Le colloque s’est tenu en présence de membres du Parlement européen, de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, des Parlements du Liban et du Moyen-Orient, ainsi que de la Commission des conférences des évêques de l’Union européenne.
« Le synode des évêques, convoqué par le pape Benoît XVI en Assemblée spéciale pour le Moyen-Orient du 10 au 24 octobre 2010, a confirmé (...) que la présence chrétienne en Orient se comprend en termes de communion et témoignage, a affirmé le patriarche en introduction de son message, rédigé et lu en français. Ceci signifie que nous ne pouvons penser notre avenir en dehors, en marge, ou contre les sociétés où nous vivons. »
« En politique, a-t-il précisé, cette communion se traduit en termes d’identité nationale commune, de citoyenneté et de participation. Nous confrontons l’enjeu des changements en cours dans certains pays arabes. Tout en étant l’expression d’un éveil et d’un engagement pour une identité nationale commune, nous craignons que ces changements ne conduisent vers des conflits interconfessionnels, une transition vers des régimes plus durs encore et une partition de la région sur une base confessionnelle (...) Les chrétiens, avec tous leurs amis d’ici ou d’ailleurs, doivent faire face à toutes les tentatives de définir nos sociétés ou nos pays en termes d’identité religieuse. Nous devons nous opposer clairement à l’islamité exclusive de l’identité de nos pays ainsi qu’à la judaïté d’Israël. Nous saluons ici l’heureuse déclaration d’al-Azhar du mois de juin dernier, qui confirme que l’islam ne stipule aucune identité religieuse pour l’État, lequel ne doit être ni religieux ni théocratique, mais civil respectant les valeurs religieuses fondamentales. Nous invitons à un dialogue sincère entre les divers partenaires, politiques et religieux, libéraux, modérés ou conservateurs, islamistes et laïcs, locaux et internationaux, autour du concept de l’État civil afin de clarifier dans son contexte les exigences d’une citoyenneté partagée par tous sur un pied d’égalité. »
Sécurité
En ce qui concerne le témoignage, le patriarche Raï a parlé des trois défis qu’il affronte : la sécurité, les libertés fondamentales et la reconnaissance de la diversité.
« Dans ce contexte, a précisé le patriarche, nous voulons affirmer que la sécurité est un droit à tout citoyen et que l’État se doit d’assurer. Il ne s’agit donc en aucune manière d’une protection d’une minorité par une majorité, mais d’un droit fondamental et commun à tous, sans distinction et sans discrimination aucune. »
« Quant aux libertés fondamentales, a enchaîné Mgr Raï, nous souffrons dans quelques pays de la région de certaines formes de régime sécuritaire étatique ou social qui oppriment les libertés fondamentales de conscience, de culte et d’expression (...) Si la liberté de conscience, c’est-à-dire la liberté de croire ou de ne pas croire, de pratiquer une religion seul ou en public, sans aucune entrave, et donc de la liberté de changer de religion est encore – à l’exception du Liban – loin d’être garantie dans nos sociétés et parfois prohibée par la législation, la simple liberté de culte elle aussi est parfois indirectement entravée par les procédures difficiles et injustes pour l’obtention de permis pour la construction de lieux de culte ou leur restauration. »
Diversité
« Le troisième enjeu est celui de la reconnaissance de la diversité (...) Or l’histoire plus que millénaire du vivre-commun entre chrétiens et musulmans dans la région nous apprend par le biais du dialogue de la vie que ces différences irréductibles peuvent être surmontées, voire transformées en source d’enrichissement mutuel. »
« Nous ne craignons pas pour la présence chrétienne en Orient, a conclu Mgr Raï. Car nous croyons que cela dépend davantage de la volonté de Dieu que de notre choix. Nous savons aussi que le scénario d’un monde arabe sans les chrétiens serait un scénario catastrophique pour l’Orient et pour l’Occident. Car ceci sera la fin de l’arabité en tant que culture plurielle et elle sera engloutie par la culture religieuse de l’islam. Ni l’islam ni l’Europe ne pourront supporter une telle situation. Quant à nous, nous affirmons que l’identité nationale, la citoyenneté, la participation, la sécurité, la liberté et l’accueil de la diversité sont tous des jalons sur cet autre chemin quotidien que nous parcourons inséparablement avec nos concitoyens et frères musulmans de tous les pays du Moyen-Orient. »
Confirmation
Le nonce apostolique devait confirmer cette proposition, en affirmant dans son allocution : « Le Liban est un petit pays, mais on peut le comparer à un laboratoire. Le monde devient de plus en plus multiculturel, multiethnique et multiconfessionnel. L’expérience du pays du Cèdre nous console et nous renforce, parce qu’elle montre qu’un monde de respect pour la dignité humaine, pour les différentes traditions culturelles, et qui se base sur la liberté religieuse et la liberté de conscience, n’est pas seulement un rêve souhaitable, mais une réalité possible et en partie déjà achevée. »
« C’est dans ce sens, a-t-il précisé, qu’on peut comprendre la restauration de la synagogue au centre de Beyrouth, comme un signe éloquent d’une espérance pour un avenir enfin pacifié. »
Le colloque était coordonné et présenté par M. Maroun Karam. Il s’est tenu notamment en présence du P. Hadi Mahfouz, recteur de l’USEK, de Catherine Vierling, coordinatrice pour l’Europe, Gerhard Sabatthil, coordinateur des relations extérieures du Parlement européen, Gianni Pittella, vice-président du Parlement européen, Tomasz Niedgodzisz, ambassadeur de Pologne, représentant la présidence du Conseil de l’Union européenne, et enfin du nonce apostolique Gabriele Caccia. Cheikh Wissam Tarhini a représenté le mufti jaafarite et cheikh Ali Alayli a représenté le mufti de la République.
commentaires (8)
Le Liban ne sera jamais divisé, il sera pour le reste des temps un pays uni. Les libanais finiront par trouver la solution adéquate pour pouvoir vivre ensemble dans la dignité, la liberté et le respect pour tous. Grâce aux cantons, le Liban méritera son titre de " Suisse d'Orient "pays neutre. Marie José Malha.
Marie Jose Malha
13 h 07, le 20 novembre 2011