Tous ceux qui ont misé sur la rencontre entre les présidents français et iranien, François Hollande et Hassan Rohani, pour débloquer la présidentielle, ont dû vite se rendre à l'évidence qu'elle ne pouvait dépasser les requis de la realpolitik.
Ceux qui toutefois sont familiers des coulisses de l'Élysée ont considéré que les résultats de cette rencontre parisienne pouvaient être facilement escomptés, d'autant que les deux émissaires français préalablement dépêchés à Téhéran – Jean-François Girault, avant la signature de l'accord sur le nucléaire, puis Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères, après l'accord – n'avaient pas plus réussi à paver la voie à une solution.
D'ailleurs, François Hollande lui-même ne s'attendait pas à un développement positif et à un changement substantiel dans la position iranienne, conscient du fait que son homologue iranien doit se concerter avec les hauts dirigeants de son pays pour toute décision à ce sujet.
Une source diplomatique a toutefois précisé que la République islamique n'est pas très enthousiaste à soutenir la candidature du chef des Marada, le député Sleiman Frangié, et ce pour deux raisons. La première est liée au conflit qui oppose l'Iran à l'Arabie saoudite qui, rappelons-le, a avalisé la candidature de M. Frangié. Soutenir ce dernier conduirait donc à consacrer la victoire du royaume wahhabite. Selon cette logique, l'Arabie saoudite aurait ainsi imposé un candidat issu du 8 Mars, par le biais d'une entourloupe que leur allié libanais, Saad Hariri, a effectuée en opérant un revirement à 180 degrés, lâchant, sans le prévenir, son candidat originel, le chef des FL, Samir Geagea.
La seconde raison, ajoute la source, est le fait que le président français n'a pas tant insisté auprès de son interlocuteur iranien sur la question de la présidentielle, faisant prévaloir les intérêts économiques de son pays qui figuraient en force à l'ordre du jour des entretiens. Bien plus important que l'élection d'un président au Liban, les contrats de plusieurs milliards de dollars signés entre Paris et Téhéran, dont un protocole pour la vente d'avions Airbus, les promesses d'un retour des sociétés françaises de construction automobile, Peugeot et Citroën, sur le marché iranien, couplés à un accord de vente de pétrole portant sur une moyenne de 150 000 à 200 000 barils par jour.
La source poursuit en expliquant que les parties libanaises concernées, après avoir été informées de ce climat, se sont vues contraintes de redynamiser l'action du gouvernement et du Parlement qui devra faire face, lundi prochain, à un ultime échec cuisant lors de la session parlementaire consacrée à l'élection d'un président. Celle-ci sera, une fois de plus, torpillée faute de quorum, même si les députés soutenant M. Frangié devaient faire acte de présence en grand nombre. Par conséquent, le pointage que tente d'effectuer le président du Parlement n'est qu'une manière de se donner bonne conscience. Inutile de rappeler que le chef du législatif n'acceptera pas de déclarer la session ouverte si une composante principale – en l'occurrence, les députés chiites – est absente.
La source précitée a exprimé sa déception de voir les représentants de la nation admettre leur incapacité à voter de manière libre et indépendante pour faire parvenir un candidat à la présidence comme le dicte la Constitution, en vue de mettre fin à cette crise endémique qui s'aggrave de jour en jour. Et de mettre en garde contre la paralysie du Parlement, également incapable de vaquer à la discussion des projets de loi inscrits à l'ordre du jour, et de prévenir ainsi la dégradation de la situation économique et du secteur du tourisme, autant de facteurs qui font fuir les hommes d'affaires libanais et étrangers qui préfèrent désormais investir ailleurs.
Liban - Dans les coulisses de la diplomatie
Les Iraniens auraient catégoriquement refusé d’avaliser la candidature de Frangié
OLJ / Par Khalil FLEYHANE, le 06 février 2016 à 00h00
commentaires (6)
Triste image d'un Liban politique à la solde de puissances régionales étrangères et qui se laisse manipuler par notamment le régime iranien qui poursuit le blocage de l'élection présidentielle. La France n'a que faire de cette élection tant ses intérêts commerciaux avec l'Iran prédominent. Le général Aoun n'a plus qu'à tenter de convaincre ses alliés du Hezbollah d'aller voter pour lui demain, pour peu que son alliance avec le Hezb soit encore crédible.
Tony BASSILA
02 h 12, le 07 février 2016