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Culture - Accrochage

« Works » de Jean-Luc Moulène au Beirut Art Center

C’est une grande exposition qui regroupe différentes œuvres (photos, dessins, vidéos ou installation) de l’artiste français Jean-Luc Moulène, rassemblées sous le thème « Works », et qui se déroule au BAC jusqu’au 12 octobre.

c’est le cliché en soi qui compte, non le sujet. (Photo Michel Sayegh)

Si « Works » est la première exposition solo de Moulène au Liban, son expérience au pays a commencé il y a déjà plus d’une décennie. En effet, l’artiste a séjourné au Liban en 1999 et 2002 produisant une série de clichés à Saïda. Des photographies qui portent sur des paysages et des portraits de personnes qu’il a rencontrées durant son séjour dans cette ville, qu’il a imprimées en grand format (2 x 3 m) et accrochées sur les murs de la vieille ville. Elles évoquent les relations complexes entre espaces public et privé. Dans un acte de restitution, l’artiste a, par la suite, offert les tirages aux habitants.

Multidisciplinaire
Dans le cadre de cette exposition qui se poursuit au BAC jusqu’au 12 octobre, l’artiste français présente, non pas une rétrospective de son œuvre, mais un corps de travaux-clés créés à différents moments de son parcours. Ce corps d’œuvres comprend plusieurs médias allant de la photographie aux vidéos, en passant par des dessins à l’encre bic. Une structure métallique pour l’occasion traverse l’espace du BAC. Une expérience que Moulène décrit de « physique » et qui attire, selon lui, généralement les enfants.
Lors d’une discussion à bâtons rompus avec Lamia Joreige le soir du vernissage, l’artiste s’est expliqué : « Tout a déjà été photographié, affirme-t-il. En revisitant les lieux, c’est donc le cliché en soi qui compte, non le sujet. Comment aborder le réel et comment le rejouer, telle est la différence que peut créer l’artiste. » Photographe connu pour ses séries Objets de grève (1999-2000) et Produits de Palestine (2002-2005), l’approche documentaire de la photographie de Moulène a contribué à questionner la fonction de l’image et sa politique, ainsi que les rapports entre le photographe, le sujet et le visiteur.
L’exposition se présente donc en quatre parties. La première regroupe des travaux qui concernent le corps et sa relation aux espaces public et privé. « Tous les centres d’art sont devenus des lieux de travail désaffectés. Il faut donc en recorriger la perspective, twister l’espace, l’incliner de manière à relire les images dans une perspective concrète tout en réservant un espace territorialisé », précise Moulène. La seconde partie incite à réfléchir aux moyens et processus de production en mettant l’accent sur la notion de standard, « je suis un fan de la modernité » affirme-t-il. Dans le standard, c’est l’industriel qui se saisit d’une forme, telle la chaise en plastique qu’on peut retrouver dans toute maison et dans toute région de la planète. Mais le photographe peut parvenir à matérialiser l’absence du corps impliquée par la présence de la chaise seule. Quant à la troisième partie, il s’agit d’objets fabriqués à la main, mis en dialogue avec des photographies que l’artiste considère comme des documents.

Réinventer le regard
Pour Moulène, le rapport figure/fond est toujours d’ordre politique. Ainsi, sur un fond neutre et dans une lumière homogène, hors contexte, des formes instrumentalisées ou naturelles (squelette et rognures d’ongles) sont débarrassées de leur contexte visuel stéréotypé pour inventer un nouveau visuel tout en invitant le visiteur à une double lecture. Jean-Luc Moulène est un artiste. Son œuvre ne peut être classée. Ainsi, il ne se limite pas seulement à la photographie, mais explore toutes les disciplines artistiques pour présenter un visuel différent et nouveau. Tout en présentant des objets de marketing, utilisés et réutilisés, Moulène offre un réapprentissage nouveau de la façon de regarder ou d’observer et incite ce « regardeur » à décortiquer la surface lisse qui lui est proposée. Sous une photo apparemment très commune, le visage, ainsi que le regard de Viviane (sa femme), cache des plis.
Enfin, l’exposition s’achève par une série de dessins et une vidéo qui, à partir de l’étude d’un geste performatif (faire la vaisselle), propose une réflexion sur le quotidien. Plus soucieux d’autoriser que d’être auteur, Jean-Luc Moulène montre les tensions, conflits, affirmations et négations au sein des systèmes économiques et culturels. Ses œuvres proposent pour la plupart des possibilités de futur. « Durant une exposition, on se réinvente un corps, dit-il, mais il arrive un moment où il faudra sortir de cet espace et c’est le moment le plus essentiel de l’exposition, car on se réapproprie ce qu’on a vu et chacun se le réinvente à sa manière. » Et de poursuivre : « J’aime le mot “Works” (titre de cette exposition) car l’art est du travail. Il ne procure pas de peine, mais du plaisir. »

Carte de visite

Né en 1955, Jean-Luc Moulène a étudié l’esthétique et les arts à la Sorbonne (Paris). Il a participé à Documenta X (1997) ainsi qu’aux Biennales de Sao Paulo (2002), de Venise (2003), de Taipei (2004) et à la première Biennale de l’image à Luang Prabang au Laos (2007), de même qu’à celle de Sharjah (2010). Parmi les institutions qui ont consacré des expositions solos à ses œuvres, on compte notamment le Centre contemporain de Genève, le Musée du Louvre à Paris, Dia Beacon à New York ou encore le Musée d’art à Oxford en 2012.
Si « Works » est la première exposition solo de Moulène au Liban, son expérience au pays a commencé il y a déjà plus d’une décennie. En effet, l’artiste a séjourné au Liban en 1999 et 2002 produisant une série de clichés à Saïda. Des photographies qui portent sur des paysages et des portraits de personnes qu’il a rencontrées durant son séjour dans cette ville,...

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