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Lifestyle - Tradition

Les femmes mariachis, d’infatigables lutteuses dans un monde d’hommes

« Le plus difficile, c’est la culture qui prévaut encore au Mexique du macho. »

Isabel Aguilar est l’une des rares femmes travaillant place Garibaldi, haut lieu de la musique mariachi à Mexico. Alfredo Estrella/AFP

Vêtue à la « charro » de la robe traditionnelle mexicaine des cavalières, portant de longues boucles d’oreilles brillantes, l’air décidé, Isabel défie du regard une quinzaine d’hommes et chante avec énergie, seule femme de son groupe de mariachis, « Ay, qu’elle est belle, qu’elle est chouette, la fête de mon ranch. »
Cela fait 16 ans qu’elle est l’une des rares femmes travaillant place Garibaldi, haut lieu de la musique mariachi à Mexico. La condescendance avec laquelle la considèrent certains de ses collègues lui démontre que, pour une femme, le métier n’est pas facile. Dans un monde traditionnellement réservé aux hommes, cette femme de 32 ans, mère d’un enfant, a eu à affronter non seulement les regards dédaigneux de certains clients ou collègues, mais aussi les réticences de son père. Il était pourtant mariachi et a transmis à sa fille le goût de cette musique populaire typique. « Il disait que la place des femmes est à la maison », raconte Isabel, qui reconnaît que ce rejet des mariachis du sexe opposé vient surtout des plus âgés.
Sur les quelque 2 000 musiciens enregistrés par l’Union mexicaine des mariachis (UMM), basée à Garibaldi, on ne compte qu’une vingtaine de femmes. Elles doivent affronter, au sein de groupes masculins, le préjugé selon lequel ce symbole de l’identité mexicaine, datant du XIXe siècle, serait réservé aux « machos ».
La tâche n’est pas toujours aisée. Quand Isabel joue du violon et chante avec les hommes de son groupe, elle n’est pas toujours vue d’un bon œil. « Je me garderai de faire un commentaire », se limite à émettre un vétéran, membre du fameux Mariachi Vargas, tandis qu’il observe la scène sur un banc. Il dit à l’un de ses collègues qu’il reste « un long chemin à parcourir » pour que les femmes arrivent au niveau des hommes.
D’autres ne partagent pas cet avis et applaudissent sans réserve la qualité des femmes mariachis ainsi que la part de beauté qu’elles apportent au spectacle. « Le plus difficile, c’est la culture qui prévaut encore au Mexique de l’homme macho. Les hommes ont encore cette idée du machisme, ils ne peuvent pas s’en débarrasser », se lamente Isabel qui considère qu’elle est engagée avec ses collègues femmes dans une « lutte silencieuse ».
Mais le terrain a été préparé pour cette lutte par une génération de femmes combatives qui, à la fin des années 50, ont brisé les tabous et fondé les premiers groupes entièrement féminins de mariachis, une réalité aujourd’hui quasi inexistante au Mexique, mais courante aux États-Unis. Lupita Villa, 80 ans, est l’une de ces femmes. Elle préserve comme un trésor les photos en noir et blanc de son groupe, « Las Coronelas », qui a fini par s’imposer sur les scènes nationales et lors de tournées à l’étranger. « Nous étions le seul groupe féminin, et nous avons été applaudies et couvertes d’éloges parce que nous étions des femmes », dit Lupita qui se souvient avec nostalgie de cet âge d’or des mariachis. Mme Villa, restée célibataire et sans enfant, se souvient avec émotion de cette époque où toutes les femmes du groupe étaient engagées à fond dans leur métier, et avec tristesse du moment où certaines d’entre elles le quittèrent une fois mariées. « Les hommes sont à la fois jaloux et méfiants. Deux des filles ont pris un époux et ce fut la fin. Les maris les ont confinées à la maison. »
Pour cette guitariste et chanteuse, dont la voix porte encore quand elle chante La Tequilera ou Qu’il est beau mon Michoacan (région de l’ouest du Mexique), le professionnalisme est un facteur déterminant pour que les filles se fassent respecter. Et c’est pour ça qu’elle souhaite que la nouvelle école de mariachis ouverte en octobre à Mexico attire de nombreuses jeunes filles.
Onze des 85 étudiants actuels de l’école sont des femmes et la majorité d’entre elles, comme Maria Teresa Gabriel, s’accorde à dire qu’une « femme sort mieux préparée » pour surmonter les défis après trois années d’études.
(Source : AFP)
Vêtue à la « charro » de la robe traditionnelle mexicaine des cavalières, portant de longues boucles d’oreilles brillantes, l’air décidé, Isabel défie du regard une quinzaine d’hommes et chante avec énergie, seule femme de son groupe de mariachis, « Ay, qu’elle est belle, qu’elle est chouette, la fête de mon ranch. »Cela fait 16 ans qu’elle est l’une des rares femmes...

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