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À La Une - Liban

Génocide arménien : Cent ans, ou presque, de douleur...

« Il est temps que la Turquie nous rende nos églises et nos Wakfs », a lancé le catholicos Aram Ier.

C’est à la place des Martyrs que les représentants des courants et partis arméniens se sont rassemblés, comme chaque année, fidèles à la flamme du souvenir. Photo Dalati et Nohra

Le peuple arménien a commémoré hier le 98e anniversaire du génocide de 1915 lors d’une messe à la cathédrale des arméniens-orthodoxes à Antélias, en présence d’une foule venue prier pour le repos de l’âme de près d’un million et demi d’Arméniens massacrés par les Ottomans. Dans son homélie, le catholicos Aram Ier a appelé à « rester fidèles au legs des martyrs » en luttant notamment pour « la récupération des églises et des propriétés foncières et Wakf du catholicossat, usurpées par les Ottomans et transformées en mosquées appartenant à l’État turc ». « Est-il possible de se taire devant ces inestimables pertes matérielles et humaines ? » a-t-il demandé, qualifiant le génocide arménien de « crime contre l’humanité, dont les auteurs doivent être sanctionnés et doivent payer les compensations nécessaires ».
Rappelons que le catholicossat a tenu l’année dernière un séminaire international ayant regroupé d’éminents juristes internationaux afin d’examiner les voies possibles d’un recours devant les tribunaux internationaux, dont l’objet serait précisément la réappropriation des terrains confisqués appartenant à l’Église arménienne en Turquie. « Il est temps que la Turquie nous rende nos églises et nos Wakfs qu’elle a violés », a-t-il affirmé, précisant que la réappropriation de ces biens « constitue la première étape de notre lutte nationale ».

Les revendications
C’est dans ce cadre que l’Église arménienne-orthodoxe a publié un communiqué rappelant ses revendications, exposées hier par le catholicos Aram Ier : « La reconnaissance par l’État turc actuel du massacre des Arméniens ; l’indemnisation totale des pertes du peuple arménien : les pertes humaines et les droits de propriété usurpés ; la remise immédiate, avec l’aide de la communauté internationale, de tous les biens des Arméniens. »
« En tant que chef spirituel de l’Église arménienne-orthodoxe de Cilicie, il est de mon devoir sacré d’exploiter tous les moyens légaux et politiques pour aboutir à ces fins », a-t-il ajouté, rappelant que « le catholicossat avait été contraint d’abandonner son siège historique et de s’établir à Etchmiadzine et à Antélias ».

« La Turquie ne sera jamais un modèle »
Le catholicos Aram Ier a évoqué ensuite le refus par la Turquie de reconnaître le génocide de 1915. « La Turquie fait fi des droits de l’homme, au vu et au su de toute la communauté internationale », a-t-il souligné. « Comment peut-elle aspirer à devenir membre de l’Union européenne, et comment peut-elle prétendre respecter la démocratie et fournir un modèle de coexistence ? » s’est-il encore demandé. « La Turquie, dont l’historique contredit les principes humanitaires et les valeurs religieuses et morales, est loin de fournir un exemple de bonne conduite, quelle que soit son envergure géopolitique », a-t-il ajouté.
Par ailleurs, le catholicos arménien-orthodoxe de Cilicie à Antélias, Aram Ier, a copublié avec le patriarche suprême de l’Église orthodoxe-arménienne et catholicos de tous les Arméniens, un communiqué dénonçant le déni des « massacres perpétrés il y a 98 ans contre nos ancêtres, mais aussi des crimes continus contre les propriétés du peuple arménien, c’est-à-dire son patrimoine culturel et religieux ». Appelant une nouvelle fois la Turquie à reconnaître le génocide, le communiqué a dans le même temps exprimé la reconnaissance des autorités arméniennes à l’égard de chaque État « ayant pris sous son aile les réfugiés arméniens et chaque État ayant reconnu, au nom de la justice, le génocide arménien ».

Bourj Hammoud-place des Martyrs
Parallèlement à la messe, une marche (à coloration politique) a été organisée à Beyrouth en mémoire des martyrs de 1915, et pour réitérer les revendications fières et tenaces du peuple arménien.
Rassemblés à Bourj Hammoud, les manifestants se sont dirigés jusqu’au centre-ville, où ils ont été rejoints par les proches des otages libanais à Azzaz, en présence du représentant du mouvement Amal, Mohammad Khawaja, et du représentant du Hezbollah Ghaleb Bou Zeinab.

 

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Le secrétaire général du parti Tachnag Hovig Mekhitarian a affirmé, à partir de la place des Martyrs, que « nous sommes plus que jamais déterminés à lutter pour le Liban comme patrie définitive pour tous ses fils ». Il a appelé l’ambassadeur de Turquie à « notifier Ankara de notre lutte visant à obtenir de la Turquie une reconnaissance du génocide, mais aussi des excuses officielles et des dédommagements au peuple arménien ». Il a dénoncé enfin l’impunité dont bénéficie la Turquie, près d’un siècle après le génocide. Et d’ajouter : « Le rétablissement des relations entre la Turquie et Israël est la preuve de la fausseté des intentions turques envers les Arabes et les musulmans. La Turquie essaie d’intégrer la région arabe en complotant avec les ennemis de la nation. » Le responsable du parti Tachnag a ainsi mis en garde contre « les dangers de l’infiltration turque, dont la finalité est d’enterrer l’identité culturelle et nationale au Moyen-Orient ».

S. Gemayel : Notre politique étrangère doit inclure la cause arménienne
Plusieurs figures politiques ont exprimé par ailleurs leur solidarité hier avec le peuple arménien. Ainsi, le député Kataëb Samy Gemayel, qui participait à une conférence à l’occasion de la commémoration du génocide à la Maison centrale des Kataëb à Saïfi, a mis l’accent sur la nécessité que « la cause arménienne ne soit pas absente de la politique étrangère du Liban ». Il a souligné dans ce cadre que le soutien par le Liban de la cause arménienne ne compromettrait pas les relations diplomatiques avec la Turquie. Insistant sur le fait que les Arméniens font partie du « tissu constitutif du Liban », il a estimé obligatoire, pour l’État libanais, « d’endosser leur cause ». Dans une approche comparative avec les Libanais, « connus pour leur mémoire courte », Samy Gemayel a estimé que « le seul moyen de bâtir le Liban est de préserver nos mémoires respectives en tant qu’acquis indélébiles qu’il faut respecter et protéger ».


Par ailleurs, le ministre démissionnaire de l’Environnement Nazem el-Khoury a exprimé « sa profonde solidarité avec le peuple arménien qui a su rester attaché à sa cause ». Il a salué les Arméniens qui ont pu décrocher jusque-là la reconnaissance par 26 États sur les 43 États requis pour une reconnaissance internationale du génocide arménien. De son côté, l’ancien ministre Farid Haykal el-Khazen a salué « la position unifiée des partis arméniens pour obtenir gain de cause ». La Ligue maronite s’est également solidarisée avec la cause arménienne, saluant particulièrement les Arméniens du Liban, « qui ont su préserver leur identité culturelle tout en s’intégrant entièrement au pays ».

 

 

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