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Moyen Orient et Monde - Reportage

L’inquiétude grandissante du peuple turc

Partagé entre la fatalité et la peur face aux attaques terroristes à répétition qui ont secoué la Turquie depuis presque un an, le peuple turc s'interroge désormais davantage sur son avenir et le rôle de l'État dans la lutte contre le terrorisme.

Osman Orsal/Reuters

Un profond sentiment d'insécurité plane à nouveau sur Istanbul et l'ensemble de la Turquie. La place Taksim, située en plein cœur de la ville, est moins bondée que d'habitude. Pourtant, les magasins de la célèbre rue Istiklal sont tous ouverts, alors que tous les transports en commun fonctionnent normalement. Quant aux Stambouliotes, l'inquiétude se lit sur leurs visages.

Alors qu'ils tentaient d'oublier la bombe qui a explosé le 7 juin à Vezneciler contre un bus de policiers, non loin d'un quartier touristique de la ville, les habitants d'Istanbul voient leur quotidien ébranlé par l'attaque terroriste qui a frappé mardi soir l'aéroport Atatürk, un lieu hautement fréquenté en ce début de vacances. En effet, des milliers de personnes s'apprêtent à rejoindre cette semaine leurs familles aux quatre coins de la Turquie pour profiter des congés de Bayram qui marquent la fin du ramadan. Omer, 24 ans, a d'ailleurs pris l'avion quelques heures avant l'attaque pour rendre visite à sa famille à Kayseri : « J'aurais pu mourir hier », réalise-t-il tristement.
La vie semble continuer, mais cette fois avec une appréhension grandissante. Les Turcs s'interrogent désormais fortement sur leur avenir. « C'est presque chaque mois qu'il y a une nouvelle attaque et que l'on doit s'assurer que nos proches sont en vie. Juste après l'annonce de l'attentat, j'ai pensé quitter le pays pour de bon. Puis ce matin, j'ai dû me rendre au travail et j'ai tout fait pour ne pas être envahi par la peur », raconte Esma, une jeune professeure de 30 ans. Onur, 28 ans, partage lui aussi ce sentiment : « Aujourd'hui tout le monde en parle, mais demain ce sera la routine à nouveau. Il est évident que tout cela aura des impacts sur nos habitudes de vie. »

 

(Pour mémoire : En Turquie, les attentats nourrissent les craintes pour l'économie)

 

Réseaux sociaux bloqués
En effet, de nombreux Turcs redoutent fortement une prochaine bombe placée dans le métro ou aux abords des lieux très fréquentés. « Je vais certainement éviter de me rendre à Taksim pendant un moment », déclare une femme dans la rue qui avoue être peu confiante à l'idée de prendre le métro pour se rendre au travail. Naz, une jeune femme turque qui vient de revenir à Istanbul alors qu'elle avait vécu une majeure partie de sa vie à l'étranger, explique qu'elle angoissait aussi à l'idée de sortir de chez elle aujourd'hui : « Mais finalement, c'était la meilleure chose à faire, car je me suis rendu compte que la vie avait repris comme avant et cela permet d'éviter une certaine psychose et de garder son sang-froid. »
De son côté, Nilce fait remarquer que les choses ne sont pas toutes revenues à la normale : « Depuis hier soir, je ne parviens pas à me connecter sur Facebook et Twitter et ça me rend folle de ne pas pouvoir m'informer et communiquer sur les attentats. » En effet, comme après chaque incident majeur en Turquie, on constate que les réseaux sociaux sont fortement ralentis, voire bloqués par les autorités. Pourtant, ils constituent une source d'information capitale pour les Turcs qui, depuis les révoltes de Gezi Park en 2013, ne font plus vraiment confiance aux médias nationaux.

 

(Lire aussi : La Turquie en voie de « syrianisation », l'éclairage d'Anthony Samrani)

 

La politique du gouvernement en question
Nilce soulève également la question des contrôles de sécurité à l'aéroport. « Il y a quelques années, les autorités contrôlaient les voitures avant d'arriver à l'aéroport ! » dit-elle d'un ton énervé. Mais ensuite elle finit vite par se résigner : « De toute façon, ça peut arriver partout, à n'importe quel moment et surtout à n'importe quel endroit dans le monde », rappelle-t-elle en évoquant les attentats de Bruxelles, fort similaires à celui qui vient de viser Istanbul.
Quant à Onur, il rejette davantage la faute sur les autorités turques. « Notre pays est dévasté et c'est la population qui fait face aux conséquences de certaines décisions politiques », estime-t-il. Il est vrai que certains soupçonnent les récentes réconciliations entre le président Erdogan et son homologue russe, Vladimir Poutine, ainsi que l'accord entre la Turquie et Israël d'être à l'origine de ces menaces terroristes. Un autre homme dans la rue avoue ne plus faire confiance au gouvernement, car « quand il s'agit de combattre le PKK, le gouvernement n'a pas de mal à contre-attaquer rapidement dans l'Est, mais lorsqu'il s'agit de l'État islamique, les autorités ne font que clamer la responsabilité de ce groupe terroriste, mais finalement elles ne proposent aucune solution et ne font rien pour rassurer la population ».
Pour Gulseren, une mère âgée d'une cinquantaine d'années qui se dit fort inquiète pour l'avenir de ses trois enfants, le fait d'annoncer le groupe qui a revendiqué l'attaque n'aide pas à améliorer la situation : « Nous savons que la Turquie est la cible de différents groupes terroristes, mais il n'y aucune raison de savoir qui est responsable si au bout du compte notre peuple est toujours en train de mourir. »

 

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Un profond sentiment d'insécurité plane à nouveau sur Istanbul et l'ensemble de la Turquie. La place Taksim, située en plein cœur de la ville, est moins bondée que d'habitude. Pourtant, les magasins de la célèbre rue Istiklal sont tous ouverts, alors que tous les transports en commun fonctionnent normalement. Quant aux Stambouliotes, l'inquiétude se lit sur leurs visages.
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commentaires (2)

On dit toujours que le turc est téméraire mais pas fou. Erdo revient à des sentiments plus ajustés en serrant/baisant la main de Poutine, parce qu'il voyait son pays partir en flammes , tout çà à cause d'un alignement stupide à des politiques occidentales encore plus stupides . Pour se voir finalement rejeté par ces alliés de l'otan qui ne cherchaient qu'à l'enfoncer pour créer encore plus de chaos. Poutine saura le retourner comme une crêpe, et je ne pense pas que les yanky apprécieraient d'où une recrudescence des attentats et cette fois d'une mise définitive à l'écart de erdo. On paye toujours très cher ses erreurs de départ.

FRIK-A-FRAK

11 h 04, le 30 juin 2016

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Commentaires (2)

  • On dit toujours que le turc est téméraire mais pas fou. Erdo revient à des sentiments plus ajustés en serrant/baisant la main de Poutine, parce qu'il voyait son pays partir en flammes , tout çà à cause d'un alignement stupide à des politiques occidentales encore plus stupides . Pour se voir finalement rejeté par ces alliés de l'otan qui ne cherchaient qu'à l'enfoncer pour créer encore plus de chaos. Poutine saura le retourner comme une crêpe, et je ne pense pas que les yanky apprécieraient d'où une recrudescence des attentats et cette fois d'une mise définitive à l'écart de erdo. On paye toujours très cher ses erreurs de départ.

    FRIK-A-FRAK

    11 h 04, le 30 juin 2016

  • Avec un gouvernement qui joue au feu, le peuple turc devra trop payer de sacrifices .

    Sabbagha Antoine

    08 h 44, le 30 juin 2016

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