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Moyen Orient et Monde - Interview

Et pourquoi pas un Libanais, secrétaire général de l’UPM ?

Fadi Nahas, francophone, arabe et méditerranéen, est convaincu de la valeur ajoutée qu'un Libanais pourrait offrir au poste de secrétaire général de l'UPM, pour lequel il est candidat.

Projet phare initié par le président français Nicolas Sarkozy en juillet 2008, l'Union pour la Méditerranée (UPM) est aujourd'hui en perte de vitesse. Les 43 pays membres avaient conclu le 4 novembre 2008 un compromis sur la répartition des postes au sein du secrétariat, dont le siège sera installé à Barcelone, en Espagne. Le secrétaire général devrait être issu d'un pays du sud de la Méditerranée, alors que l'UPM est actuellement coprésidée par M. Sarkozy et le chef de l'État égyptien Hosni Moubarak.
Aujourd'hui, l'UPM est une institution embryonnaire. C'est donc le moment idéal pour un réveil nécessaire, avant que cette initiative soit définitivement enterrée. Pour relancer son action, une réunion des ministres des Affaires étrangères est prévue fin novembre à Istanbul pour designer le futur secrétaire général et ses adjoints.
Commence ainsi un ballet diplomatique où chaque pays tente d'avancer ses pions et d'avoir sa part du gâteau. Parmi les noms circulant pour le poste figurent ceux d'un Marocain et d'un Jordanien. Selon des sources proches du dossier, l'Égypte utiliserait ses canaux au sein de la Ligue arabe pour faire campagne en faveur du candidat jordanien, tandis que la Turquie, l'autre poids lourd régional, semble faire cavalier seul ne manifestant jusqu'à présent aucune préférence. Or, dans le contexte géopolitique actuel, il est évident que la Turquie joue un rôle de plus en plus important. Ses liens avec Israël, les Palestiniens, la Syrie et l'Iran en font aujourd'hui le gendarme du Moyen-Orient, sans oublier que les Européens veulent satisfaire les Turcs. Ankara peut donc, le moment venu, faire capoter l'initiative égyptienne et promouvoir un candidat qui lui plaît.
Le Liban, quant à lui, semble être aux abonnés absents. Noyés dans le blocage ministériel actuel, les dirigeants libanais restent hermétiques à l'importance du dossier.

Fadi Nahas : Je suis candidat
« Avec la paralysie politique, le Liban est spectateur et risque de rater un autre tournant important », affirme, révolté, Fadi Nahas. « C'est maintenant qu'il faut jouer ses cartes. Au lieu d'être marginalisé, le Liban peut représenter une valeur ajoutée », poursuit-il. « Je suis candidat au poste de secrétaire général de l'UPM, mais il faut que le pays dépasse ses querelles politiques pour désigner son candidat », déclare-t-il.
Libanais, résidant en Turquie depuis 25 ans, Fadi Nahas est un homme d'affaires activement impliqué dans la société civile. Détenteur du Prix d'Excellence en Leadership de l'Inter-American Economic Council en 2005, il a fondé « Act for Lebanon », une organisation à but non lucratif qui soutient des événements éducatifs, sociaux, culturels et sportifs à l'intérieur et à l'extérieur du Liban, dans le but de mettre en avant le pays et ses acteurs. Il est cofondateur et secrétaire général du « Pan Arab Cultural Icons/WAYYAK », une initiative en association avec le Forum économique mondial qui consiste à construire des ponts vers les quartiers défavorisés arabes, par l'entremise de célébrités et icônes arabes. Fadi Nahas est également membre du conseil d'administration du Marathon international de Beyrouth, membre fondateur de « Endeavor Turkey », détenteur du « The Humanitarian Rose Award », du « People's Princess Charitable Foundation, Inc. (2006) » et titulaire de la médaille de l'ordre du Mérite libanais. En 2009 enfin, il a été nommé membre du conseil consultatif pour le développement de l'Université Saint-Joseph. Il parle l'arabe, le français, le turc, l'anglais, l'italien et l'espagnol.
« J'ai toujours été un activiste, mais dans les coulisses. C'est la première fois que je me mets sur le devant de la scène parce qu'il ne s'agit pas d'un poste vicié par les méandres de la politique politicienne. L'UPM est une vision qui vaut la peine de lui consacrer son temps, sa passion et son énergie, assure M. Nahas. Ce qui compte beaucoup plus aujourd'hui que ma personne, c'est le fait que le Liban peut profiter de la conjoncture actuelle pour s'affirmer sur la scène régionale. Avec l'UPM, nous avons une occasion en or qu'il ne faut pas manquer. »
En tant que Libanais, c'est-à-dire méditerranéen, francophone et arabe, M. Nahas pourrait être un candidat de compromis entre le Machrek et le Maghreb. Celui qui transcende les frontières religieuses et culturelles du bassin méditerranéen, pouvant parfaitement bien lire et comprendre ces différentes cultures.
M. Nahas estime que le candidat idéal devrait faire consensus au niveau des pays membres en raison de sa neutralité, de ses atouts et de sa valeur ajoutée. Si les pays membres de l'UPM choisissent le candidat libanais, ils envoient un message fort au monde. « Nous renforçons ainsi le Liban dans la région en transformant les sources de problèmes en sources d'opportunités. Nous renforçons également le rôle des minorités dans la région en leur donnant l'espoir d'être actrices au lieu d'être marginalisées. Pour être efficace, il faut choisir un secrétaire qui peut naviguer dans les eaux troubles de la région. Il faut être un faiseur de pont de nature », affirme en outre Fadi Nahas, précisant que l'UPM a besoin d'un « candidat n'appartenant pas au sérail, pour une situation inédite ».

Pas de Ligue arabe bis
Le candidat au poste insiste également sur le fait qu'il ne faut pas retomber dans le même piège qui a handicapé la Ligue arabe, à savoir plaire à tel ou tel pays au risque de paralyser l'institution. « Si le processus de prise de décision de l'UPM ressemble à celui de la Ligue arabe, nous pouvons d'emblée affirmer que cette institution est mort-née. Nous ne voulons pas d'une Ligue arabe bis », insiste-t-il avec sa franchise habituelle.
La présence de l'État hébreu au sein de l'UPM ne doit pas, par ailleurs, handicaper la candidature libanaise. « Le Liban ne peut pas s'isoler et rater des tournants historiques à chaque fois qu'Israël est présent à la même table. » Dans ce contexte, Fadi Nahas dénonce « l'hypocrisie de certains. Tout le monde parle avec tout le monde ». « La Syrie négocie indirectement avec Israël, le Hezbollah a négocié par le biais de l'Allemagne pour un échange de prisonniers, le Hamas aussi. Sans oublier l'Autorité palestinienne. Si Israël ne veut pas être considéré comme la source de blocage dans la région, il peut voir dans le candidat libanais un pont pour un rapprochement futur entre les pays », estime en outre M. Nahas. Selon lui, les conflits de la région ont ainsi plus de chance d'être résolus que dans d'autres contextes. « Qu'y a-t-il en commun entre Naples et Bremen ? Juste un passeport européen, mais en culture, en mode de vie et en valeur, rien n'unit ces deux villes. Mais entre
Naples, Beyrouth, Marseille et Istanbul, c'est une même boisson qui porte plusieurs noms : l'arak, le raki, le ouzo, le pastis ou le chinchon », souligne, amusé, Fadi Nahas.
Par le passé, de nombreuses initiatives sont nées, mais la plupart sont restées lettre morte. Parler uniquement des sujets qui rassemblent sans s'attaquer aux vrais problèmes politiques ne mènera à rien. La preuve, avec la guerre contre Gaza, l'UPM a été bloquée. Or, les problèmes ne manquent pas du conflit israélo-arabe à l'islamisme radical, en passant par le terrorisme, l'immigration...
« L'UPM peut transformer les sources de problèmes en sources d'opportunités, d'amour, de passion, conclut Fadi Nahas. Les valeurs communes et les valeurs unificatrices dans la Méditerranée, même entre pays en conflit, sont beaucoup plus importantes que les problèmes qui les séparent. D'où ma conviction profonde du succès de l'Union pour la Méditerranée. »
Projet phare initié par le président français Nicolas Sarkozy en juillet 2008, l'Union pour la Méditerranée (UPM) est aujourd'hui en perte de vitesse. Les 43 pays membres avaient conclu le 4 novembre 2008 un compromis sur la répartition des postes au sein du secrétariat, dont le siège sera installé à Barcelone, en Espagne. Le...

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