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À La Une - Religion

En 4L dans 23 pays d'Orient, il collecte la mémoire des chrétiens

Vincent Gélot a écouté les témoignages des réfugiés au Liban avant de tenter l'aventure, au moment du voyage de Benoît XVI en 2012.

Vincent Gélot a parcouru soixante-mille kilomètres en deux ans et visité des communautés dans 23 pays d’Orient. ANDREAS SOLARO/AFP

Soixante-mille kilomètres en deux ans dans une vieille 4L Renault, des communautés visitées dans 23 pays, et un livre de cuir avec des témoignages en trente langues qui se clôt sur un message du pape : Vincent Gélot est fier d'avoir témoigné de la diversité méconnue des Eglises d'Orient.

Sur la place Saint-Pierre, ce Français très brun de 26 ans, originaire de Vendée, arbore devant sa 4L bariolée de dessins et d'inscriptions en arabe et en diverses langues, un grand livre (format 70/30 cm) de 300 pages qu'il a réussi la veille à montrer au pape.

 

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Sur la dernière page, le pape François a écrit de sa minuscule écriture en italien : "je remercie beaucoup pour ce témoignage de l'Eglise d'Orient, une Eglise qui a donné tant de saints et qui aujourd'hui souffre. Je prie pour vous tous, je suis proche de vous".

Master de droit humanitaire en poche, catholique peu versé dans les affaires de l'Eglise, Vincent Gélot a écouté les témoignages des réfugiés au Liban avant de tenter l'aventure, au moment du voyage de Benoît XVI dans ce pays en 2012. Il a baptisé son projet "mille et une fois", "dans un clin d'oeil aux mille et une nuits".
"Bercé par les récits de voyageurs du XIXe siècle, j'ai eu l'appel de l'Orient et j'ai voulu faire un voyage à l'état brut, sans artifice", explique-t-il.

Des soeurs bénédictines en France lui ont fabriqué ce vaste album plein cuir. Il n'imaginait pas en partant - seulement dix mois croyait-il - qu'il le remplirait à ras-bord de témoignages.
Des réalités très différentes se sont présentées: d'anciennes communautés, parfois très isolées, "vivant comme les chrétiens des catacombes", des descendants de déportés de l'URSS et des chrétiens d'Asie, notamment syro-malabars, immigrés dans le Golfe, et des réfugiés, notamment syriens...

 

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Livre caché dans le fond de la voiture
Sa petite 4L beige cabossée l'a conduit du sud-Caucase et du Kazakhstan aux portes de la Sibérie, jusqu'en Iran. Du Soudan et de l'Ethiopie aux pays du Moyen Orient (à l'exception de la Syrie, en raison de la guerre) et à ceux du Golfe pour finir à Jérusalem, apogée du voyage.

A l'entrée de certains pays comme l'Afghanistan, "mon livre était caché au fond de ma 4L", raconte-t-il. Au Yémen, il a craint que son livre ne soit confisqué et il a été expulsé. Le nonce sur place lui enverra ensuite sa contribution sur la minuscule Eglise autochtone pour combler les pages vides.
Page après page de son "livre d'Orient", il désigne les dessins, abstraits ou naïfs, les images pieuses et les prières et témoignages exprimant des espérances et appels à la solidarité de ces communautés souvent antiques, venant de lieux comme Karakosh et Mossoul, aujourd'hui aux mains des jihadistes.

A chaque fois les groupes rencontrés sont photographiés, portant le grand livre de cuir où ils viennent d'écrire. "Les gens ont écrit dans leur langue, on compte une trentaine de langues et dialectes", de l'araméen à l'hébreu.


'Livre relais'
Au départ "je n'étais pas sûrement la bonne personne, ça m'est tombé dessus! Au fur et à mesure, ce livre m'a complètement dépassé. Il a été le relais entre des communautés qui vivent parfois chacune dans leur bulle. Ce livre m'a emmené dans des périphéries que je n'aurais jamais imaginées", raconte Vincent.
Il fallait parfois du temps pour trouver les petites communautés isolées: "en arrivant, j'étais hébergé par des musulmans. J'intriguais. Je n'ai pas eu peur".

 

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Une relation basée sur la simplicité et la confiance: "Au Kazakhstan, des soeurs m'ont confié un paquet pour une soeur à Bethléem. Je lui remis après un an et trois mois de voyage!"
Trois musulmans ont contribué à ce livre, assurant qu'ils ne veulent pas le départ des chrétiens d'Orient: une femme chiite du Liban, un musulman d'Oman, un chef bédouin dans le Sinaï.

"Je n'ai été que le messager, le transporteur. Ce livre est celui des chrétiens d'Orient, ce n'est pas le mien. Il m'a dépassé. Il va être conservé par les franciscains au Saint-Sépulcre à Jérusalem".
En rentrant en France, Vincent Gélot espère diffuser et publier son témoignage: "le témoignage n'est pas une option mais une mission. Ces gens-là ont pris des risques en me montrant certaines choses. C'est un devoir de témoigner".

 

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