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À La Une - Liban

L’État se hâte sur les « boat people », mais trop lentement

Le Liban décide de dépêcher une délégation en Indonésie; les parents des victimes coupent des routes pour protester contre le laxisme des autorités face à leur tragédie.

Les protestataires ont reproché à l’État de les laisser dans le noir et de ne pas faire l’effort nécessaire pour obtenir des informations sur le sort de leurs proches, « morts ou vivants », hier, en Indonésie.  Photo ANI

Les autorités judiciaires libanaises ont arrêté hier quatre passeurs présumés soupçonnés d’implication dans l’affaire des « boat people » libanais, pendant que les contacts se poursuivaient au plus haut niveau pour mettre en place un mécanisme permettant de rapatrier au plus tôt les rescapés libanais du naufrage du bateau de fortune qui conduisait des clandestins en Australie, ainsi que les corps des victimes.


Une réunion s’est tenue à cette fin au palais Bustros sous la présidence du secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, Wafic Rhaymi, en présence des secrétaires généraux du Haut Comité de secours, le général Ibrahim Bachir, du Conseil supérieur de la défense, le général Mohammad Kheir, ainsi que d’un représentant du ministère de la Santé, Assaad Khoury, et de deux représentants du palais Bustros, Charbel Wehbé, directeur des affaires politiques, et Haytham Jomaa, directeur général du département des émigrés. Décision a été prise de dépêcher en Indonésie dans les prochaines 24 heures une délégation officielle de six personnes conduite par le général Bachir et comprenant des experts en analyse d’ADN, un diplomate et un représentant de la Sûreté générale. Plus tard, le président Michel Sleiman et le Premier ministre démissionnaire, Nagib Mikati, ont décidé d’envoyer également un ministre pour suivre le processus de rapatriement des Libanais.


À la presse, M. Rhaymi a expliqué que les survivants libanais seront rapatriés dès que leurs documents officiels de voyage seront prêts, en précisant que 18 survivants du naufrage ont pu être identifiés, dont 3 ont dû être hospitalisés. « Le Haut Comité de secours doit en outre assurer des billets d’avion à tous les Libanais qui se trouvent actuellement en Indonésie et qui souhaitent revenir au Liban. Plus d’une vingtaine ont été recensés, dont six qui se trouvent en prison à cause de l’expiration de leurs papiers de séjour », a-t-il poursuivi.
Il a expliqué que les survivants ont été installés dans un hôtel de la ville de Sukabumi et sont en sécurité face à la menace que pourrait représenter, pour eux, le réseau de passeurs, d’autant qu’ils sont sous la surveillance des autorités indonésiennes et pris en charge par le HCR. Le Liban, a précisé M. Rhaymi, a demandé un renforcement de la garde dont ils bénéficient.
Selon lui, le nombre exact de Libanais qui se trouvaient à bord du bateau n’a toujours pas pu être déterminé. Il ne sera possible de les identifier qu’après les tests d’ADN puisque les clandestins étaient de plusieurs nationalités. Au total, a ajouté le secrétaire général des AE, trente-trois corps ont été repêchés.

Routes coupées
Dans le communiqué qu’il a fait paraître par la suite, le palais Bustros a indiqué que « non moins de 68 Libanais se trouvaient à bord du bateau » et que, selon le rapport de la police de Cianjur, 18 ont survécu au naufrage. Les opérations de secours devraient se poursuivre dans les dix prochains jours, selon le texte, d’autant que les conditions météorologiques actuelles en Indonésie ne facilitent pas les recherches sous-marines.


Le bureau du Premier ministre démissionnaire, Nagib Mikati, a également fait paraître un communiqué dans lequel il a rejeté les critiques dirigées contre le gouvernement après le naufrage d’Indonésie, en rappelant tout ce que son équipe a fait pour suivre cette affaire, et assurer le rapatriement des survivants et des corps des victimes. « Il est malheureux que certains politiciens exploitent cette tragédie à des fins politiques au lieu de se focaliser sur ses aspects humanitaires par respect aux morts », a indiqué le texte en ajoutant : « Le gouvernement traite cette tragédie sous un angle humanitaire. Il suit de près la situation depuis que l’information lui est parvenue. »
Selon le communiqué, le gouvernement intensifie ses contacts avec les autorités indonésiennes pour résoudre cette affaire et a pris en charge l’hébergement et les besoins des 18 survivants.


Il n’en demeure pas moins qu’en dépit des assurances des autorités sur les efforts qu’elles fournissent, les parents des victimes et les habitants de leurs villages ont entrepris de couper les routes au Akkar et à Tripoli pour protester contre ce qu’ils considèrent comme étant le laxisme de l’État. Au niveau du rond-point Abou Ali, la route a été coupée à la circulation avec de la terre et des rochers, et les manifestants ont installé deux tentes dans la perspective d’un sit-in permanent. Ils ont exhorté les trois pôles du pouvoir d’envoyer une équipe médicale en Indonésie.


La route de Abdé-Halba et la route côtière au niveau des villages de Homs, de Berkayel et de Majdala ont été fermées aussi à la circulation à l’aide de pneus brûlés. Les protestataires ont reproché aux autorités de les laisser dans le noir et de ne pas faire l’effort nécessaire pour obtenir des informations sur le sort de leurs proches, « qu’ils soient morts ou vivants ». Ils ont assuré que « les routes resteront fermées » jusqu’à l’obtention d’une réponse officielle sur les Libanais portés disparus, les noms des survivants et des personnes en prison. Celles-ci ont été cependant rouvertes en fin d’après-midi.


Au niveau judiciaire, les investigations se poursuivent avec les personnes interpellées dans le cadre de cette affaire. Des mandats d’arrêt ont été émis contre quatre passeurs dont les noms n’ont pas été révélés. D’autres personnes doivent être interrogées aujourd’hui dans le cadre de l’enquête.

 

 

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