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La preuve par huit ?

Au loto des paris sur la formation prochaine d'un nouveau gouvernement, c'est le huit qui, ces derniers jours, sort avec insistance. Huit, re-huit et encore huit : embryon de formule magique pour un cabinet de 24 ministères que se partageraient, à stricte égalité, 8 Mars, 14 Mars et le Centre.


L'idée paraît surtout bonne en ceci qu'elle préfigure la fin de la crise, longue déjà de neuf mois, ouverte par la démission du gouvernement Mikati. À l'heure où le pays est la proie d'une vague d'attentats terroristes à la bombe, il lui faut d'autres gestionnaires en effet que des ministres fantomatiques, irresponsables, et qui ne font même plus mine d'expédier les affaires courantes. Mais le projet du triple huit, longtemps rejeté par un Hezbollah acceptant soudain de modérer ses appétits, représente aussi une retentissante victoire morale pour le chef de l'État qui, en parfaite harmonie avec le Premier ministre désigné, avait menacé de se rabattre, en désespoir de cause, sur un gouvernement de non-partisans. Hier même au demeurant, le président Sleiman remettait la pression en avertissant qu'il n'attendrait pas au-delà de la date butoir du 20 janvier qu'aient été satisfaites les conditions et contre-conditions posées par les principaux protagonistes.


Nombreuses et complexes sont, de fait, celles-ci. De quelle neutralité ce dernier pourra-t-il se prévaloir ainsi, face aux événements de Syrie, alors que siège en son sein une milice impliquée jusqu'au cou dans ce conflit ? Au vu d'un engagement militaire aussi massif, comment le slogan armée, peuple, résistance que s'obstine à brandir le Hezbollah peut-il encore faire illusion, maintenant que l'institution militaire a entrepris de riposter aux agressions contre le territoire libanais que multiplie l'armée de Bachar el-Assad ? Ce ne sont là que deux des écueils auxquels va se heurter la future équipe dans la définition de son programme d'action.


Action est précisément un mot qui, ces dernières années, avait pratiquement disparu du vocabulaire politique. Imposée à la faveur du coup de force opéré en 2007 par la milice, cette véritable hérésie constitutionnelle qu'est le tiers de blocage a condamné l'exécutif à la paralysie, ou bien alors aux dérives les plus insensées. Les trois huit annoncent-ils la fin de cette lamentable innovation ? Tel qu'il est découpé en trois parts égales, le gâteau gouvernemental dégage a priori d'agréables arômes de jeu démocratique, passablement oubliés des Libanais. Le procédé fait évidemment du Centre le maître de la situation lors de tout vote en Conseil des ministres, encore que du fait même de sa composition, ce bloc devra sans doute moduler, au coup par coup, ses ralliements à l'un ou l'autre des deux camps antagonistes.


Il est clair, dès lors, que c'est sur cette zone médiane que vont se concentrer toutes les manœuvres d'infiltration, de pression, voire d'intimidation des prochains jours. C'est bien en visant le milieu de la cible que l'on obtient le plus de points.


Issa GORAIEB

igor@lorient-lejour.com.lb

Au loto des paris sur la formation prochaine d'un nouveau gouvernement, c'est le huit qui, ces derniers jours, sort avec insistance. Huit, re-huit et encore huit : embryon de formule magique pour un cabinet de 24 ministères que se partageraient, à stricte égalité, 8 Mars, 14 Mars et le Centre.
L'idée paraît surtout bonne en ceci qu'elle préfigure la fin de la crise, longue...