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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

La névrose obsessionnelle

Un patient est allongé sur mon divan. Mon téléphone sonne. Le patient dit « pardon ».
Tout pour l'Autre est la devise de l'obsessionnel. On verra cela par la suite.
Commençons par rappeller que les névroses existent toujours, qu'elles sont une décompensation des différentes structures psychiques, malgré la nouvelle clinique mise en place par le DSM IV et le DSM V. Les TOC (OCD) sont les symptômes des névroses obsessionnelles, ils ne sont pas des entités à part comme nous l'apprend la psychiatrie moderne.
On a l'habitude de comparer et d'opposer la structure hystérique à la structure obsessionnelle. Classées par Freud dans la catégorie des névroses de défense, ces deux structures sont les structures de base de la clinique psychanalytique.

Si l'hystérique semble revendiquer tout pour elle, l'obsessionnel, selon la formule de Lacan, dirait : Tout pour l'autre. Tout pour l'autre afin que l'autre reste toujours en vie pour que l'obsessionnel puisse continuellement le détruire. L'obsessionnel agirait comme un banquier scrupuleux et prévenant qui s'enquiert en permanence de la santé d'un client débiteur pour pouvoir continuer à le saigner. C'est le noyau du caractère anal. C'est d'ailleurs dans le contexte de la banque que l'on rencontre le plus les obsessionnels. Compter, mettre en ordre, classer, répertorier sont des activités où l'obsessionnel excelle. Contrôler, tel est le maître mot de l'obsessionnel. Voilà pourquoi on le retrouve au pouvoir, aux postes de contrôle. La bureaucratie est ce qui lui convient le mieux, car tout est maîtrisé et planifié à l'avance. En effet, le souci principal de l'obsessionnel, c'est d'éviter l'imprévu. C'est pour cette raison qu'il résiste à la règle de l'association libre dans l'analyse. Pour cela, chaque chose doit être à sa place, y compris l'obsessionnel lui-même. D'où une régularité exemplaire (il arrive toujours à l'heure à ses séances), de l'ordre, de la méticulosité, de la propreté.

Là où l'hystérique laisse éclater avec excès le moindre de ses sentiments de colère, pour l'oublier immédiatement après, l'obsessionnel se domine et contrôle tout excès, tout sentiment agressif. Mais il rumine. Au caractère coléreux, passionné et théâtral de la femme hystérique, l'homme obsessionnel oppose un caractère contenu, neutre et peu expressif.
Nous avons tous besoin de certains traits de caractère anal pour pouvoir ordonner nos activités. Quant à l'obsessionnel de structure, lui, il les collectionne.
Le symptôme obsessionnel se présente souvent comme une caricature du trait de caractère anal. De la propreté parfois excessive, on passe aux rituels de lavage. L'obsessionnel en arrive à se laver les mains une quarantaine de fois par jour. Et si le savon ne suffit pas, c'est à l'alcool qu'il se nettoie.
Il en est de même de la vérification, qui peut devenir un symptôme invalidant de la vie quotidienne. Un mécanicien me racontait qu'il ne pouvait remettre son travail qu'après avoir vérifié un nombre incalculable de fois qu'il avait bien serré une vis. Il finit par se faire renvoyer par son patron.

Si l'hystérique est « indifférente » à son symptôme, l'obsessionnel en souffre énormément. Freud expliquait cette différence par la réussite du refoulement dans l'hystérie et par son échec partiel dans la névrose obsessionnelle. Alors que, dans l'hystérie, la conversion totale de l'affect dans le corps permet à l'hystérique d'oublier tout à fait ce que le symptôme représente et d'être ainsi indifférente à son symptôme, dans la névrose obsessionnelle il y a comme une progression continue des attitudes défensives, car le refoulé n'arrive pas à tenir en place.
Lorsque la formation réactionnelle ne suffit plus à lutter contre les pulsions sadiques anales par un excès de bonté, de gentillesse, de sollicitude ou de propreté, l'obsessionnel met en place un autre mécanisme de défense. Il tente d'isoler la représentation refoulée en la coupant non seulement de son affect, ce qui explique son aspect désaffecté et neutre, mais aussi de toute connexion associative : c'est l'isolation.

Ce mécanisme, à un faible degré, explique pourquoi l'obsessionnel excelle dans les domaines de la pensée abstraite : le surinvestissement propre aux processus secondaires qui caractérisent le système préconscient-conscient permet à l'obsessionnel de lutter efficacement contre l'irruption de la représentation refoulée. Mais lorsqu'il y a névrose, cela ne réussit qu'un temps, car le sujet est alors obligé de lutter encore plus activement en annulant rétroactivement toute pensée ou geste qui peuvent être le support de la représentation indésirable.
On en arrive aux rites et rituels. La répétition des gestes constitue alors une tentative désespérée d'annuler le geste précédent.

Un patient mettait un temps désespérément long pour traverser le couloir qui menait de la salle d'attente à mon bureau de consultation : chaque pas en avant était annulé par un autre pas en arrière. Il m'arrivait de l'attendre pendant une heure. La signification inconsciente que prenait le pas en avant était une pensée hostile à l'égard du père. Le pas en avant veut dire je peux aller plus loin que mon père, je peux donc le tuer. Le pas en arrière annulait le pas en avant et sa signification inconsciente.
Nous verrons la prochaine fois les mécanismes obsessionnels inconscients.

 

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