Le but des frappes de la coalition est d’isoler le théâtre syrien du théâtre irakien

Quel est le but des frappes organisées par la coalition contre les positions de l'État islamique et les raffineries de pétrole ?
Chaque organisation a ses points forts. Et l'une des spécificités de l'État islamique (EI, ex-Daech), ce sont ses capacités financières qui lui permettent de payer ses milliers de combattant ainsi que de gérer et d'administrer ses territoires conquis récemment. Il est désormais établi que le pétrole vendu rapporte entre un et trois millions de dollars quotidiennement. Partant de là, les frappes de la coalition ont pour but d'affaiblir le groupe jihadiste en le privant de ses ressources pétrolières, sa principale source de financement.
Il faut noter par ailleurs que les raids de la coalition ne visent pas seulement les raffineries, mais également les quartiers généraux du groupe ainsi que des positions stratégiques, visant ainsi à contenir l'avancée des jihadistes et limiter leur expansion.

Pensez-vous que cette stratégie est efficace pour combattre l'EI ?
L'objectif de la coalition est de passer d'une guerre conventionnelle à une guerre asymétrique. En effet, la forte mobilité des jihadistes leur a permis de mener une guerre éclair en raflant une large partie de territoires en Irak et en Syrie. Les frappes actuelles vont cantonner les combattants dans les agglomérations urbaines, les privant de mobilité et créant de ce fait une fragmentation du territoire de l'EI avec des minirégions autodirigées, coupées du pouvoir central.
Si cette stratégie réussit, elle permettra d'isoler le théâtre des opérations en Syrie du théâtre irakien. Ce qui permettra de traiter chaque pays à part, facilitant ainsi la tâche de la coalition à combattre l'EI, surtout que la situation politique et sécuritaire est très différente d'un pays à l'autre.
Ainsi, la mise en échec de Daech en Irak permettra de faire avancer le processus politique de réconciliation déjà enclenché avec la nomination d'un nouveau Premier ministre, Haïdar al-Abadi. Ce qui est loin d'être le cas en Syrie.

Parlant de la Syrie, estimez-vous que l'offensive antijihadistes sera bénéfique pour Assad ?
Si on prend le cas de l'EI, le début a commencé entre 2004 et 2006. Il y a eu ensuite une longue période d'incubation, avant la montée spectaculaire de l'EI. On ne peut pas donc éradiquer ce groupe bien implanté aussi facilement et aussi rapidement.
La guerre contre l'EI prendra du temps. Le président Obama l'a lui-même affirmé, estimant qu'elle prendra au moins trois ans. Les frappes actuelles ne sont que le début. Le processus politique pourra prendre encore plus de temps.
Pour revenir à la Syrie, l'affaiblissement des jihadistes pourrait bénéficier au régime syrien à court terme. Toutefois, Assad ne pourra pas reprendre les territoires qu'il a perdus. Son régime est fatigué militairement. En tout cas, côté diplomatique, les Américains ont déjà fait allusion au fait qu'ils pourraient accepter le maintien du régime actuel, mais sans Assad. En tout état de cause, on ne peut espérer une forme de stabilité avant dix ans.

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