L'infiltration de combattants d'al-Nosra dans le jurd de Brital, dimanche dernier, continue d'alimenter la polémique interne. L'agression a certes été repoussée par les combattants du Hezbollah, qui a perdu dix d'entre eux dans la bataille, face à une cinquantaine de la part des assaillants. Mais la classe politique s'est aussitôt emparée de l'affaire pour en créer une nouvelle polémique. Selon certains piliers du 14 Mars, cette affaire devrait pousser le Hezbollah à retirer ses troupes de Syrie au plus tôt et confier la protection de la frontière avec ce pays à l'armée libanaise, et si celle-ci n'a pas les moyens, à la Finul après avoir élargi son mandat.
Une source proche du Hezbollah rappelle que cette revendication revient périodiquement depuis l'adoption de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, adoptée en août 2006, qui avait défini le mandat de la Finul après la guerre de 2006. À chaque secousse sécuritaire, l'affaire revient sur le tapis et redevient une revendication prioritaire jetée à la face du Hezbollah.
Selon la source du Hezbollah, ceux qui réclament un déploiement de la Finul le long de la frontière avec la Syrie font fi de nombreuses réalités, les unes en rapport avec le terrain, les autres en rapport avec les circonstances internationales et régionales.
Sur le terrain, par exemple, il est clair, toujours selon la source du Hezbollah, que les combattants de la Résistance ont non seulement réussi à repousser l'assaut des jihadistes, qui est intervenu à l'heure de la prière de midi du premier jour de la fête d'al-Adha chez les chiites, mais aussi à les faire reculer au-delà des lignes d'avant l'assaut. C'est ainsi que les hommes du Hezbollah ont réussi à s'emparer de la colline d'Oum Khorj, où les combattants islamistes s'étaient rassemblés dimanche pour lancer leur assaut contre le jurd de Brital. Cette colline se trouve à une hauteur de 2 300 m. De même, le Hezbollah a aussi pris le contrôle d'une autre position qui surplombe la bourgade de Assal al-Ward en Syrie, ainsi que les villages de Khachaate et de Jebbé. Les jihadistes ont ainsi été contraints à un repli rapide derrière de nouvelles lignes plus éloignées de la frontière avec le Liban.
Selon la source du Hezbollah, ce n'est pas la première attaque du genre et ce ne sera sans doute pas la dernière, car coincés du côté syrien, les fondamentalistes ont absolument besoin d'un couloir de ravitaillement qui ne peut plus leur être ouvert qu'à travers le Liban. Il est donc normal qu'ils songent à effectuer une percée du côté libanais. En réalité, les pronostics ainsi que les rapports sécuritaires faisaient état d'une probable attaque soit via Ersal, une nouvelle fois, soit via la région de Chebaa, ou encore par la Békaa du centre. Mais les jihadistes – et ceux qui se tiennent derrière eux – ont préféré mener leur assaut dans la zone de Brital, fief de la communauté chiite et du Hezbollah. Selon la source du parti, l'objectif était ainsi double : d'abord prendre le Hezbollah de court et tenter de réussir une percée qui aurait eu un impact moral immense sur leurs combattants, puisqu'ils auraient pu ainsi se targuer d'avoir vaincu, ne serait-ce que dans ce périmètre, le Hezbollah. Ensuite, indépendamment des pertes que cet assaut devrait causer au parti chiite, il permettrait de relancer la polémique sur sa présence en Syrie et le long de la frontière entre la Syrie et le Liban. De fait, certains piliers du 14 Mars n'ont pas attendu pour relancer une série de critiques très violentes contre le Hezbollah et sa présence en Syrie, qui rappellent la période qui avait précédé la formation du gouvernement de Tammam Salam.
Toujours selon la source du Hezbollah, l'attaque contre le jurd de Brital montre trois choses : d'abord la situation difficile des combattants islamistes sunnites dans le jurd entre le Qalamoun syrien et la frontière libanaise, au point qu'ils cherchent désespérément à ouvrir des couloirs d'approvisionnement ; ensuite, elle montre l'état de vigilance du Hezbollah et de l'armée libanaise, le long de la frontière. Enfin, elle montre aussi la fragilité du front interne et le fait que certaines parties internes continuent de miser sur les fondamentalistes sunnites pour se retourner contre le Hezbollah et chercher à l'affaiblir.
Concernant la dimension internationale de cette tentative d'infiltration et la revendication de déployer la Finul le long de la frontière avec la Syrie, la source du Hezbollah rappelle qu'il s'agit d'une illusion à laquelle seules certaines figures du 14 Mars coupées des réalités peuvent croire. D'abord, une telle décision exige une réunion du Conseil de sécurité pour redéfinir le mandat de la Finul tel que prévu dans la résolution 1701. Or, rien n'indique que le Conseil de sécurité est favorable à une telle hypothèse. Non seulement la Russie et la Chine pourraient y opposer leur veto, mais même l'Italie, qui est le principal contributeur de la Finul, a récemment fait savoir qu'elle n'était pas d'accord pour une extension à la frontière avec la Syrie du mandat de la Finul. Enfin, à supposer que tous ces obstacles soient levés, l'expérience récente a montré que les combattants jihadistes ne respectent pas les forces de l'Onu et ne les considèrent pas comme un obstacle sérieux à leur progression. À la limite du Golan annexé par Israël, ils n'ont pas hésité à attaquer des positions de l'Undof, enlevant une quarantaine d'observateurs, alors que de nombreux autres ont fui leurs positions. C'est dire que ceux qui réclament la protection de la Finul à la frontière avec la Syrie cherchent en réalité une protection illusoire, ou alors veulent ouvrir la voie à une avancée des jihadistes à l'intérieur libanais...
commentaires (8)
L'ARMÉE LIBANAISE, SUR TOUTES LES FRONTIÈRES AVEC LA SYRIE, ET APPUYÉE PAR UNE FORCE INTERNATIONALE ARMÉE AUSSI !
LA LIBRE EXPRESSION
18 h 55, le 10 octobre 2014