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Moyen Orient et Monde - Focus

La campagne électorale américaine a libéré un véritable discours de haine

Des graffitis insultants signés « KKK » (Ku Klux Klan) dans les rues de Kokomo, une petite ville de l’Indiana. Peter Eisler/Reuters

Depuis la mi-octobre, sont apparus des graffitis insultants signés « KKK » (Ku Klux Klan) dans les rues de Kokomo, une petite ville de l'Indiana. Sur des voitures, des façades, des poteaux téléphoniques, ou sur le trottoir qui fait face à la petite maison ouvrière où Karen Peters, une Afro-Américaine, a passé la majeure partie de sa vie et affiche ouvertement sa préférence pour le Parti démocrate.
« Ça dégénère », observe cette habitante, persuadée que le ton particulièrement violent de la campagne présidentielle de 2016 et la rhétorique agressive de Donald Trump encouragent ces comportements extrémistes. « Quand on a (des candidats) qui affirment des bêtises, peut-être que d'autres gens se disent qu'ils ont le feu vert pour faire ce genre de choses, et c'est vraiment triste. (...) On dirait que notre pays est en train de régresser », dit-elle.

À travers les États-Unis, le ton incendiaire et agressif du discours politique entendu ces derniers mois se répercute dans la parole publique et polarise l'électorat. Il est difficile d'en mesurer l'impact. Aucune statistique nationale ne recense les crimes à motifs politiques ou les paroles de haine. Toutefois, les enquêtes du Pew Research Center, un institut non partisan, montrent que le pourcentage d'électeurs estimant qu'injurier son adversaire politique « fait parfois partie du jeu » a grimpé de 30 % en mars à 43 % en octobre. Une majorité d'électeurs des partis démocrate et républicain ont désormais une opinion « très défavorable » de l'autre parti, une première depuis que Pew a commencé à poser la question, en 1992, alors que la confiance dans le gouvernement est au plus bas.
« Ces indicateurs reflètent des tensions entre groupes qui peuvent se traduire de n'importe quelle manière, de la simple grossièreté jusqu'aux actes extrémistes », note Brian Levin, directeur du Centre d'études de la haine et de l'extrémisme à la California State University. La plupart de ces incidents visent les immigrants, les Afro-Américains et les autres groupes traditionnellement liés au Parti démocrate. Mais les républicains sont aussi confrontés à des actes hostiles.


(Lire aussi : Donald Trump et la perte de confiance dans les institutions)

 

L'émergence de l'Alt-Right
Un mouvement, Alt-Right (Droite alternative), monopolise une grande part du débat sur l'extrémisme aux États-Unis. Composé de nationalistes blancs, antisémites, hostiles aux immigrants, il est sorti de l'ombre ces derniers mois pour rallier la candidature de Trump. Alt-Right applaudit les propositions du milliardaire en faveur de la construction d'un mur à la frontière mexicaine, de l'expulsion des immigrés clandestins ou du contrôle des musulmans pour d'éventuels liens avec le terrorisme.
Il y voit une légitimation de sa préoccupation majeure, l'érosion de la majorité blanche et chrétienne du pays, explique Michael Hill, qui se décrit lui-même comme un suprémaciste blanc, antisémite et xénophobe et dirige la Ligue du Sud, un groupe « nationaliste sudiste » dédié à la création d'une « terre de l'homme blanc » indépendante. « Le climat politique général qui entoure sa campagne a été très fécond, non seulement pour nous mais pour tous les groupes de droite radicale », ajoute-t-il.

Les propositions de Donald Trump correspondent à l'objectif de l'Alt-Right de « ralentir la dépossession des blancs », renchérit Jared Taylor, un nationaliste blanc dont le site American Renaissance est l'un des plus prisés du mouvement. Mais il estime aussi que les médias exagèrent le soutien des cercles extrémistes au candidat républicain, « afin de le discréditer ». Jared Taylor, Michael Hill et les autres figures de l'Alt-Right se défendent d'inciter au vandalisme ou à la violence. Ils refusent d'admettre que leur rhétorique constitue un discours de haine, affirmant que les attaques de l'extrême gauche à leur encontre sont bien plus haineuses.
Le premier amendement de la Constitution garantissant la liberté d'expression permet d'aller loin dans le discours. La loi réprime en revanche les « crimes de haine » qui visent les victimes en raison de leur ethnie, religion, handicap ou orientation sexuelle.

Les chercheurs de la California State University ont calculé, dans une étude menée l'an dernier, une hausse de 6 % des crimes de haine et constaté peu de changements dans le nombre d'attaques visant la plupart des minorités, à l'exception des musulmans, contre lesquels les crimes de haine ont bondi de 86 %.
Craig Dunn, président du Parti républicain du comté de Howard, où se trouve la commune de Kokomo, juge que l'écho des voix extrémistes minoritaires est amplifié par Internet et les réseaux sociaux, qui alimentent une « dégradation générale des règles de civilité ». Le maire de Kokomo, le démocrate Greg Goodnight, s'inquiète quant à lui pour sa communauté. « Il y a plus de tensions », dit-il en avouant n'avoir jamais vu auparavant dans sa ville des graffiti du KKK.

 

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