « équilibrer les pouvoirs entre le pouvoir central et les régions ». Et a promis de ne toucher « sous aucun prétexte » aux lois garantissant le statut des langues autres que l'ukrainien. Mais les séparatistes, soutenus par la Russie, exigent une « fédéralisation » de la Constitution ukrainienne. Ce que refuse le pouvoir pro-européen de Kiev, non reconnu par Moscou, qui y voit la porte ouverte à un éclatement du pays et refuse d'aller plus loin qu'une « décentralisation ».
M. Iatseniouk n'a eu aucun contact direct avec les insurgés. Mais Rinat Akhmetov, homme le plus riche du pays et qui exerce une grande influence dans la région, participait aux discussions et a déjà servi d'intermédiaire.

Lueur d'espoir
Kiev et Washington ont accusé les services spéciaux russes d'être derrière les troubles dans l'est, mais le ministre russe des Affaires étrangères a assuré hier que Moscou n'avait « ni agent ni militaire » dans la région. Et, relançant la guerre des mots, Sergueï Lavrov a dénoncé « l'incitation à des sentiments antirusses » qui « menace de manière évidente la stabilité européenne ». Une lueur d'espoir diplomatique était pourtant née de l'annonce jeudi de discussions à quatre, États-Unis, Russie, Ukraine, Union européenne, la semaine prochaine sur cette crise. Le département d'État américain et l'Union européenne ont confirmé hier la tenue de ces discussions le 17 avril à Genève.

La question très sensible des livraisons de gaz russe est également revenue dans le débat. L'UE a sèchement rappelé la Russie, qui lui fournit près du quart de son gaz, au « respect de ses engagements », après que Vladimir Poutine eut mis en demeure jeudi les Européens d'apurer les milliards de dette gazière de l'Ukraine sous peine de voir leur approvisionnement menacé. Bruxelles a pris soin de souligner que les achats gaziers européens « contribuaient pour à peu près 50 % des recettes du budget fédéral russe », et le président russe a d'ailleurs baissé d'un ton, assurant que les engagements russes seraient tenus. Le commissaire européen à l'Énergie, Günther Oettinger, a quant à lui dit travailler à une solution pour aider l'Ukraine, qui multiplie les contacts avec des fournisseurs de rechange potentiels, à payer ses factures. La Russie subit déjà le contrecoup économique de la crise, croissance en berne et fuites de capitaux massives. Les répercussions pourraient s'étendre à l'économie mondiale, a averti le Fonds monétaire international, et les pays développés et émergents du G20, réunis hier à Washington, ont indiqué « surveiller » de près la situation.

Sanctions US
En attendant, les États-Unis ont annoncé hier des sanctions à l'encontre de six responsables de Crimée, un ancien responsable ukrainien ainsi qu'un groupe gazier, soupçonnés de menacer la paix et la stabilité en Ukraine. « La Crimée est un territoire occupé. Nous continuerons à imposer des coûts à ceux qui continuent à violer l'intégrité du territoire et la souveraineté de l'Ukraine », a affirmé le sous-secrétaire au Trésor, David Cohen. Les États-Unis ont également appelé la communauté internationale à prendre des « mesures immédiates » pour compléter le montant d'aide promis à l'Ukraine par le FMI et répondre aux « vastes » besoins de financement du pays.

En Europe centre-orientale, la crise ukrainienne suscite une inquiétude grandissante, la Roumanie, la Pologne et les pays baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie) incitant l'OTAN à renforcer ses capacités à l'est, y compris avec des troupes au sol, ce qui constituerait un pas de plus vers un retour de la guerre froide. L'OTAN doit prendre des mesures supplémentaires, dont des déploiements de troupes et des exercices, pour défendre ses États membres, a déclaré pour sa part hier Anders Fogh Rasmussen, directeur de l'Alliance. Pour rassurer les pays membres en Europe de l'Est, l'OTAN a déjà renforcé la police aérienne au-dessus des États baltes, déployé des avions-radar Awacs en Pologne et en Roumanie, et supervisé le renforcement de la présence navale dans la mer Noire.


Pour mémoire

Le monde de Poutine, le commentaire d'Ivan Krastev

De l'utilité de la guerre froide, la tribune d'Ian Buruma

Le Premier ministre ukrainien s'est rendu hier dans l'est du pays pour tenter d'apaiser la confrontation avec les séparatistes prorusses, alors que le ton est encore monté entre Occidentaux et Russes.Arseni Iatseniouk a fait une visite de quelques heures à Donetsk, l'une des deux villes de l'est russophone où plusieurs milliers d'activistes prorusses se sont emparés de bâtiments publics....
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