Rechercher
Rechercher

Liban - Décryptage

Spéculations sur un changement dans les relations entre Téhéran et Riyad

Une véritable confusion règne dans les relations régionales et impose au Liban une grande prudence. Telle est la conclusion à laquelle est parvenu un diplomate libanais chevronné, en observant le ballet diplomatique dont Beyrouth est actuellement le théâtre.

Un premier regard sur les deux visites successives de l'émissaire iranien Hussein Jaber Ansari et du ministre d'État saoudien pour les Affaires du Golfe Thamer al-Sabhane donne l'impression d'un épisode banal de la rivalité traditionnelle entre Téhéran et Riyad pour renforcer leurs influences respectives au Liban. D'autant que dans les grandes lignes, la classe politique est depuis des années tiraillée entre les deux pôles régionaux. Ceux-ci seraient donc en train de relancer le fameux clivage entre 8 et 14 Mars.

L'élément nouveau, c'est que cette rivalité, qui a eu des répercussions sur le Liban pendant de longues années et qui s'était un peu calmée depuis deux ou trois ans – à cause d'une sorte de retrait saoudien de la scène libanaise, qui avait poussé la République islamique à plus de discrétion, mettant plutôt en avant son allié libanais le Hezbollah –, a brusquement l'air de connaître un nouveau souffle. Les spéculations vont donc bon train, mais le diplomate précité estime que la situation est un peu plus subtile.

 

(Lire aussi : Offensive de charme irano-saoudienne en direction du Liban)

 

 

Avant l'arrivée des deux émissaires, le chargé d'affaires saoudien au Liban, Walid Boukhari, avait rendu une visite qui est passée inaperçue – alors qu'elle est importante, ne serait-ce que sur le plan du symbole – au vice-président du Conseil supérieur chiite, le cheikh Abdel Amir Kabalan. Selon les informations qui ont filtré sur la teneur de l'entretien, le diplomate saoudien aurait affirmé au cheikh Kabalan la volonté de son pays de renforcer les relations avec la communauté chiite libanaise, tout en ajoutant que le royaume a changé sa position à l'égard du dossier syrien.

Ces informations sont en phase avec ce qui a filtré de la réunion des trois délégations de l'opposition syrienne (celle dite de Riyad, celle dite de l'Égypte et celle dite de Moscou) à Riyad, il y a quelques jours, et le conseil que leur a donné le ministre saoudien Adel al-Jubeir de revoir leur attitude à l'égard du président syrien. Elles sont aussi en phase avec la visite spectaculaire effectuée par le leader chiite irakien Moqtada Sadr à Riyad et avec les déclarations du ministre irakien de l'Intérieur, Kassem al-Aaraji, sur une demande saoudienne de médiation avec l'Iran. Certes, le Premier ministre irakien, Haïder al-Abadi, a démenti cette déclaration, à la demande des Saoudiens, mais le ministre de l'Intérieur n'a pas voulu la retirer. En même temps, en marge d'une rencontre internationale, les ministres saoudien et iranien des Affaires étrangères ont échangé un salut cordial devant les caméras, alors que les pèlerins iraniens ont pu reprendre cette année le chemin de La Mecque pour la fête de l'Adha.

Mis bout à bout, ces éléments peuvent pousser à croire que quelque chose est en train de changer dans les relations entre les deux pays. Cette évolution – si elle se vérifie – serait en premier lieu favorable à la situation en Syrie, et en second lieu au Liban, où elle permettrait de calmer les tensions entre les deux camps rivaux.
Toutefois, le diplomate libanais précité estime qu'il ne faut pas tirer trop vite des conclusions. Selon lui, depuis la désignation de l'émir Mohammad ben Selmane comme héritier du trône de son père, le roi Salmane, l'Arabie saoudite a amorcé des changements dans sa diplomatie. Aujourd'hui, sa grande priorité, c'est la situation interne et le conflit avec le Qatar qui semble s'installer dans la durée. D'ailleurs, le blocus du Qatar semble se retourner contre les pays du Golfe qui l'ont décrété, Doha ayant relevé le défi et bénéficiant désormais d'un large soutien turc et même iranien, au point de ramener son ambassadeur à Téhéran, alors que les États-Unis adoptent une position mitigée. L'ouverture remarquable sur l'Irak s'inscrirait dans ce cadre et elle se concrétise par le renforcement des échanges commerciaux entre les deux pays et par la réouverture de la frontière commune entre eux, fermée depuis des années. Riyad avait, à un moment, pratiquement rompu ses relations avec Bagdad, après avoir retiré son ambassadeur à Bagdad, le même Thamer al-Sabhane devenu depuis ministre d'État pour les Affaires du Golfe.

Par contre, toujours selon le diplomate précité, la tentative d'attirer vers elle le leader chiite Moqtada Sadr aurait un autre objectif. Elle viserait à redonner du poids à ce qu'on appelle la « communauté chiite arabe », en opposition aux chiites d'Iran. Les chiites arabes ont une longue histoire et un centre religieux à Najaf (Irak), mais avec l'influence grandissante de l'Iran sur les chiites, leur rôle s'est affaibli au profit de celui de Qom. La volonté supposée des Saoudiens de leur redonner un rôle ne serait pas seulement destinée à combattre l'influence de l'Iran. Elle aurait aussi pour objectif de calmer la communauté chiite en Arabie saoudite même, et de l'éloigner de l'influence iranienne. La visite de Walid Boukhari au cheikh Kabalan s'inscrirait ainsi dans ce cadre. Mais, selon le diplomate précité, il est encore trop tôt pour évaluer les chances de succès d'un tel projet.

 

 

Lire aussi 

Ansari appelle à « l’unité arabe contre le terrorisme israélien et takfiriste »

La mission d’Ansari vouée à l’échec ?

L’adjoint du ministre iranien des Affaires étrangères chez Hariri

Une véritable confusion règne dans les relations régionales et impose au Liban une grande prudence. Telle est la conclusion à laquelle est parvenu un diplomate libanais chevronné, en observant le ballet diplomatique dont Beyrouth est actuellement le théâtre.
Un premier regard sur les deux visites successives de l'émissaire iranien Hussein Jaber Ansari et du ministre d'État saoudien pour...

commentaires (5)

et si on parlait d'une Syrie coupé en trois à l'est les Sunnites au nord les Kurdes et à l'ouest les Alaouites y compris le Liban (un joli plan Iranien,Assad, hezb) et ce n'est pas une fiction

yves kerlidou

11 h 50, le 27 août 2017

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • et si on parlait d'une Syrie coupé en trois à l'est les Sunnites au nord les Kurdes et à l'ouest les Alaouites y compris le Liban (un joli plan Iranien,Assad, hezb) et ce n'est pas une fiction

    yves kerlidou

    11 h 50, le 27 août 2017

  • Que le bensaouds mettent de l'eau benite dans leur vin halal , je veux bien l'accepter, mais qu'ils essayent de nous faire croire qu'ils iraient jusqu'à " réintégrer " la communauté chiite arabe " dans ses rangs me laissent pantois . LES CHIITES ARABES ( EN FAIT C'EST EUX LES VRAIS) VOUS DISENT PENSEZ AUX PALESTINIENS VOS FRÈRES DE RELIGION ET PENSEZ À LES SORTIR DES GRIFFES DES USURPATEURS DE LEURS TERRES ET DE LEURS LIEUX SAINTS , AVANT DE VENIR NOUS DONNEZ DES KALEODISCOPES . ON EST PAS DES ENFANTS , LES BENSAOUDS . COMPRIS ?

    FRIK-A-FRAK

    10 h 52, le 26 août 2017

  • UNE ANALYSE EN GENERAL LOGIQUE SI UN OU DEUX BARATINS N,Y ETAIENT PAS GLISSES...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 12, le 26 août 2017

  • Un centre religieuxà Najaf,oui, Mais leur référence religieuse, l'autorité spirituelle est établie en Iran une fois pour toute. Officiellement.

    Massabki Alice

    07 h 56, le 26 août 2017

  • faut pas trop rever les saoudiens font ce qu'ils auraient du faire depuis des annees !!! conciderer que le chiite arabe et un ami ... et un membre de la communaute arabe et non perse (s'ils savaient seulement ce que l'iran pensent d'eux ils réfléchiraient a 10 fois avant de leur donner leur soutien)

    Bery tus

    01 h 58, le 26 août 2017

Retour en haut