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Liban - Le commentaire

Quelle démocratie pour quel Liban ?

Il est désormais impératif pour les leaders libanais de s’entendre sur quel pacte et quelle République ils souhaitent pour le Liban afin que cessent ces tergiversations entre la démocratie concurrentielle et les « pratiques consensuelles », qui sont appliquées alternativement à l’heure actuelle de manière sélective et arbitraire, qui plus est selon la volonté de la partie la plus forte. Impératif, pour que le rêve libanais ne reste plus aussi laborieux, aussi pénible, confronté à chaque échéance à des crises aiguës dont il s’avère systématiquement impossible de s’extirper sans une quelconque intervention extérieure...
Le Liban a longtemps pratiqué la démocratie selon ses règles élémentaires : la majorité parlementaire issue d’élections libres et transparentes gouverne, la minorité fait de l’opposition. Cependant, pour certains, il s’est avéré que le règne de la majorité sur la minorité n’assure pas la « participation nationale » réelle, mais impose une sorte de dictature ou de régime présidentiel. La tutelle syrienne a appliqué la démocratie comme elle le voulait, en fabriquant des lois électorales, et, par le biais de ces dernières, des majorités inféodées à Damas. Après la fin de la tutelle, les forces du 8 Mars loyales à Damas n’ont pu remporter les législatives de 2005 et de 2009, ne glanant qu’une minorité de sièges parlementaires. C’est alors que ces forces ont créé l’hérésie de la « démocratie consensuelle », afin d’imposer la participation de la majorité et de la minorité au sein d’un seul et même cabinet au nom du « partenariat national », sous prétexte qu’il faudrait empêcher la majorité d’accaparer le pouvoir de décision. Au nom de cette « participation », le 8 Mars a été jusqu’à réclamer le tiers de blocage, qualifié par ce camp de « tiers de garantie », au sein du cabinet d’« union nationale » de pacotille, afin de bloquer toute décision qui lui déplairait.
Voilà plusieurs années que le Liban est gouverné sans Constitution, sans pacte national, à l’aide d’une
démocratie hétéroclite, voire hybride. Le Liban est gouverné par la volonté du camp le plus puissant, qui applique la démocratie quand cela lui convient, et des arrangements pseudoconsensuels quand il le souhaite. Aussi le Hezbollah impose-t-il ses décisions au camp adverse, faible parce que sans armes, la formule qui lui sied. Il déclare ainsi la guerre à Israël quand cela lui chante, passant outre la Constitution, envoie-t-il des drones au-dessus d’Israël sans en référer à l’État en dépit des répercussions sérieuses que cela pourrait avoir sur le Liban et s’engage dans le conflit syrien sans en référer non plus à quelque autorité étatique que ce soit, en violation notamment de la déclaration de Baabda, à laquelle il avait pourtant adhéré. Peut-être était-il à mille lieues de se douter à l’époque que le régime syrien aurait un jour besoin de ses services pour abattre ses ennemis... Le Hezbollah s’obstine surtout à préserver ses armes, sous le prétexte de la résistance à Israël, afin de « résister » contre l’État et contre ses adversaires politiques au plan interne, sans jamais tenir compte du fait que la résistance devrait en fait bénéficier d’une légitimité nationale. Il n’abandonne pas sa revendication (avec ses alliés) du tiers de blocage à chaque fois qu’il est temps de former un nouveau cabinet, afin de pouvoir rester aux commandes au sein du Conseil des ministres, par le biais de ce droit de veto qui lui permet de refuser tout ce qui ne lui plaît guère... confiant aux armes le soin de paralyser tout ce qu’il est incapable de bloquer « démocratiquement ». Et, surtout, il insiste sur la nécessité de former un cabinet d’union nationale, pour pouvoir continuer à trancher, que ce soit par le biais du tiers de blocage ou du recours à la rue. Avec, cependant, une alternative : le vide institutionnel.
Il convient de sortir de cette situation anormale à travers un accord sur l’adoption de la démocratie concurrentielle, qui dispose que la majorité doit gouverner et la minorité faire de l’opposition ; ou bien de la démocratie
consensuelle, après avoir réussi à cerner quelles sont les questions cruciales qui doivent bénéficier de ce traitement. L’article 65 de la Constitution détermine 14 questions qui nécessitent l’existence d’un consensus, d’une entente ou d’une majorité des deux tiers des membres du gouvernement. Il faudrait l’amender pour inclure d’autres questions nécessitant un consensus, faute de quoi elles resteraient en suspens, ou bien qui seraient adoptées à la majorité des deux tiers ou plus si le consensus s’avère impossible. Il n’est plus permis, en effet, que le camp superpuissant au Liban impose sa volonté, ses conditions et ses décisions au camp le plus faible, allant jusqu’à mettre ce dernier devant la soumission, la discorde sectaire ou le vide assassin.
Les chefs politiques libanais devraient donc s’entendre sur un nouveau pacte spécifiant les questions qui devraient faire l’objet d’un consensus, faute de quoi elles resteraient en suspens, et celles qui devraient être tranchées à la majorité des deux tiers ou plus si ce consensus ne voit pas le jour. C’est le seul moyen de sauver le vivre ensemble, l’unité nationale et la paix civile au Liban. Toutes les questions essentielles, comme la formation des gouvernements, l’élection du président de la République, l’élection de la Chambre, devraient faire l’objet d’un consensus entre les leaders libanais et être intégrées à l’article 65 C, pour ne plus qu’un président soit élu par consensus et un autre à la majorité, par exemple. Mais qu’en serait-il si un tel accord est impossible ? Faudrait-il alors se résigner aux crises interminables et au vide ?
Il est plus que jamais urgent de s’entendre sur la nécessité de s’entendre sur le type de démocratie que nous voulons afin de sortir le Liban de ses tergiversations et de ses crises. Une absence d’accord entre les leaders sur cette question maintiendra le pays du Cèdre exposé et ouvert aux crises à chaque échéance. Et il continuera alors à être difficilement, voire totalement, ingouvernable.

 

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Il est désormais impératif pour les leaders libanais de s’entendre sur quel pacte et quelle République ils souhaitent pour le Liban afin que cessent ces tergiversations entre la démocratie concurrentielle et les « pratiques consensuelles », qui sont appliquées alternativement à l’heure actuelle de manière sélective et arbitraire, qui plus est selon la volonté de la partie la plus...
commentaires (5)

La démocratie ...? le pouvoir du peuple par le peuple...? c'est insensé ...! vous voulez détruire la démocratie du bakchich système..? ou le peuple est tranquille sans pouvoir....!

M.V.

18 h 08, le 20 octobre 2013

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Commentaires (5)

  • La démocratie ...? le pouvoir du peuple par le peuple...? c'est insensé ...! vous voulez détruire la démocratie du bakchich système..? ou le peuple est tranquille sans pouvoir....!

    M.V.

    18 h 08, le 20 octobre 2013

  • CHACUN CHEZ SOI ET TOUS ENSEMBLE ? MÊME PAS ! CE QUI PRÉVAUT ACTUELLEMENT C'EST : CHACUN CHEZ SOI... ET TOUS POUR UN ! DARTAGNAN POUR LUI-MÊME... ET "TOUS" POUR DARTAGNAN !

    SAKR LOUBNAN

    12 h 04, le 19 octobre 2013

  • Ben la démocratie normale pour un Liban normal, en quelque sorte...et surtout en finir avec cette aberrante notion de consensualisme,quel que soit le côté qui s'en prévaut. C'est une forme pernicieuse de dictature, en négatif. Mais encore faudrait il qu'une "majorité" civile nette se dessine, et que le gouvernement issu de cette majorité gouverne pour TOUS les Libanais. Et ce n'est pas pour demain, si on écoute le blabla de nos "hommes" politiques.Les Libanais ont droit à une vie normale...sans tribalisme,et où la religion reste à sa place.Et surtout où les allégeances à l'étranger seraient considérées comme de la haute trahison.Boukra,amma ba3d boukra...nchalla...c'est donc aux Libanais d'agir.Ensemble.

    GEDEON Christian

    10 h 51, le 19 octobre 2013

  • Quand vous passez un accord avec des mafieux il tient tant que ca les arrange

    Jihad Mouracadeh

    07 h 45, le 19 octobre 2013

  • LA DÉ... MOU... CRATIE QUI SÉVIT ACTUELLEMENT EST CELLE DE : KILL MIN IDOU ILOU... ET POUR CERTAINS HYPER DÉMOCRATES... ID IL GHÈR KAMÉN LA ILOU... COMBIEN CELA DURERAIT ? UN DIEU SEUL LE SAIT... CAR ON A À FAIRE À DES DIVINS... DESCENDUS TOUT DROIT DE LA CUISSE DROITE DE LEUR MODERNE (SIC) JUPITER ( DOUBLE SIC ) !

    SAKR LOUBNAN

    02 h 57, le 19 octobre 2013

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