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Moyen Orient et Monde - Iran

Rohani se garde de tout triomphalisme

L’équation du nouveau président : négocier avec l’Occident en ménageant les équilibres internes.

Une partisane de Hassan Rohani célébrant sa victoire à la présidentielle. Sina Shiri/Fars News/Reuters

Hassan Rohani s’est gardé de tout triomphalisme après sa victoire surprise au premier tour de l’élection présidentielle en Iran, et il a prévenu hier ses compatriotes que le camouflet infligé aux conservateurs ne signifiait pas que leurs problèmes seraient réglés du jour au lendemain. L’élection de ce dignitaire religieux « modéré » a déclenché des scènes de liesse dans les rues de Téhéran, où la jeunesse iranienne a célébré sa « revanche » sur la réélection contestée de Mahmoud Ahmadinejad il y a quatre ans, et sur la répression du mouvement de contestation qu’elle avait provoquée. Certains ont effectué le V de la victoire et ont scandé des slogans en faveur de Mirhossein Moussavi, candidat réformateur malheureux en 2009. « Moussavi, Moussavi, j’ai repris ton vote » et « Moussavi, Moussavi, bravo pour ta victoire », ont crié ses partisans.


M. Rohani, auquel le camp réformateur s’était rallié un peu par défaut après l’éviction par le pouvoir de l’ancien président Akbar Hachemi Rafsandjani en mai, a salué dans son premier discours, samedi, une victoire « de la modération » et, selon des propos rapportés par son site Internet, « la foi en l’avenir du peuple iranien ». Mais refusant d’incarner une rupture avec le régime, il a aussi tendu la main aux « principlistes », les fidèles du guide suprême de la révolution islamique, l’ayatollah Ali Khameni, qui reste le véritable homme fort du pays. Hier, le président élu s’est à nouveau employé à tempérer l’enthousiasme et les attentes des Iraniens en les invitant à la patience. « Les problèmes du pays ne seront pas résolus en une nuit, et il faut que cela se produise par étapes et en consultant les experts (religieux) », a-t-il dit à l’agence IRNA.

 

(Portrait : Hassan Rohani, un religieux modéré à la tête de l'Iran)



Retour à la normale
Bien qu’encore grisée par la fête de la veille, pendant laquelle la police s’est gardée d’intervenir et a même parfois, selon des témoins, échangé des blagues avec les manifestants, Téhéran avait retrouvé une activité normale hier.
Tout en reconnaissant que la victoire de M. Rohani peut augurer un changement, au moins de ton, les spécialistes de la politique iranienne se montrent prudents sur la tournure que pourraient désormais prendre les événements. « Il y a des raisons d’être optimiste à propos de la victoire de Rohani. Il est calme, pragmatique et plus raisonnable que la plupart des politiciens iraniens », écrit Alireza Nader, analyste du centre de réflexion Rand Corporation, ajoutant : « Mais il faut être très prudent. Rohani fait partie du système, ce n’est pas un réformateur. Il a fait figure de candidat d’alternance par rapport à des gens comme l’ancien président Mahmoud Ahmadinejad. Cela mettait la barre bien bas. » L’un des premiers tests des intentions du nouveau président et, par ricochet, de la disposition de l’ayatollah Khamenei à accepter un assouplissement de la ligne dure adoptée ces dernières années sera le sort réservé à Mirhossein Moussavi et Mehdi Karoubi, l’autre chef de file du « Mouvement vert » de 2009, placés en résidence surveillée depuis deux ans.
« La victoire écrasante de Rohani devra se traduire en actes, et pas seulement cosmétiques, mais cela voudrait dire qu’un certain nombre de personnes admettent que les huit dernières années ont été une aberration », souligne Ali Ansari, professeur à l’Université St Andrew, en Écosse, ajoutant : « Je ne perçois pas ce changement de ton quand je lis (le journal conservateur) Kayhan. J’ai encore des réserves. » « Il ne faut pas oublier que l’Iran est dirigé par des institutions complexes et des centres de pouvoir en concurrence les uns avec les autres qui, par nature, préfèrent la continuité au changement radical », relève Ali Vaez, chercheur du centre de réflexion International Crisis Group. « Rohani ne peut changer le cœur de la stratégie nucléaire de l’Iran, qui est déterminée par le guide suprême (Ali Khamenei), mais il peut changer le ton et l’équipe » de négociateurs, explique encore M. Vaez.

Redorer son image
Toutefois, une détente avec les pays occidentaux permettrait à l’Iran de redorer son image, ternie par la répression du mouvement de contestation en 2009 et les déclarations intempestives de Mahmoud Ahmadinejad. Ce dernier, qui avait notamment remis en cause l’existence de l’Holocauste, « était le visage de l’Iran dans le monde. Cette image va changer. Ce sera désormais celui d’un homme posé, calme, soigné, avec un discours modéré », estime un expert iranien ayant requis l’anonymat. Hier, la presse réformatrice jubilait. « Le soleil de la modération s’est levé », annonçait le quotidien réformateur Arman quand Etemad évoquait « le salut de l’Iran au cheikh de l’espoir ». Les médias spéculaient déjà sur la composition de son gouvernement, alors que le nouveau président prendra ses fonctions le 3 août. M. Rohani doit tenir une conférence de presse aujourd’hui à 16h00 (11h30 GMT), ont encore indiqué les médias.
Le nouveau président iranien devra donc relever plusieurs défis et régler plusieurs dossiers importants, comme la relance des négociations avec les grandes puissances sur son programme nucléaire et l’allègement des sanctions internationales, tout en ménageant les autres piliers du régime dominé par les conservateurs. Pour Afshon Ostovar, membre du centre de recherches CNA basé aux États-Unis, le succès de M. Rohani dépendra « du soutien que lui apporte » l’ayatollah Khamenei. Pour Mohammad Saleh Sedghian, président du Centre arabe d’études iraniennes basé à Téhéran, le nouveau président est l’homme de la situation pour des discussions directes avec Washington. Mais il doit aussi ménager les différentes forces politiques, économiques et militaires qui composent la scène iranienne. « Il est l’homme politique ultime, qui sait construire des passerelles. Il serait peu probable et peu avisé pour lui de s’aliéner des parties puissantes du régime comme les gardiens de la révolution ou les conservateurs », explique M. Vaez. Pour Afshon Ostovar, l’équilibre sera difficile à trouver, mais pas impossible sur le long terme.

 

Repère

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Hassan Rohani s’est gardé de tout triomphalisme après sa victoire surprise au premier tour de l’élection présidentielle en Iran, et il a prévenu hier ses compatriotes que le camouflet infligé aux conservateurs ne signifiait pas que leurs problèmes seraient réglés du jour au lendemain. L’élection de ce dignitaire religieux « modéré » a déclenché des scènes de...

commentaires (5)

Rohani n'est que la seconde face d'une même monnaie. Si Khamenei a accepté cette ladite victoire des réformateurs (Coup monté bien sur), c'est tout simplement parce que l'Iran coule sous le poids des sanctions et Fakih sent qu'il ne tiendra pas longtemps avec tout ce qui se passe autour. Il a l'exemple de Bachar qu'il soutient a bout de bras mais depuis l'autorisation de la vente d'armes de qualités a l'opposition beaucoup de choses changerons sur le terrain. Il le sait! Mais qu'est ce qu'il s'en fout puisqu'il se sert justement des corrompus Libanais a leur solde au Liban pour tenter d'arriver a son but qui s’éloigne, s’éloigne, s’éloigne ... ... ... Au bon moment il sacrifiera les Chiites Libanais sur l'autel d'un traité pour avoir a boire et a manger!

Pierre Hadjigeorgiou

16 h 48, le 17 juin 2013

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Commentaires (5)

  • Rohani n'est que la seconde face d'une même monnaie. Si Khamenei a accepté cette ladite victoire des réformateurs (Coup monté bien sur), c'est tout simplement parce que l'Iran coule sous le poids des sanctions et Fakih sent qu'il ne tiendra pas longtemps avec tout ce qui se passe autour. Il a l'exemple de Bachar qu'il soutient a bout de bras mais depuis l'autorisation de la vente d'armes de qualités a l'opposition beaucoup de choses changerons sur le terrain. Il le sait! Mais qu'est ce qu'il s'en fout puisqu'il se sert justement des corrompus Libanais a leur solde au Liban pour tenter d'arriver a son but qui s’éloigne, s’éloigne, s’éloigne ... ... ... Au bon moment il sacrifiera les Chiites Libanais sur l'autel d'un traité pour avoir a boire et a manger!

    Pierre Hadjigeorgiou

    16 h 48, le 17 juin 2013

  • Je lis que "Hassan Rohani s'est dit contre les ingérences étrangères en Syrie". Premier test pour le nouveau président que le commanditaire Khamenei a à l'oeil : considérez-vous que... ? Pfff, je n'ai même pas besoin de préciser la question, les vrais Libanais auront deviné laquelle est-ce.

    Robert Malek

    15 h 47, le 17 juin 2013

  • va y avoir des mécontents...mais Ahmadinedjad a bien préparé sa succession...oh,pas que je le trouve vraiment démocrate ou tolérant...mais juste pragamatique...et il a bien préparé sa succession...ce type là n'atait ni l'icône que certains en ont fait,ni le mal absolu des autres...sorti du peuple,il ne pouvait faire autrement que l'écouter...or,les descendants des perses ont un défaut/qualité...ils ont horreur qu'on leur dicte leur conduite...en dépit de leurs évidents défauts,ils sont les héritiers d'une très ancienne civilisation dont ils ont une conscience réelle...et à ceux qui ont la mémoire courte,je rappelle quand même que sans l'évidente complicité de l'Occident,et les manoeuvres débiles des cinq soeurs,le Shah ne serait jamais tombé...Neauphle le Château,çà vous dit quelque chose? l'assassinat de Chapour Bakhtiar,jamais résolu,en dépit de la position de son fils dans la police fraçaise,çà ne vous parle pas?Mais arrêtez donc de prendre pour vérités ce qui n'est que mensonges!

    GEDEON Christian

    13 h 43, le 17 juin 2013

  • Les conservateurs qui ont perdu les élections n'ont pas mis le pays à feu et à sang, ils en ont pris acte et ça prouve la maturité de ce peuple libre de ses choix, ensuite Il faudra pas s'attendre à des changements radicaux, pour toutes les élections en pays usurpateur, les élus au poste de 1er ministre n'ont rien changer à la politique d'usurpation (sauf Rabin, qui s'est fait abattre ) qui continuent de plus belle, donc pour le nucléaire faudra pas s'attendre que l'Iran nvelle puiss regionale se déleste de ce droit. Changement de ton, c'est vrai mais il y un temps à tout, celui de la carotte et celui du bâton, les perses sont maîtres en la matière. Et enfin quoiqu'il entreprenne, faut s'attendre à ce que cela soit fait dans l'intérêt de son peuple et non pas dans l'intérêt d'un autre peuple que son peuple, une tradition au M.O chez certains dirigeants corrompus.

    Jaber Kamel

    12 h 20, le 17 juin 2013

  • Le plus appréciable dans cette histoire est qu'on ne verra plus la gueule du psychopathe Ahmadinejad. Espérons que ce nouveau président soit moins fou, mais bon, il ne faut pas oublier que Khamenei est toujours là...

    Robert Malek

    12 h 17, le 17 juin 2013

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