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Liban - Rencontre

L’hommage à Ghassan Tuéni au Salon du livre : foi et libertés

Une table ronde s’est tenue hier au BIEL sous le thème « Ghassan Tuéni : foi, droit, libertés », quelques mois après le décès du journaliste.

Antoine Kheir, Michel Eddé, Farès Sassine, Marwan Hamadé et Henri Laurens.

Le 20e Salon francophone du livre de Beyrouth est le premier Salon que Ghassan Tuéni, décédé en juin dernier, ne seconde pas de près ou de loin. Ceux qui l’ont connu savent qu’il y était chaque année par ses nouvelles parutions, ses visites aux stands, ses encouragements et ses participations aux tables rondes. Et parce qu’il n’est pas possible d’envisager cette rencontre annuelle sans Ghassan Tuéni, la Fondation Gebran Tuéni et les éditions an-Nahar ont tenu à lui rendre hommage, en organisant une table ronde hier, sous le thème « Ghassan Tuéni : foi, droit, libertés ». 
Modérée par Farès Sassine, la rencontre a tenu à évoquer plus d’un aspect de la vie du journaliste à travers les témoignages de Michel Eddé, Marwan Hamadé, Antoine Kheir et Henri Laurens. « La vie de Ghassan Tuéni fut longue non pas par le nombre des années, mais par l’intensité et la variété des activités qu’il y a déployées, par les causes qu’il a servies et par les réalisations qu’il a faites », a affirmé Farès Sassine, qui a tenu à évoquer la fidélité religieuse de Ghassan Tuéni, « foi qui est le propre d’une volonté de puissance affichée, d’un homme qui n’a point cessé de chercher à s’affirmer ».


C’est de cette foi qu’a témoigné aussi l’ancien ministre Michel Eddé. « Durant près de soixante-cinq ans, Ghassan Tuéni a joué un rôle déterminant dans la vie du pays, a-t-il dit. À 21 ans à peine, il a dû prendre en charge an-Nahar, après le décès de son père, et le quotidien est devenu le seul organe de presse libre dans le monde arabe. Mais peu de gens savent que Ghassan Tuéni était surtout un chrétien. Personne n’a subi dans sa vie autant de peines et de souffrances, après la mort de toute sa famille. C’est grâce à sa foi en la résurrection que Ghassan a pu surmonter ces épreuves, mais il vivait sa foi sans ostentation et de manière très pudique. »

 

(Lire aussi : Printemps ou hiver arabe : entre « dictatures nouvelles » et « modernisme réinventé »)


« Par ailleurs, il était profondément attaché à l’Église orthodoxe au Liban et dans le monde, a ajouté M. Eddé. Hostile au fanatisme, il regrettait que le catéchisme dans les écoles n’ait pas été enseigné comme il se devait. Dans sa longue maladie, il s’en est remis à la volonté de Dieu pour vivre son agonie, qui a été très éprouvante. » 
De son côté, le député Marwan Hamadé a expliqu que Ghassan Tuéni n’a été fidèle qu’à une seule idéologie, la liberté. « Reconnu au fil de sa carrière comme un géant du journalisme arabe, Ghassan Tuéni ne s’est jamais laissé enchaîner ni par l’or noir qui corrompait la presse de l’époque ni par les appâts du pouvoir qui lui étaient souvent offerts, a dit M. Hamadé. Le libre penseur qu’il était planait grâce à son intelligence et son talent. Ce petit journal qu’il a hérité de son père ne cédera jamais aux contraintes des partis, des tendances, des blocs, des fronts et ne badinera jamais avec sa seule inspiration, la liberté. Dans le parcours de Ghassan, on trébuche sur des étapes aussi nombreuses que fastes. Il est toujours là avec les manifestants de la faim, les éditos du putsch pacifique de 1952, la défense des libertés de culte et d’opinion, les bravades à la censure, le soutien aux déshérités, le rejet de la guerre civile, le refus de l’occupation comme de l’hégémonie, les appels à la tolérance et enfin le grand pardon de décembre 2005 devant le cercueil de Gebran. La famille qu’il a fondée et qu’il a perdue un peu, comme nous perdons le Liban au fil des accidents de la vie, est la meilleure affiche de sa politique. Variée, colorée, diverse, ouverte, dramatique. Il aura créé, sur 70 ans de parcours intellectuel, un ghassanisme de prédilection, véritable école de pensée, dans un Liban dont il fera le combat de sa vie. »

 

Pour Antoine Kheir, membre du Conseil constitutionnel et ex-président de la Cour de cassation, « Ghassan Tuéni a su distinguer entre la justice et ses misères, et le droit qu’il tenait en haute estime, puisqu’il affirmait qu’il avait plus d’estime pour les publicistes que pour ceux qui défendaient des causes privées moyennant des rémunérations exagérées ». Et d’ajouter : « Défenseur par excellence des grands principes et des libertés fondamentales, il s’est transformé en défenseur de son pays. Les résolutions pour le Liban élevées au niveau international portaient son propre style. Il avait découvert ce que son pays avait de plus. Il était contre les dictateurs, les régimes totalitaires du monde arabe et contre tous ceux qui ne luttaient pas pour dire ce qui leur passait par la tête. »


Enfin, c’est l’historien Henri Laurens qui a rendu hommage à Tuéni, « prince de la culture aux conversations étincelantes et aux riches références ». « Lui qui s’était opposé au nassérisme a été incompris au départ, mais le temps lui a donné raison, a-t-il dit. Par son livre Une guerre pour les autres, Ghassan a voulu faire comprendre aux Libanais ce qu’ils étaient en train de faire pour s’en défaire si possible. Pour lui, ce siècle était pour rien. Je ne peux en être sûr. Mais je peux dire qu’avec Ghassan Tuéni, il n’y a pas eu une vie pour rien. »

 

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Le 20e Salon francophone du livre de Beyrouth est le premier Salon que Ghassan Tuéni, décédé en juin dernier, ne seconde pas de près ou de loin. Ceux qui l’ont connu savent qu’il y était chaque année par ses nouvelles parutions, ses visites aux stands, ses encouragements et ses participations aux tables rondes. Et parce qu’il n’est pas possible d’envisager cette...

commentaires (1)

Mon Dieu, comme le Liban rêvé, créé, fait par Ghassan Tuéni se perd au fil des jours par oeuvre et grâce des ennemis de ce pays! Cela fait frémir, trembler, désespérer !

Halim Abou Chacra

03 h 30, le 02 novembre 2012

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Commentaires (1)

  • Mon Dieu, comme le Liban rêvé, créé, fait par Ghassan Tuéni se perd au fil des jours par oeuvre et grâce des ennemis de ce pays! Cela fait frémir, trembler, désespérer !

    Halim Abou Chacra

    03 h 30, le 02 novembre 2012

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