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Culture - Poésie

Le baiser, non selon Klimt mais selon Zahi Wehbé...

Pour son quatorzième recueil de poésie, « Ta3rif al-Koubla » (Connaissance du baiser, édition al-Saqi, 110 pages), Zahi Wehbé lève le voile sur des lèvres qui quêtent sensualité, chaleur humaine et goût d’éternité.

De l’approche du baiser. Un poète a la langue qui se délie pour parler des transes de l’amour.
Assis dans son fauteuil sur les plateaux de télévision, faisant défiler sous les caméras hommes et femmes du monde arabe, intarissable causeur des talk-shows culturels, Zahi Wehbé a depuis longtemps jeté le masque. Celui d’un impénitent «taquineur» de muses. Tant il a aimé aussi bien le verbe de Mahmoud Darwiche que celui de Louis Aragon. Et c’est depuis 1990 qu’il publie, avec une régularité de métronome, ses plaquettes de poésie. Affinant sa voix de «voyant», maîtrisant la liberté de ses mots et affirmant sa place au sein du Parnasse arabe.
Fidèle à ses thèmes (l’identité arabe, l’altérité, les guerres, les exodes, les exils, les battements de cœur), il revient au galop à ses premières amours, c’est-à-dire l’amour. À travers le «baiser»... À ce moment vertigineux où l’étreinte n’est plus effusion, mais fusion. Sans impudeur, mais aussi sans trop de pudeur. Tout en mêlant dans des mots, parfois trop bleus ou de velours, érotisme, spiritualité et
compassion.
C’est clair dès la couverture. Il s’agit du fiévreux baiser des amants de Gustave Klimt. Amants plongés dans le volubile ramage d’étoffes aux motifs symbolistes. Une huile sur toile recouverte de feuilles d’or, conservée aujourd’hui au palais du Belvédère à Vienne. Pour renforcer le propos, en exergue du recueil, une phrase d’Ibn Arabi: «L’amour est ma religion et ma foi...» Voilà le ton donné, tambour battant, en trompettes et clairons.
Plus d’une quarantaine de poèmes, de métrique libre, sans rime, portés par une musicalité aux tonalités douces et feutrées. Poésie jaillie du cœur, des cils, des prunelles, des paumes, des mains, des entrailles, d’une poitrine à la respiration apaisée ou accélérée, de la vibration de la peau, des seins, des parfums, des paroles, des galbes d’un corps.
Une poésie rarement explosive ou coléreuse. Encore moins insolente, grivoise ou gratuitement provocante. Mais plutôt péchant par excès de douceur et d’une sensibilité exacerbée et débordante.
Quête de soi en touchant «l’autre», tentative de percer le mystère de la vie, désir et volonté de franchir le mur de l’invisible. Avec des mots choisis pour leur tendresse, leur force de conviction, de séduction, d’envoûtement, de compassion. Car le poète magnifie aussi la résistance du corps et des êtres devant la maladie et l’adversité.
Des mots caresses, des mots sensualités. Mais aussi quelques écorchures, quelques blessures, quelques morsures, quelques doutes. Sans oublier un halo d’images. Toutes nées de subtiles associations verbales. Des images entre damnation de la terre et pureté du ciel, lourdeur du corps et immatérialité de l’esprit. Images qui se brisent aux lames du quotidien, de ses aléas et impondérables. Avec toutes les contradictions que cela comporte: «Mon corps est libre, mais il est poussière...»
Aux frontières des frémissements de Nizar Kabbani devant la passion, des renversements du cœur à la Paul Éluard, Zahi Wehbé s’érige chantre de l’amour. Comme un Qaïs en quête de sa Leila, d’un Antar fou de Abla, d’un Louis habité d’Elsa, d’un Cohen en fascination devant sa Belle du Seigneur...
Mais dans ces pages dédiées à l’érotisme et au règne de l’amour et de la passion, il s’y mêle aussi une touche d’humanisme. Celui de la compassion pour les êtres en quête de paix et d’harmonie intérieure. De la bise au bécot, en passant par un bisou, une pelle ou un patin, l’auteur répertorie ici, en images poétiques multiples, le baiser.
Ce baiser qu’Edmond Rostand cerne en ces termes: «L’amour, c’est la gloire en bécots»...
De l’approche du baiser. Un poète a la langue qui se délie pour parler des transes de l’amour. Assis dans son fauteuil sur les plateaux de télévision, faisant défiler sous les caméras hommes et femmes du monde arabe, intarissable causeur des talk-shows culturels, Zahi Wehbé a depuis longtemps jeté le masque. Celui d’un impénitent «taquineur» de muses. Tant il a aimé aussi bien...

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