Le marathon final des négociations sur le nucléaire iranien a commencé mercredi à Vienne, chaque partie affirmant ses positions avant d'entrer dans deux semaines au moins de discussions, qui pourraient déboucher sur un accord "historique".
"Nous avons une occasion unique d'entrer dans l'histoire", a affirmé le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, dans un message posté sur YouTube.
M. Zarif a retrouvé mercredi après-midi Catherine Ashton, la représentante diplomatique de l'Union européenne, qui mène la discussion au nom du 5+1 (Allemagne, Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni et Russie), ainsi que l'Américain Bill Burns, n°2 du Département d’État.
Après des mois de dialogue intense, il reste une quinzaine de jours aux deux parties pour trouver un accord garantissant que Téhéran n'aura pas l'arme atomique, en échange d'une levée des sanctions internationales contre son économie.
La République islamique "n'a rien à cacher" de son programme atomique "mais nous ne braderons pas nos avancées technologiques", a averti M. Zarif dans une tribune au Monde.
Dans le quotidien français, M. Zarif refait l'historique de ce dossier qui empoisonne depuis dix ans les relations internationales. Il rappelle en détail les efforts consentis par l'Iran pour faire la transparence sur ses activités et plaide à nouveau que son pays, pour des raisons "morales", "religieuses" et "stratégiques", ne veut pas la bombe.
Il tente enfin de démontrer que les sanctions infligées à l'Iran n'ont pas empêché la poursuite d'un programme nucléaire civil et met les grandes puissances en garde contre "l'illusion" que l'Iran pourrait renoncer à celui-ci.
Les limites du débat sont ainsi fermement rappelées, avant même que les négociateurs de l'Iran et du 5+1 n'entament, jeudi matin, la première séance plénière de leur marathon final.
Les grandes puissances ont répliqué aux exigences iraniennes en désignant le calendrier.
L'accord de novembre 2013, qui a relancé la discussion nucléaire, prévoit que celle-ci s'achève au 20 juillet. Il réserve aussi la possibilité, d'un commun accord, d'une prolongation du dialogue pour six mois.
"Le temps est compté"
Mais "le temps est compté", a souligné mardi le secrétaire d’État américain, John Kerry, et "les États-Unis et leurs partenaires n'accepteront aucune prolongation si c'est pour faire traîner les négociations en longueur".
Le rendez-vous de Vienne offre "un choix aux dirigeants de l'Iran", a-t-il insisté dans le Washington Post: "ils peuvent accepter les mesures nécessaires" pour rassurer le monde sur leurs intentions ou bien "ils peuvent gâcher une chance historique de mettre fin à l'isolement économique et diplomatique de l'Iran et d'améliorer la vie de leur population".
La capacité d'enrichissement d'uranium que conserverait l'Iran après un accord est un des principaux points de divergence.
Le ministre français, Laurent Fabius, jugerait acceptable que Téhéran conserve "quelques centaines" de centrifugeuses, les machines qui réalisent l'enrichissement. L'Iran en possède environ 20.000 aujourd'hui, dont la moitié sont opérationnelles, selon le décompte de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), l'organe spécialisé de l'ONU.
L'Iran a confirmé, de son côté, être prêt à modifier les plans de son réacteur à eau lourde en construction à Arak, près de Téhéran, en vue de garantir qu'il ne pourra pas produire de plutonium - l'autre combustible possible d'une bombe nucléaire, au côté de l'uranium hautement enrichi.
Téhéran refuse en revanche de mettre sur la table son programme de missiles - les vecteurs possibles d'une bombe - en arguant que cette capacité balistique est une question de défense nationale, et non de politique nucléaire.
"Côté iranien, il y a une tendance à placer la barre très très haut pour fatiguer l'adversaire", a estimé François Nicoullaud, un ancien ambassadeur de France à Téhéran, lors d'une table ronde mardi : "Mais le point qui va coincer, c'est bien sûr la capacité d'enrichissement accordée à l'Iran".
Après d'autres, le ministre britannique, William Hague, a souligné mercredi que les grandes puissances ne voulaient pas "accepter un accord à tout prix".
Face à l'intransigeance apparente des deux parties, M. Nicoullaud, un analyste expérimenté, souligne qu'un accord, "même imparfait, peut enclencher de nouvelles dynamiques" et "créer de la confiance, de la détente, de l'apaisement."
Pour mémoire
Iran : Urgence et blocage dans la négociation nucléaire
L'Iran lie une coopération avec les USA à un accord sur le nucléaire
Les négociateurs du dossier nucléaire iranien jouent contre la montre
commentaires (3)
Bien sûr, mais pour aussitôt en sortir.... "vitrifiés" comme dirait le pauvre Chirac !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
11 h 13, le 04 juillet 2014