L'adjoint du ministre iranien des Affaires étrangère aux pays arabes et africains, Hussein Jaber Ansari, est arrivé hier matin à Beyrouth pour une visite officielle de deux jours.
Reçu au salon d'honneur de l'AIB par l'ambassadeur iranien, Mohammad Fathalli, et des responsables de l'ambassade, M. Ansari a entamé sa tournée par une visite à Baabda, avant de se rendre à Aïn el-Tiné, puis au palais Bustros, et en soirée au domicile du député Walid Joumblatt, à Clemenceau.
Son agenda n'inclut pas de rencontre avec le Premier ministre Saad Hariri.
Pour rappel, M. Ansari avait effectué une escale dans la capitale libanaise il y a près d'un mois, après une visite à Damas dont il est un régulier, étant en même temps le chef de la délégation iranienne aux négociations d'Astana.
Sa visite en cours à Beyrouth serait donc à lire sous l'angle de la diplomatie iranienne régionale telle que mise à jour par le « nouveau » gouvernement Rohani, qui a obtenu hier le vote de confiance du Parlement iranien. Un vote dont n'a pas manqué de se féliciter M. Ansari à plus d'une étape de sa tournée. Il précisera, à l'issue de sa rencontre avec le président de la Chambre, Nabih Berry, les « deux principales missions » de la diplomatie iranienne pour l'étape à venir : « La première, fondamentale, consiste à élargir nos relations avec les États à l'échelle régionale, et la seconde à miser sur le renforcement des relations économiques bilatérales avec ces États, mais aussi les autres. » Et de préciser que sa visite au « Liban frère prouve la grande importance que lui accorde l'Iran dans l'exécution de chacune de ces deux missions ».
C'est sur « l'élargissement des relations iraniennes dans la région » qu'il conviendrait surtout de s'attarder, à la lumière de ses incidences sur le Liban.
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Il y aurait d'abord une orientation de Téhéran vers un assainissement de ses rapports avec Riyad, que confirme à L'OLJ le consultant Hassan Fahs. Selon lui, un dialogue bilatéral serait même envisagé. Les récents signaux dans ce sens seraient, d'une part, le « silence iranien absolu » sur la relance des relations irako-saoudiennes et, de l'autre, les fuites médiatiques sur la volonté du prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane de trouver une voie de sortie pour son pays de la guerre du Yémen. L'important, pour le Liban, est que cette ouverture affichée par la diplomatie iranienne à l'égard de l'Arabie s'accompagne d'une fermeture à l'égard de Saad Hariri.
Cet apparent paradoxe s'explique par le fait que « l'ouverture » iranienne, si elle a pour objectif de renflouer Téhéran au niveau international, semble devoir passer par un renflouement du régime syrien. « La visite de M. Ansari à Beyrouth coïncide avec la bataille menée par l'Iran » pour renflouer le régime syrien, notamment par le biais d'une « normalisation des rapports de celui-ci avec Beyrouth », estime le chercheur Makram Rabah.
Cette entreprise est facilitée par le fait que la politique de distanciation officielle reste théorique. Le passage du diplomate iranien hier à Baabda en serait une illustration. Selon le communiqué du palais présidentiel, le chef de l'État « a réaffirmé la constante libanaise de non-ingérence dans les affaires arabes internes et de distanciation des conflits extérieurs », avec une référence particulière à « l'unanimité nationale dont bénéficie l'armée dans sa guerre contre le terrorisme (...) dans les jurds de ses frontières nord-est ». Si son interlocuteur iranien n'a pas manqué de « transmettre au président les félicitations de la République iranienne pour le succès de l'armée », il n'a pas manqué non plus, mais à Aïn el-Tiné, de placer le triptyque armée-peuple-résistance au cœur de ce succès. « Ces victoires, le Liban frère a pu les accomplir au cours des derniers jours grâce à son peuple, son armée et sa résistance », a-t-il asséné.
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Par-delà la rhétorique de distanciation, le seul résultat concret de la visite de M. Ansari à Baabda a été « la promesse du président Aoun de répondre à l'invitation officielle qui lui a été adressée de se rendre en Iran », selon le communiqué présidentiel, non sans valoriser l'importance « de renforcer les relations bilatérales dans tous les domaines ». Cette même expression sera reprise telle quelle par le diplomate iranien à l'issue de son entretien avec son homologue Gebran Bassil. Dans le contexte interne et régional actuel, faut-il préciser que dans la logique de Téhéran, « la fraternité » libano-iranienne est un canal de retour à la « fraternité » libano-syrienne ?
Pour mémoire
Lorsqu'une relation diplomatique devient un boulet, on y met un terme, unilateralement. On peu trever, non ?
11 h 52, le 23 août 2017