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Culture - Festival al-Bustan

Poésie, rythme et passion pour un clavier avec Linda Bustani

Retour aux sources pour Linda Bustani, une grande dame du clavier, et retour pour la seconde fois à un festival qui donne du bonheur.

Prestation sans faille par une grande dame du clavier qui dédie ses notes à toutes les mamans. Photo Farès Jammal

Au menu, concocté avec un sens précis du dosage des saveurs et des combinaisons d’atmosphère, des pages ensoleillées de compositeurs brésiliens ainsi que des partitions où explosent la fièvre et la fantaisie romantiques.
Souriante et d’une simplicité confondante, en longue robe moulante mordorée, la pianiste s’assied sur le tabouret devant le piano noir à couvercle ouvert et s’adresse à l’auditoire. Et dédie, en toute touchante émotion contenue, dans un aimable humanisme, ces notes à toutes «les mamans».
En ouverture, toute la poésie d’un Robert Schumann avec le Fantasiestucke op 12. Ample narration entre douceur rêveuse et moments éruptifs sur fond, en subtile alternance, de notes luisantes comme des étoiles dans un firmament, de chromatismes vertigineux comme une déferlante fatale, d’accords en grappes opulentes comme des grains de raisins opalescents. Images sonores à la fois soyeuses et emportées où, par-delà un cycle mariant en touches lumineuses harmonies et mélodies, paysages et états d’esprit se confondent dans une impalpable randonnée éminemment romantique. Partition restituée en toute beauté par un jeu torrentiel, même si la part du rêve est un peu mise sous le boisseau...
Passage au soleil et la sensualité du Brésil avec La Valsa Braseileira n°1 de Francisco Mignone. Une valse aux circonvolutions tendres avec des éclairs de virtuosité dans les appoggiatures. Entre trilles fragiles et cadences sous fougueux chromatismes pointe un soupçon de charmante allure salonnarde...
As tres Marias d’Heitor Villa-Lobos, qui table sur les notes aiguës du clavier, est un vibrant hommage à l’enfance et à la solidarité humaine à travers des rythmes prestement enlevés et qui ont tout de la candeur des rondes et comptines enfantines.
En dernier morceau, avant la fin de la première partie du programme, un «modeste» (la pianiste dixit) tango intitulé Brejeilos d’Ernesto Nazareth. Sans coller à la littéralité du terme, trop bienveillante et humble, ce tango a des atouts bien séducteurs dans ses trémolos, ses embardées, ses déhanchements, ses mouvements ondulatoires et son histoire pour des corps et des cœurs qui s’emboîtent et
s’harmonisent...
Après l’entracte, une part léonine à Frédéric Chopin que Linda Bustani considère ici dans sa dimension d’amour, un peu loin des influences nationales, des mazurkas et des polonaises. L’amour, indispensable rempart pour la folie et le ciment des nations... Partitions incluant, pour une grande et profonde promenade dans le sous-bois de l’univers sonore du pèlerin polonais, Prélude (n° 24), Nocturne (op 27 n°2), Fantaisie (op 47), Barcarolle (op 60) et Scherzo (n°3 op n°3). Images riches et retentissantes pour une inspiration d’une sensibilité vive, qui a toutes les visions enfiévrées et passionnées d’un ténébreux romantique pour qui la nature est une amante fidèle, l’être une énigme à explorer et la douleur une source pour mieux ressusciter. Part un peu sombre que cet attachement à la nuit et à la tourmente, mais où la lumière jaillit quand même là où on l’attend le moins, c’est-à-dire au détour d’une cavalcade de notes, d’un rubato menaçant, d’un arpège échevelé, d’une cadence précipitée, de deux accords alternés...
Salve d’applaudissements pour une prestation sans faille avec, au milieu de la salle, la présence de beaucoup de jeunes car les élèves du Conservatoire national supérieur de musique étaient ce soir-là gracieusement invités.
Deux bis admirablement exécutés. D’abord la très originale Humoresque de Cherkin (hommage aux années d’études en Russie de la concertiste), une œuvre qui ne manque pas de mordant avec ses lignes mélodiques chaloupées, syncopées et des interrogations, pas forcément importantes, qui restent sans réponses, aussi bien sur les notes basses qu’aiguës! En deuxième encore, pour la mort d’une mère, une splendide et mythique (au Brésil) Valse de la douleur (interprétée déjà par Cristina Ortiz et José Féghali, et la comparaison d’interprétation et de perception est un atout de richesse) de Villa-Lobos, d’un lyrisme somptueux.
Révérence, sourire, main sur le cœur de Linda Bustani et exit du public. Il serait souhaitable quand même que certains festivaliers attendent le troisième bis qui n’est presque jamais refusé par l’artiste, mais l’auditoire est trop souvent pressé de quitter les lieux...
Au menu, concocté avec un sens précis du dosage des saveurs et des combinaisons d’atmosphère, des pages ensoleillées de compositeurs brésiliens ainsi que des partitions où explosent la fièvre et la fantaisie romantiques.Souriante et d’une simplicité confondante, en longue robe moulante mordorée, la pianiste s’assied sur le tabouret devant le piano noir à couvercle ouvert et...
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