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Économie - Éclairage

Le futur fonds souverain saoudien pourra-t-il remplir ses objectifs ?

Estimé à plus de 2 000 milliards de dollars, ce fonds doit dégager suffisamment de revenus à l'étranger pour soutenir l'économie locale. Une double mission difficile à assurer, selon des analystes.

Le FIP doit notamment revitaliser l’économie saoudienne. Faisal al-Nasser/Reuters

C'est la pierre angulaire des réformes économiques radicales annoncées le 25 avril dernier par le vice-prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane, pour affranchir le royaume de sa dépendance au pétrole : faire du Fonds d'investissement public (FIP), fondé en 1971 et peu connu jusqu'à aujourd'hui, le « plus gros fonds (souverain) du monde ». M. Salmane prévoit ainsi de faire passer la valeur du FIP de 600 milliards de riyals (160 milliards de dollars) à plus de 7 000 milliards de riyals (2 000 milliards de dollars).
Selon ce plan, l'Arabie saoudite vivrait en partie des retours engendrés par les investissements à l'étranger du FIP, ce qui compenserait les pertes de revenus liées à la chute des cours du brut. Mais le FIP doit également servir un second objectif : revitaliser l'économie saoudienne et créer des emplois en développant de nouvelles industries et en réactivant des projets de développement de plusieurs milliards de dollars.

Philosophies différentes
Pour Sven Behrendt, directeur du cabinet de consultant allemand GeoEconomica, le rôle du FIP à l'étranger – où il devrait prendre des risques dans le but de maximiser les retours sur investissement –, contrasterait avec son rôle en tant qu'investisseur stratégique au niveau domestique, où la rentabilité serait secondaire dans la mesure où certains projets ne pourront échouer pour des raisons politiques. « Il n'y a que très peu de fonds dans le monde qui ont ce double mandat. Les deux approches nécessitent des philosophies d'investissement différentes, des ressources différentes, des compétences de gestion différentes et des critères d'évaluation différents... C'est difficile à concilier », a-t-il estimé.
Pour développer le FIP, le gouvernement lui a transféré des actifs et terrains de plusieurs entreprises, incluant la propriété du géant pétrolier Saudi Aramco. Mais cela fait simplement du FIP la plus grande holding du monde et non un fonds capable de transformer de gros capitaux en nouveaux investissements. En outre, les 579 milliards de dollars d'actifs étrangers net détenus par la Banque centrale d'Arabie saoudite ne seront pas transférés au FIP, selon des banquiers et consultants proches du dossier. Le FIP n'a pas répondu aux demandes de commentaires de Reuters.
Pour lever des fonds, Riyad prévoit donc de vendre des parts des entreprises du FIP au cours des prochaines années. Les ventes incluront jusqu'à 5 % d'Aramco, ce qui pourrait rapporter au royaume 100 milliards de dollars, selon Mohammad ben Salmane, qui estime la valeur totale de l'entreprise à 2 000 milliards de dollars. Mais plusieurs banques et consultants sont sceptiques sur ce chiffre, expliquant qu'il dépendra de plusieurs facteurs dont la politique de distribution des dividendes ou de transparence vis-à-vis des investisseurs d'Aramco. Selon le cabinet de consultants basée à Washington Foreign Reports, Aramco pourrait avoir, en tout, une valeur comprise entre 250 et 460 milliards de dollars, en excluant la valeur des actifs de raffinage et l'accès garanti au pétrole.
Si cette fourchette d'évaluation s'avère exacte, elle limiterait de fait la contribution du FIP aux finances publiques saoudiennes. Par exemple, le fonds souverain norvégien – aujourd'hui le plus important du monde avec 852 milliards de dollars –, a connu un retour sur investissement moyen de 5,6 % entre 1998 et 2015, avant coûts et inflation. Sur les 100 milliards de dollars de parts liés à la vente d'Aramco, un tel taux rapporterait environ 5 milliards de dollars par an, soit bien peu au regard d'un déficit public de près de 100 milliards de dollars...
Pour Shanker Singham, directeur du cabinet de consultants britannique Competere, le FIP pourrait imiter avec succès le fonds singapourien Temasek, qui en plus d'investir à l'étranger a joué un rôle stratégique dans l'économie en gérant des actifs étatiques. « Le fonds a pu obtenir des retours substantiels en investissant dans des projets précoces, avant les investisseurs commerciaux (et) utiliser ses liquidités pour rendre rentables des projets qui ne l'étaient pas », explique-t-il.
«L'OLJ » avec Andrew Torchia/Reuters

C'est la pierre angulaire des réformes économiques radicales annoncées le 25 avril dernier par le vice-prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane, pour affranchir le royaume de sa dépendance au pétrole : faire du Fonds d'investissement public (FIP), fondé en 1971 et peu connu jusqu'à aujourd'hui, le « plus gros fonds (souverain) du monde ». M. Salmane prévoit ainsi de faire...

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