L'absence du roi Salmane d'Arabie saoudite au sommet des pays du Golfe avec le président Barack Obama, à Camp David, révèle les divergences entre Riyad et son traditionnel allié américain sur la stratégie vis-à-vis de l'Iran, le principal rival régional des monarchies arabes.
Alors que certains analystes présentent cette absence comme un camouflet pour les États-Unis, d'autres continuent de penser que le royaume veut toujours « faire des affaires » avec Washington, son allié de longue date.
Seuls les émirs du Koweït et du Qatar assisteront au sommet, ce qui « exprime un manque de considération, une mésentente et un manque de respect pour la personne de Barack Obama », estime l'analyste émirati Abdelkhaleq Abdallah. « Le différend semble profond » sur l'Iran qui, pour ses voisins arabes, est la « source d'une instabilité croissante » au Moyen-Orient, ajoute-t-il.
L'expert saoudien Jamal Khashoggi, lié à la famille royale, indique ignorer les raisons ayant motivé l'absence du roi Salmane. « Mais l'envoi des deux hommes forts du royaume signifie que l'Arabie saoudite veut faire des affaires » avec Washington, précise-t-il en soulignant que les Américains « connaissent très bien Mohammad ben Nayef ».
L'absence du roi « n'est liée en aucune façon, manière ou forme, à un quelconque désaccord entre les deux pays », a assuré le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir à des journalistes à Washington.
Le ministre avait auparavant expliqué que le roi Salmane serait absent « en raison de la date du sommet » qui coïncide avec le cessez-le-feu au Yémen, prévu ce soir, et avec « l'inauguration du Centre Roi Salmane pour l'aide humanitaire » dans ce pays.
« Il est très occupé », souligne un diplomate occidental, ajoutant douter que son absence soit un message de déplaisir. « Pour moi, ce n'est pas un camouflet », ajoute-t-il, sans exclure que des questions de santé puissent être à l'origine de la décision du souverain, âgé de 79 ans, de ne pas faire le déplacement à Washington.
(Lire aussi: Les monarchies du Golfe font bloc face à l'Iran)
Méfiance manifeste
Mais la méfiance est manifeste entre les monarchies du Golfe et les États-Unis. « La majorité des pays du Golfe craignent de voir un accord (définitif) sur le nucléaire iranien conduire à plus d'interventionnisme iranien. Les États-Unis doivent, au regard de leur relation historique avec les pays du Golfe, tout faire pour contraindre l'Iran à respecter ses voisins », déclare à l'AFP une source officielle du Golfe.
Pour l'Arabie saoudite et ses partenaires du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l'essentiel sera d'« avoir une entente mutuelle sur ce que seront les liens (futurs) sur la sécurité du Golfe », souligne Assaad al-Shamlan, professeur à l'Institut de Riyad pour les études diplomatiques.
Avant l'Iran, l'incapacité de M. Obama à faire pression sur Israël pour une solution au Proche-Orient, ainsi que les retombées du printemps arabe ont brouillé les relations entre les États-Unis et le Golfe. « Les Saoudiens voient des divergences avec les États-Unis non seulement sur l'Iran, mais aussi sur la manière de faire face aux conséquences du printemps arabe », relève Charles Schmitz, chercheur à l'Institut du Moyen-Orient à Washington. « Les États-Unis voient dans le printemps arabe un mouvement de jeunes aspirant à la démocratie et à la liberté. Les Saoudiens y voient un soulèvement qui menace les privilèges des familles royales de la région », dit-il. Même sur le Yémen, l'entente n'est que de façade, estime Jane Kinninmont, adjointe du chef du programme Moyen-Orient et Afrique à Chatham House.
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commentaires (4)
Obama accumule les fiasco diplomatiques à l'international ...alors que tout le monde sait ...qu'il ne peut inverser la tendance avant la fin de son dernier mandat....
M.V.
20 h 33, le 12 mai 2015