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Moyen Orient et Monde - États-Unis

Antonin Scalia, pilier du conservatisme, n’est plus

En poussant paisiblement son dernier soupir, l'éminent juge de la Cour suprême a soulevé une tempête dans la tempête de l'élection présidentielle.

Antonin Scalia était le pilier des conservateurs américains qui le considéraient comme leur totem. Darren Ornitz/Files/Reuters

Le 4 février, la revue The Economist publiait un article sous le titre « Âge et sagesse : les juges de la Cour suprême sont-ils trop âgés ? ». Selon la Constitution américaine, c'est l'adéquation au poste qui compte, plus que l'âge. Si Antonin Scalia (né en 1936) s'est peut-être quelque peu tempéré au fil des années au niveau de ses prises de position, ce juge conservateur de la Cour suprême est néanmoins resté fondamentalement mordant, à en juger par ses opinions. Chez lui, aucun signe d'un déclin intellectuel n'était perceptible.


Son décès, samedi, au cours de son sommeil dans un ranch au Texas, a fortement secoué le cours de l'élection présidentielle de même que les fondations de la Constitution. Ainsi, le Parti républicain a promis de bloquer toute nomination d'un successeur venant de Barack Obama qui, ce faisant, ne fait que s'en tenir à la Constitution. Cette position des républicains est jugée surprenante puisqu'elle implique que le prochain président élu de la Cour devait nécessairement être de leur parti.
Mardi, le président américain a critiqué cette décision, affirmant : « C'est une prise de position à l'aune du venin et de la rancœur pour nous empêcher de faire le travail essentiel. »
Le corps du juge Scalia reposera, demain vendredi, au sein même de la Cour suprême dont la bâtisse ressemble à l'Acropole. Et selon les traditions en cours depuis 1873, son fauteuil à la Cour suprême sera drapé d'un tissu noir de même que les portes de la salle de la Cour. Toujours selon la tradition, son cercueil sera reçu par les autres juges qui l'accueilleront sur les marches du grand escalier. La cérémonie funèbre de « Justice Scalia » (son titre en anglais), un fervent catholique d'origine italienne, se déroulera à la basilique de l'Immaculée Conception, s'élevant à Washington, et la plus grande d'Amérique du Nord. C'est là que le pape François avait canonisé des évêques durant sa visite à la capitale fédérale, qui a actuellement tous ses drapeaux en berne.


Antonin Scalia était le pilier des conservateurs américains qui le considéraient comme leur totem. Et lui, s'estimant « original » jusqu'à la moelle, disait à ce sujet : « Non je ne suis pas du tout fou. » À comprendre, quand il avait une opinion à donner à la cour, il faisait moult recherches pour s'assurer que les Pères fondateurs auraient pensé de la même façon en cette même circonstance. Il lui était arrivé d'avoir un rôle pivot quand il fallait faire pencher la balance entre les neuf juges que compte la Cour suprême. Ainsi, il a été décisif dans la première élection de George W. Bush, dont la victoire avait été contestée par son rival, le démocrate Al Gore. Ce dernier ayant placé un recours auprès de la Cour suprême pour un nouveau décompte a vu sa demande rejetée à cause du vote d'Antonin Scalia qui a été déterminant dans ce sens. Néanmoins, Scalia étant Scalia devait par la suite déclarer : « We had the wrong Bush » (Nous avons eu le mauvais Bush).

 

(Pour mémoire : Avec le mariage gay, la Cour suprême prend un étonnant virage à gauche)

 

Duo opératique avec la juge la plus libérale
Malgré son allure intimidante et sa forte personnalité, il était affable et avait un grand sens de l'humour. Catholique fervent, il avait eu neuf enfants. Par ailleurs, il avait une grande passion pour l'art lyrique qu'il pratiquait lui-même avec sa voix de ténor et, très souvent, en duo avec sa collègue la plus libérale, la juge et néanmoins soprano Ruth Bader Ginsburg. Il a même été jusqu'à faire de la figuration dans plusieurs spectacles professionnels du genre. On l'a aussi vu invité à monter sur scène, lors d'une représentation de l'opéra de Richard Strauss, Ariadne Auf Naxos, et la cantatrice vedette s'était installée sur ses genoux pour enchaîner les trémolos. Une autre compagnie qu'il appréciait, celle de l'autre juge libérale, Elena Kagan, qui partageait avec lui les plaisirs de la chasse.


Juste après les funérailles, Barack Obama envisage d'utiliser ses droits constitutionnels pour nommer un successeur à Antonin Scalia. Il est prévu que le président américain choisisse un candidat à ce poste que les républicains ne pourront pas rejeter car dans ce cas, ils auront à payer un prix politique énorme. Le nom le plus répandu est celui de Loretta Lynch, démocrate et actuelle secrétaire à la Justice, qui pourrait être la première juge noire à la Cour suprême. Les républicains avaient massivement voté pour sa nomination à la tête de ce département. Vont-ils pouvoir se contredire à présent ? Malgré leurs déclarations, les républicains semblent être prêts à mettre de l'eau dans leur vin. Le sénateur républicain, Chuck Grassley, président de la commission sénatoriale de la Justice, a ainsi déclaré hier qu'il n'est pas impossible qu'il y ait un vote pour une nomination faite par Barack Obama.

 

Pour mémoire

La Cour suprême américaine donne aussi de la voix...

 

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