Lors d'une réunion d'un Conseil européen tenue il y a quelques jours, le ministre français de l'Intérieur Manuel Valls et la ministre belge de l'Intérieur et de l'Égalité des chances, Joëlle Milquet, ont exprimé leur inquiétude concernant l'impact possible (vraisemblablement sur l'Union européenne) de la participation de nombreux jeunes Européens dans les combats en Syrie aux côtés des groupes jihadistes. Joëlle Milquet a estimé entre 1 500 et 2 000 le nombre de ces combattants européens qui ont rejoint les rangs des islamistes en Syrie et Manuel Valls indique pour sa part que non moins de 184 Français combattent avec les organisations radicales et plus d'une centaine s'apprêtent à se rendre en Syrie dans le même but, tandis que 80 de ces combattants français ont regagné récemment la France.
Il y a un mois, les Services français ont par ailleurs démantelé une filière jihadiste qui organisait le transfert de volontaires désirant participer aux combats en Syrie. Plus de 400 jeunes seraient ainsi partis pour renforcer les effectifs des groupes radicaux et une cinquantaine d'entre eux seraient retournés en France. Des cas similaires ont été également signalés en Allemagne.
Le conflit syrien est ainsi devenu au fil des mois un important catalyseur pour l'enracinement de groupements jihadistes et radicaux non seulement sur les lignes de front en Syrie, mais aussi – et c'est là le plus grave – en territoire européen. De nombreux hauts responsables au sein de l'Union européenne ont fait part à ce propos de leurs appréhensions quant aux retombées d'un tel phénomène, dans la perspective du retour, et surtout du comportement ultérieur, de ces combattants européens dans leur pays respectif après leur séjour syrien.
Un constat, que nombre d'analystes et d'observateurs libanais, arabes, européens et même américains ont fait s'impose à cet égard : le renforcement, sans cesse croissant, des courants jihadistes en Syrie, au détriment de l'opposition syrienne modérée et libérale, est la conséquence directe de la ligne de conduite adoptée par le président Barack Obama au sujet du conflit syrien. Dès le départ, et alors que la rébellion syrienne se limitait les premiers mois à des manifestations de masse pacifiques dans des dizaines de villages et d'agglomérations de Syrie, le chef de la Maison-Blanche a adopté des positions en flèche contre le régime de Bachar el-Assad sans toutefois rien entreprendre de concret pour contraindre le président syrien à mettre un terme à la répression sauvage à laquelle se livrait son appareil meurtrier.
Cette campagne purement et exclusivement médiatique menée ainsi par l'administration US a eu pour effet, paradoxalement, de... renforcer le pouvoir baassiste car elle a provoqué une radicalisation et une recrudescence de l'appui politique, militaire, logistique et financier de la Russie et de l'Iran à Bachar el-Assad... Un appui sans limites qui allait crescendo à mesure que le ton – et uniquement le ton – montait à Washington contre les dirigeants syriens. Et cerise sur le gâteau, alors que l'argent, les armes, les munitions, les conseillers militaires, et bientôt les combattants, affluaient à grande échelle à Damas pour sauver et soutenir le clan Assad, le président Obama faisait obstruction – parfois contre l'avis de ses collaborateurs – à la fourniture d'une aide militaire qualitative (missiles antichars, défense aérienne...) à l'opposition syrienne modérée, représentée par l'Armée syrienne libre.
Conséquence inéluctable de cette politique : au sein de la rébellion, face à l'affaiblissement de l'Armée syrienne libre privée de l'aide occidentale, et compte tenu du fait qu'en période de guerre il ne saurait y avoir de vide sur le champ de bataille, ce sont les groupements islamistes et jhadistes qui se sont renforcés. Ces derniers bénéficiaient en effet de filières d'aides financières et militaires occultes provenant de certains milieux radicaux en Irak et dans le Golfe, parallèlement à un endoctrinement idéologique et à un culte du martyre qui ont accru l'efficacité de ces organisations extrémistes sur le terrain, faisant d'elles un pôle d'attraction pour nombre de combattants, surtout pour les militants étrangers. Mais ces groupes jihadistes se renforçaient sans être en mesure, pour autant, de trancher véritablement la bataille en faveur de la rébellion. Ce renforcement a été cependant suffisant pour permettre, d'une part, au régime de justifier et d'accroître encore davantage sa répression aveugle, et, d'autre part, au pouvoir iranien de se jeter encore plus dans la bataille, par Hezbollah interposé. Autant de facteurs qui ont eu pour répercussion de provoquer une montée aux extrêmes au niveau de la mouvance islamiste anti-Assad au Liban et de susciter des « vocations jihadistes » parmi certains jeunes Européens.
Le déclenchement de ce cycle infernal aurait pu être évité si le président Obama avait joint, dès le départ, l'acte à la parole. Certes, on ne saurait reprocher à l'administration US de vouloir éviter d'entraîner les États-Unis dans une nouvelle aventure conflictuelle. Une telle réserve est après tout légitime du point de vue du citoyen US. Mais ce qui pourrait être reproché par contre aux dirigeants à Washington, c'est de s'être livrés à une farouche escalade verbale anti-Assad durant la phase pacifique de la révolution syrienne, provoquant ainsi une accélération de l'aide militaire russe et iranienne au régime syrien, alors que l'aile modérée de la rébellion ne bénéficiait que d'un soutien moral, ce qui ne pouvait que renforcer les mouvances islamistes et radicales sur le terrain syrien ainsi qu'au Liban et... en Europe.
Les appréhensions manifestées il y a quelques jours par les ministres français et belge de l'Intérieur s'expliquent ainsi à la lumière de ce cycle infernal enclenché par la ligne de conduite optée par Barak Obama. Un cycle infernal dans lequel le Liban se trouve également pris, ce qui affaiblit sensiblement les courants modérés, proches du camp occidental, sur l'échiquier politique local.
À l'aune d'un tel constat, une question troublante se pose avec de plus en plus d'acuité, et en toute objectivité : sur quels fondements l'administration Obama base-t-elle une politique qui a concrètement pour effet d'éliminer de l'équation, ou d'affaiblir, ceux qui sont censés être ses plus proches alliés, comme ce fut le cas en Égypte, en Tunisie, au Yémen, au Liban, et depuis quelque temps en Arabie saoudite, tout en renforçant par la même occasion ceux qui la combattent, du moins publiquement (comme le régime Assad et le pouvoir iranien), ainsi que les courants extrémistes, idéologiquement antioccidentaux ? Et cela sans compter l'inquiétant phénomène perceptible dans nombre de pays européens où la montée généralisée de l'extrême droite est la conséquence directe, entre autres, de cette poussée islamiste et jihadiste stimulée, indirectement, par la stratégie Obama au Moyen-Orient.
commentaires (6)
TRÈS SIMPLE. QU'ON LEUR ANNULE LES NATIONALITÉS QU'ON LEUR A OCTROYÉES ET QU'ON LES REPOUSSE AU RETOUR ! QU'ILS AILLENT VIVRE EN AFGHANISTAN ET AILLEURS...
LA LIBRE EXPRESSION
00 h 13, le 11 décembre 2013