Quel est le bilan des démarches intensives entreprises au cours des derniers jours à Paris au sujet de l'échéance présidentielle ? Peu d'informations précises ont filtré au sujet du résultat de la série de réunions interlibanaises, d'une part, et entre le chef de la diplomatie saoudienne, l'émir Saoud el-Fayçal, et plusieurs leaders qui avaient fait le déplacement en France à cette fin, d'autre part. L'émir Saoud el-Fayçal, convient-il de noter sur ce plan, a récemment pris en main le dossier libanais à la place de l'émir Bandar ben Sultan. C'est à sa demande qu'il a eu des entrevues avec l'ancien Premier ministre Fouad Siniora, le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, et le leader du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt. M. Geagea, de son côté, a tenu une réunion marathon, entrecoupée d'un déjeuner de travail, dimanche, avec M. Hariri, en présence de M. Siniora.
Des sources qui suivent de près le dossier de la présidentielle indiquent qu'il ressort de ces réunions tenues par le chef de la diplomatie saoudienne que l'Arabie saoudite n'appuie ou ne rejette aucun candidat, ce qui infirme les indications rapportées par les sources aounistes qui ont fait état ces derniers jours d'un soutien du royaume wahhabite à la candidature de Michel Aoun. Quant à Samir Geagea, les milieux bien informés indiquent qu'il est disposé à faciliter une issue au blocage actuel tout en se réservant le droit d'opposer son véto contre tout candidat qu'il jugerait dangereux pour le projet d'édification d'un État fort.
La position de l'Arabie saoudite peu favorable à la candidature de Michel Aoun s'inscrirait en réalité dans le cadre d'une position plus globale qu'auraient adopté les grandes puissances internationales et régionales (en l'occurrence l'Arabie saoudite) et qui consiste à écarter de la course à la première magistrature les grands pôles maronites au bénéfice de personnalités « modérées » qui pourraient être agréées par les deux camps antagonistes du 14 et du 8 Mars.
Ce dernier point a été au centre de la réunion marathon de Saad Hariri avec MM. Geagea et Siniora. Le leader des FL a profité de l'occasion pour dénier à Michel Aoun la qualité de candidat « d'entente ». M. Geagea a toutefois souligné qu'il appuyait le dialogue engagé entre le courant du Futur et le Courant patriotique libre. M. Hariri, de son côté, a réitéré sa position selon laquelle le courant du Futur appuiera tout candidat sur lequel s'entendraient les pôles chrétiens, ce qui signifie dans la pratique qu'il pose comme condition à un éventuel – et hypothétique – appui à Michel Aoun que celui-ci obtienne au préalable le soutien des factions chrétiennes du 14 Mars, partant du principe que l'élection présidentielle est une échéance qui concerne en toute priorité les chrétiens. Le leader des FL a toutefois écarté totalement une telle éventualité en soulignant clairement, au cours de la conférence de presse qu'il a tenue à Paris à l'issue de ses entretiens avec M. Hariri, que le chef du Courant patriotique libre ne saurait être qualifié de « candidat d'entente ». « On ne devient pas un candidat d'entente entre une tasse de café et un verre d'arak, après avoir adopté pendant neuf ans une ligne de conduite aux antipodes des impératifs de l'entente », a notamment souligné M. Geagea au cours de sa conférence de presse.
Il reste que des députés aounistes affirment sans détours que le Hezbollah et le CPL n'assureront le quorum au cours des séances parlementaires consacrées à l'élection présidentielle que dans le seul cas où une entente se dégage autour de la candidature de Michel Aoun. Une telle position obstructionniste – fondée sur le principe « Michel Aoun ou personne » – est ainsi à la base du blocage qui se profile à l'horizon du fait que les décideurs internationaux et régionaux semblent pencher réellement pour un candidat dit « consensuel » qui soit choisi en dehors des rangs du 14 et du 8 Mars.
Sur ce plan, les milieux bien informés indiquent qu'en définitive, les tractations entreprises loin des feux de la rampe pourraient aboutir à une liste restreinte de candidats, dont se dégagerait au dernier quart d'heure le successeur du président Michel Sleiman. Cette liste pourrait comprendre au moins un candidat dont le nom n'est pas encore avancé publiquement dans les médias.
Compte tenu de la complexité de la situation, les milieux politiques estiment qu'en définitive, l'élection du nouveau président pourrait avoir lieu dans les toutes prochaines semaines. D'autres sources affirment, par contre, que le déblocage n'aurait lieu en réalité qu'en septembre prochain. Le temps, sans doute, que se décante quelque peu la conjoncture régionale, notamment pour ce qui a trait à la guerre civile syrienne.
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commentaires (17)
OU PER.... SONNE ! QUOI ET QUI LE SONNE ?
LA LIBRE EXPRESSION
15 h 57, le 23 mai 2014