Qu’est-ce que cela veut réellement dire, l’élection en Iran du réformiste Hassan Rohani, surtout en ce moment bien précis ? Jamais la région n’a été autant sur le point de s’enflammer, et surtout par rapport au Liban. Est-ce que le nouveau président iranien, le disciple de Rafsandjani et de Khatami, est capable de réaliser ce que ce dernier n’a pas pu faire ? Est-il capable de booster le courant réformiste, notamment après son triomphe dès le premier tour la semaine dernière ? Question corollaire : pourquoi le guide de la révolution a-t-il permis aux réformistes de retourner au pouvoir alors qu’il le leur avait interdit dans le passé récent – à tel point que certaines figures prépondérantes du printemps iranien sont toujours en résidence surveillée ?... Il faut rappeler que c’est le guide, le waliy al-faqih Ali Khamenei, qui possède les pleins pouvoirs et c’est à lui que revient le final « cut », quel que soit le sujet. Vu sous cet angle, que le président soit superconservateur ou particulièrement réformiste ne change rien à la donne : ses prérogatives sont limitées.
(Portrait : Hassan Rohani, un religieux modéré à la tête de l'Iran)
Selon des sources diplomatiques occidentales, c’est Ali Khamenei qui a souhaité l’arrivée au pouvoir d’un réformiste. Pour cela, il a demandé aux quatre conservateurs en lice pour la présidentielle de ne pas se désister en faveur de l’un des trois autres. Ainsi, ce serait d’une pierre deux coups. Un : cette victoire réformiste intra-muros, c’est-à-dire autorisée, encouragée par le système, pourrait absorber les tensions et les rancœurs internes (les manifestations à Téhéran en faveur des réformes ont toutes été opprimées dans le sang ces dernières années...). Deux : la communauté internationale et le monde arabe ont reçu un message fort, à commencer par les États-Unis, que telle est la nouvelle image de l’Iran, un Iran assoiffé de réformes qui peut désormais espérer une réduction des sanctions internationales qui n’en finissent plus de l’étouffer.
(Eclairage : Rohani à la tête de l'Iran : un changement de méthode, plutôt que sur le fond)
Dans tous les cas, Hassan Rohani a anticipé les choses : il veut ouvrir une nouvelle page avec l’Arabie saoudite en se basant sur une phrase célèbre de Rafsandjani : « Quel homme sage envisagerait de s’opposer à la fois à l’Occident, au monde et à l’Arabie saoudite ? » Cette nouvelle orientation, si elle se confirmait, serait éminemment bienvenue pour endiguer les tensions croissantes sunnito-chiites dans la région, surtout après l’implication du Hezbollah dans la bataille de Qousseir, et de propulser l’Iran à la table des négociations, notamment celle de Genève 2...
Au Liban, les réactions après l’élection de Rohani sont mitigées. Dans les milieux pro-iraniens, on a ainsi été extrêmement surpris par la réaction de Riyad, qui s’est empressé de féliciter le nouveau président iranien. Lequel a réagi très positivement, à tel point que malgré tout ce qui se passe dans le pays, surtout à Saïda hier, d’aucuns ont commencé à ressentir des brises très encourageantes.
Du côté de l’alliance du 14 Mars, on s’attend à ce que le mot d’ordre de Téhéran à ses alliés libanais soit de diminuer grandement les pressions sur la scène locale, de réduire leurs conditions rédhibitoires et de faciliter la formation du cabinet Salam.
Affaire à suivre.
Pour mémoire
Rohani se dit contre les ingérences étrangères en Syrie
L’illusion du changement, le point de Christian Merville
commentaires (1)
Après l'article sur les déceptions bensaoudiques sur la politique yanky les amenant à douter d'une voctoire des mercenaires, voilà qu'on nous sert un rapprochament bensaoudo/iranien nvelle puiss régionale, résultat , le Liban traverse des crises aigues du genre, this is the one, à des paix relatives découlant d'un apaisement venu d'ailleurs, j'ai ma petite idée mais je ne la dirai pas , de peur de me répéter.
Jaber Kamel
12 h 44, le 20 juin 2013