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Liban

Le troisième colloque du BLRS axé sur l’implant cochléaire : de l’importance du travail pluridisciplinaire pour le suivi de l’enfant sourd

De gauche à droite, M. Michel Eddé, Mme Leila Solh Hamadé, le Dr Charaf Aboucharaf et Mme Viviane Matar Touma coupant le gâteau traditionnel au moyen d’un sabre, en présence d’enfants sourds dont les parents assistaient au colloque du BLRS. Photo Fabienne Touma

L’encadrement et le suivi impératif de l’enfant sourd – en même temps que ses parents – ainsi que le traitement de son handicap par le biais de l’implant cochléaire et les contraintes que ce remède entraîne à plus d’un niveau ont été au centre du troisième colloque organisé par le Bureau libanais pour la recherche en surdité (BLRS) au siège de l’ordre des médecins de Beyrouth. Le colloque a été placé sous le patronage des anciens ministres Leila Solh Hamadé et Michel Eddé, présidents d’honneur du BLRS, et du président de l’ordre des médecins, le Dr Charaf Abou Charaf.
Durant toute une journée, et en présence de médecins (ORL), d’orthophonistes, de psychologues, d’éducateurs spécialisés, de responsables de centres pour enfants sourds et, surtout, de parents, les participants au colloque ont discuté des conditions propices à l’implantation cochléaire, abordant aussi l’encadrement qui devrait être assuré aussi bien à l’enfant qu’à ses parents afin d’assurer le succès de l’opération, en termes d’efficacité de la technique utilisée pour permettre à l’enfant de recouvrer, autant que faire se peut, l’ouïe. L’implant cochléaire est une opération qui consiste à implanter dans la cochlée du jeune sourd, au niveau de l’oreille interne, un appareil auditif : une partie externe qui capte les sons environnants, les décode, les analyse et les transforme en signaux électriques ; ces signaux vont activer le nerf cochléaire par l’intermédiaire d’une partie interne de l’appareillage. Par ce biais, l’enfant peut entendre et discriminer différents sons.
Un tel remède bouleverse profondément la vie du patient et sa perception du monde extérieur dans la mesure où il passe subitement d’un état où il ne perçoit aucun son à une situation où il capte une grande partie des dialogues et du brouhaha du monde extérieur. Si bien que cette transition nécessite un encadrement et un accompagnement à caractère pluridisciplinaire engageant le médecin spécialiste (qui établit le diagnostic et décide de l’opportunité médicale de l’opération), l’orthophoniste (qui suit l’évolution de l’acquisition de la parole), le psychologue (qui doit accompagner la phase de transition aussi bien au niveau de l’enfant que des parents, avant et après l’opération), l’éducateur spécialisé (qui se planche sur le volet pédagogique).

Une action concertée
Cette approche pluridisciplinaire, qui implique impérativement une action concertée entre ces différents acteurs, a été au centre des travaux du colloque. Elle a été notamment évoquée explicitement par la présidente du BLRS, Viviane Matar Touma, dans son allocution prononcée à l’ouverture du colloque, en présence, notamment, du Dr Charaf Abou Charaf, de Mme Leila Solh Hamadé et de M. Michel Eddé.
« Notre leitmotiv est “main dans la main en vue d’un avenir meilleur”, a notamment déclaré d’emblée Mme Touma. Le slogan main dans la main signifie que nous avons besoin de l’autre, nous avons besoin d’écouter, nous avons besoin du travail d’une équipe pluridisciplinaire, formée de tous les spécialistes dans le domaine de la surdité, en l’occurrence le médecin ORL, le psychologue, l’audiologiste, l’orthophoniste, l’éducateur spécialisé. L’accompagnement de l’autre nécessite de faire preuve de patience, d’être à l’écoute de l’autre, d’avoir de la conscience, d’avoir le sens des responsabilités. » Et Viviane M. Touma de souligner que l’objectif que s’est fixé le BLRS est d’effectuer des recherches et d’adapter les recommandations internationales en matière de surdité au contexte local afin de permettre au jeune sourd d’avoir sa place dans la société.
De son côté, l’ancienne ministre Leila Solh Hamadé, vice-présidente de la Fondation al-Walid ben Talal, a souligné que les épreuves endurées par l’enfant sourd peuvent être comparées aux souffrances subies par une grande fraction du peuple libanais du fait de la négligence manifestée par l’État au plan, notamment, de la santé. « Les enfants (sourds) fondent beaucoup d’espoirs dans l’implantation cochléaire, mais aucune autorité officielle ne les oriente, les encadre ou les prend en charge, a déploré Mme Solh Hamadé. Nos enfants ont des droits que nous devons tous assumer et que tout responsable se doit d’assumer. » Et Mme Solh de conclure sur ce plan : « Nous risquons, nous tous, de faire face aux conséquences de ce qui pourrait advenir à nos enfants du fait de la passivité de l’État et de sa négligence à prendre en charge les besoins et l’avenir des enfants qui ont besoin de soutien. »

Eddé et Aboucharaf
Prenant à son tour la parole, l’ancien ministre Michel Eddé a commencé par rendre hommage à l’action entreprise par le BLRS et sa présidente, Viviane M. Touma, mettant l’accent également sur l’importance des travaux et de la contribution des participants au colloque, qu’ils soient médecins, psychologues, éducateurs ou experts en matière de surdité. « Contribuer à assurer le lien avec le sourd et permettre au sourd d’établir le lien avec nous constitue un message humain par excellence, a notamment déclaré M. Eddé. Ce message humain constitue le fondement des religions et des valeurs qui marquent la fraternité humaine. » Soulignant l’importance de l’implant cochléaire dans la lutte contre la surdité, M. Eddé a relevé avec satisfaction que dans ce domaine, la connaissance et le savoir sont au moins mis à profit pour surmonter un handicap, alors que dans d’autres cas la connaissance est exploitée pour « produire des armes destructrices ».
Abondant dans le même sens, le président de l’ordre des médecins a commencé par souligner que « sans la connaissance et le savoir qui caractérisent le Liban, ce pays aurait fait partie du passé depuis longtemps, d’où notre souci constant de faire du Liban un tremplin de la pensée, de la liberté et de la connaissance ». « L’ordre des médecins, a déclaré le Dr Charaf Aboucharaf, a un rôle avant-gardiste à jouer dans ce domaine en stimulant l’organisation de conférences et de congrès organisés par des associations de la société civile, à l’instar de ce qui est organisé aujourd’hui par le Bureau libanais pour la recherche sur les sourds et par l’association des médecins ORL. »
Mettant l’accent sur l’importance des initiatives prises par la société civile sur ce plan, le Dr Aboucharaf a souligné la nécessité d’une coopération pluridisciplinaire avant et après l’opération de l’implantation cochléaire subie par le jeune sourd afin d’assurer à l’enfant les soins médicaux, l’encadrement psychologique et pédagogique, et le suivi nécessaire. « Cela nécessite de mettre au point une structure d’action claire, de former une équipe pluridisciplinaire et d’établir une stratégie permettant de concentrer ce genre d’opérations (d’implantation cochléaire) dans des centres précis et spécialisés afin d’améliorer les résultats obtenus et de réduire les coûts ainsi que les problèmes qui pourraient résulter de ces opérations », a conclu le président de l’ordre des médecins.

Les débats et les recommandations
L’importance de cette approche pluridisciplinaire a jalonné les débats et les discussions du colloque. En présence de parents d’enfants sourds et de délégués de plusieurs ONG travaillant dans ce domaine, médecins, psychologues et autres spécialistes ont exposé leur expérience respective, exposant leur rôle et leur part de responsabilité dans tout le processus préimplantation et postimplantation.
Ces différentes approches du problème sont évoquées en détail dans les résolutions rendues publiques au terme des débats. Ce document est fondé sur les deux résolutions relatives à l’implant cochléaire adoptées par le Bureau international d’audiophonologie (BIAP, organisme international, basé à Bruxelles) qui supervise et oriente l’action mondiale portant sur les problèmes de surdité. Ces deux résolutions du BIAP ont été traduites en arabe et ont été adaptées, quant à leur teneur et leur portée, aux réalités locales grâce à un travail conjoint effectué, à l’initiative et sous la supervision du BLRS, par l’Institut du Père Roberts (Shaïleh), l’IRAP (Aïn Aaar), l’Institution spécialisée « el-Hadi », l’Institut libanais d’éducateurs de l’Université Saint-Joseph, le département ORL de l’Hôpital américain de Beyrouth et la société Audio Conseil.
Un bel exemple de travail conjoint appelé à se poursuivre et se développer pour faciliter l’entière intégration des jeunes sourds dans la société...
L’encadrement et le suivi impératif de l’enfant sourd – en même temps que ses parents – ainsi que le traitement de son handicap par le biais de l’implant cochléaire et les contraintes que ce remède entraîne à plus d’un niveau ont été au centre du troisième colloque organisé par le Bureau libanais pour la recherche en surdité (BLRS) au siège de l’ordre des médecins de...

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