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Moyen Orient et Monde - David MILIBAND

Un plan à long terme pour les réfugiés syriens

Après avoir passé seulement trois jours avec les réfugiés et les travailleurs humanitaires au Liban et en Turquie, la nature apocalyptique de la crise en Syrie n'est que trop évidente : plus de 100 000 morts, 9 millions de personnes déplacées, 2 millions d'enfants non scolarisés, la réapparition de maladies comme la polio et les pays voisins qui luttent pour faire face à des vagues de réfugiés.
D'innombrables récits déchirants de maris, d'épouses, de frères et sœurs et d'enfants perdus, sans parler des maisons et des moyens de subsistance détruits, prouvent encore à quel point troublant la guerre civile en Syrie est devenue un conflit régional (comme l'indique l'attentat contre l'ambassade d'Iran à Beyrouth). Les rebelles anti-Assad se battent maintenant entre eux, pendant que les jihadistes profitent du conflit. Les experts ne parlent plus des derniers mois du conflit. Ils parlent en termes d'années, sinon de décennies.
Malgré les efforts héroïques des organismes d'aide comme le Comité international de secours (IRC) pour sauver des vies et pour apporter de l'espoir à la région, la terrible vérité est qu'il est impossible de protéger les civils, en particulier des tireurs d'élite et des missiles errants, sans parler de la faim et des sans-abri. Les factions belligérantes ne reconnaissent même pas la notion de non-combattants non affiliés et bafouent les normes internationales de la guerre. En plus de l'utilisation d'armes chimiques, les Nations unies estiment que 2,5 millions de civils manquent de nourriture, d'eau et de médicaments, parce que certains villages et villes sont trop difficiles à atteindre. On estime à 250 000 le nombre de personnes coupées de toute aide extérieure.
Les voisins de la Syrie ont été submergés d'appels à l'aide. Le Liban cherche à accueillir près d'un million de réfugiés. En Turquie environ 200 000 réfugiés sont dans des camps officiels, mais au moins deux fois ce nombre luttent seuls dans les villes. L'aide internationale est sporadique : seulement 60 % des promesses d'aide sont arrivées et seulement une fraction est effectivement allouée aux bénéficiaires visés. Bien que certains organismes aient pu obtenir de l'aide à travers les frontières nationales, ils ne peuvent pas passer à travers les lignes de front du conflit pour atteindre ceux qui sont pris dans le feu croisé.
Les efforts diplomatiques internationaux doivent donc se concentrer sur la réalisation de cessez-le feu temporaires pour apporter l'aide nécessaire de toute urgence, comme des vaccins contre la polio pour les enfants. L'aide ne doit pas être une simple mise en scène au service des pourparlers de paix sans fin qui se déroulent à Genève. La coordinatrice des secours d'urgence des Nations unies Valérie Amos a insisté sur ce point : l'aide doit être au centre de ces négociations. Mais comme l'on s'attend à ce que le conflit et son impact durent plusieurs années, les agences doivent aussi s'organiser à plus long terme. Cela comprend le renforcement des capacités dans les pays voisins, comme la Banque mondiale est en train de le faire en Jordanie et au Liban, pour fournir des services aux réfugiés.
Cela peut se faire de manière créative. L'IRC par exemple est impliqué dans trois domaines :
– Une éducation innovante : les systèmes scolaires traditionnels des pays voisins ne peuvent pas faire face à l'afflux de réfugiés et avec plus de 80 % des réfugiés vivant dans les zones urbaines plutôt que dans les camps, il est inutile de mettre l'accent sur les modèles de l'enseignement dans des camps. Au lieu de cela un système plus informel, soutenu par des réseaux d'enseignants locaux et de réfugiés (un modèle pionnier par son succès au Congo et en Afghanistan) peut fournir un apprentissage reconnu.
– Exploitation de la technologie : les Syriens savent pour la plupart lire et écrire et ont des connaissances technologiques approfondies. Une plate-forme de réseau social innovante du nom de Tawasul (« Connexion »), établie par l'IRC et par l'ONG de presse Internews a été mise en place pour aider les réfugiés à s'aider les uns les autres par l'échange d'informations et de conseils.
– Activité commerciale : les réfugiés syriens sont habitués à travailler dans une économie de marché, il faut donc encourager les programmes qui leur permettent d'échanger et d'améliorer leur situation. L'IRC investit dans des programmes « argent contre travail » qui aideront les réfugiés et leurs hôtes à créer des entreprises.
Si nous voulons atténuer les horreurs du conflit syrien et de ses conséquences, nous devons penser non seulement à des mesures d'urgence pour sauver des vies, mais aussi répondre aux besoins à long terme pour que ces personnes puissent vivre dignement. Apporter une aide médicale dans les zones de conflit, mettre en place l'eau et les installations sanitaires et protéger les victimes pendant les hivers rigoureux sont des mesures essentielles pour sauver des vies, mais nous devons aussi réfléchir à la façon de préserver l'éducation et les moyens de subsistance de ceux qui survivent.
© Project Syndicate, 2013.

Après avoir passé seulement trois jours avec les réfugiés et les travailleurs humanitaires au Liban et en Turquie, la nature apocalyptique de la crise en Syrie n'est que trop évidente : plus de 100 000 morts, 9 millions de personnes déplacées, 2 millions d'enfants non scolarisés, la réapparition de maladies comme la polio et les pays voisins qui luttent pour faire face à des vagues de...

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