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Société - Explosions du port

Jugeant l’enquête libanaise « partiale », Amnesty réclame un « mécanisme international »

Le juge Sawan rejette la demande de libération de trois personnes sous mandat d’arrêt; indignation des proches de l’officier arrêté Joseph Naddaf.

Jugeant l’enquête libanaise « partiale », Amnesty réclame un « mécanisme international »

Des soldats œuvrant au déblaiement du port de Beyrouth le 1er septembre. Anwar Amro/AFP

L’organisation Amnesty International, qui milite pour les droits de l’homme, a appelé lundi à une enquête internationale sur les causes des explosions dévastatrices du 4 août dans le port de Beyrouth, estimant que les procédures judiciaires lancées par les autorités libanaises ne sont « ni indépendantes ni impartiales ».

« Un mois après l’explosion meurtrière, il devient de plus en plus évident que les procédures lancées par les autorités libanaises pour faire la lumière sur les événements tragiques du 4 août ne sont ni indépendantes ni impartiales », a écrit Amnesty dans un communiqué. Dans ce cadre, l’ONG internationale appelle à la mise en place d’un « mécanisme international » qui garantirait le droit des victimes à « la vérité, à la justice et à des réparations ».

Amnesty a déploré que, malgré les appels des victimes, de leurs proches et d’organisations militant pour les droits de l’homme en vue d’une enquête internationale, les autorités libanaises, « y compris le président », ont rejeté cette option.

Le chef de l’État, Michel Aoun, avait estimé le 7 août qu’une enquête internationale risquait de « diluer la vérité » sur les raisons des explosions. La déflagration, qui a fait plus de 190 morts et plus de 6 500 blessés et dévasté des quartiers de Beyrouth, a été provoquée selon les explications officielles par un incendie qui s’est déclaré dans un hangar dans lequel étaient stockées, sans précaution, 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium. De nombreux responsables, M. Aoun compris, ont reconnu avoir été tenus au courant de la présence dans le port de ces matières dangereuses, ce qui a provoqué la colère des Libanais qui réclament justice.

Manque d’indépendance et d’impartialité

Amnesty a dans ce cadre regretté que les responsables n’aient pas répondu aux appels à rendre des comptes lancés par « des milliers de manifestants », le samedi 8 août, lors d’un énorme rassemblement à Beyrouth qui a été réprimé par « un usage excessif de la force ». L’ONG rappelle que des centaines de personnes ont été blessées dans la répression de cette manifestation.

La directrice régionale d’Amnesty pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Lynn Maalouf, a déploré que « chaque mesure prise par les personnes haut placées au Liban montre clairement que les autorités n’ont aucune intention d’assumer leurs responsabilités concernant une enquête efficace, transparente et impartiale ». Elle a souligné que la Cour de justice, devant laquelle a été déféré ce dossier à la demande du chef de l’État, « manque d’indépendance et d’impartialité, et ne répond pas aux standards internationaux en matière de justice ». Elle a notamment soulevé le fait qu’alors que de « sérieuses allégations ont été lancées contre des organes de l’État », la Cour de justice n’a pas de prérogatives pour juger des responsables en exercice, y compris le président de la République et les ministres.

Mme Maalouf a déclaré que seul un « mécanisme d’enquête international », qui évaluerait « les responsabilités de chacun vis-à-vis de l’explosion et les rendrait publiques », serait le moyen de garantir les droits des victimes à « la vérité et la justice ». Et d’appeler à ce que cette enquête soit « complète, indépendante, impartiale et transparente ».

Interrogatoire de quatre « témoins »

Dans le cadre de l’enquête sur la catastrophe du 4 août, le juge d’instruction et procureur général près la Cour de justice, Fadi Sawan, a émis 25 mandats d’arrêt, entre autres contre des employés et responsables du port, son ancien directeur général Hassan Koraytem et le directeur général des douanes, Badri Daher, des représentants des services de sécurité affectés au port ainsi que des ouvriers qui ont effectué des travaux de réparation du hangar 12. C’est lors de ces travaux que se serait déclaré l’incendie. Le juge Sawan a encore interrogé ce lundi quatre témoins et rejeté la demande de libération de trois personnes sous le coup d’un mandat d’arrêt. L’Agence nationale d’information (ANI, officielle), qui rapporte cette décision, ne précise pas qui sont ces trois individus. M. Sawan devrait interroger, dans le courant de la semaine, des ministres, anciens et actuels, impliqués dans cette affaire.

L’affaire Naddaf

Dans le prolongement des arrestations effectuées, celle du commandant Joseph Milad Naddaf soulève de plus en plus de vagues sur les réseaux sociaux et parmi ses proches, indignés de voir l’officier sanctionné pour avoir alerté les autorités. Le commandant Naddaf est l’officier qui a transmis un rapport circonstancié à la Sécurité de l’État sur la dangerosité du nitrate d’aluminium stocké dans le hangar 12, précisant que l’explosion de cette quantité d’une matière qui peut être utilisée à des fins militaires « pourrait détruire Beyrouth ».

À la lecture de ce rapport, le directeur général de la Sécurité de l’État, Tony Saliba, était entré en contact avec Khodr Taleb, le conseiller du Premier ministre Hassane Diab, qui avait décidé de se rendre en personne au port pour évaluer la situation. Toutefois, M. Diab avait changé d’avis à la veille de son déplacement et renoncé à sa visite d’inspection, s’étant fait dire que la matière stockée n’était tout simplement que des engrais chimiques. Le chef de l’État a également pris connaissance de ce rapport. On sait en tout cas que l’ancien Premier ministre a été interrogé la semaine dernière par M. Sawan à ce sujet.

Toujours est-il que la Sécurité de l’État avait alors décidé de transmettre le rapport du commandant Naddaf au Conseil supérieur de défense qui, 14 jours avant la catastrophe, avait décidé des dispositions à prendre pour sécuriser la présence du stock. Trop tard, hélas. Outre le commandant Naddaf, le juge Sawan a ordonné l’arrestation de trois autres officiers : Antoine Salloum (renseignements de l’armée), et Charbel Fawaz et Daoud Fayad (Sûreté générale).

L’organisation Amnesty International, qui milite pour les droits de l’homme, a appelé lundi à une enquête internationale sur les causes des explosions dévastatrices du 4 août dans le port de Beyrouth, estimant que les procédures judiciaires lancées par les autorités libanaises ne sont « ni indépendantes ni impartiales ». « Un mois après l’explosion meurtrière,...

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ou comment marcher sur la tete! J.P

Petmezakis Jacqueline

06 h 33, le 08 septembre 2020

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  • ou comment marcher sur la tete! J.P

    Petmezakis Jacqueline

    06 h 33, le 08 septembre 2020

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