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Seuls ensemble...

Les temps ont changé, et le Liban n'est plus cet État que la puissance mandataire française façonna jadis à la mesure de ses protégés maronites. Ce qui n'a pas changé toutefois, en dépit des lois de la démographie et de l'évolution politique, c'est que sans ses chrétiens, le Liban n'aurait plus de raison d'exister. De cette société pluraliste – mieux encore, volontaire et solidaire dans son idéal de pluralisme – le patriarcat maronite s'est toujours voulu le vigilant gardien.

 

De fait, ce n'est pas un document maronite mais éminemment, très explicitement national que publiaient mercredi les évêques de cette communauté réunis autour du patriarche Raï, pour exhorter les Libanais de toutes confessions à préserver ensemble ce pays qu'ils ont édifié de concert. Ce texte définit une liste de principes de base et de priorités, dont les plus pressantes se résument à la réhabilitation des institutions et au respect des échéances constitutionnelles, l'élection d'un nouveau chef de l'État en tête.
Le document de Bkerké tire aussi son importance de la neutralité qu'il prône face au conflit de Syrie, et donc de la nécessité impérieuse pour les Libanais de s'interdire tout engagement actif sur ce terrain.


Moralement confortée se trouve ainsi la charte de Baabda, proposée par le président Michel Sleiman mais qui attend toujours l'adhésion sincère de toutes les parties. Et estompé, du même coup, est le malaise qu'avaient provoqué dans les rangs chrétiens, mais aussi sunnites, certaines positions prises par le patriarche Raï lors de son accession à la dignité patriarcale, et jugées par trop indulgentes pour la dictature de Damas.


Encore faut-il cependant que l'appel de Bkerké ne se trouve pas réduit, c'est bien le cas de le dire, à un simple vœu pieux, ou encore à un coup de goupillon dans l'eau. Pour cela il est impératif que les autres composantes du pays, au grand complet, s'y associent solennellement. Assourdissant pourtant, dans sa funeste éloquence, est le silence observé à ce propos par le 8 Mars.


Quel péché auraient donc commis les saints congressistes de Bkerké ? Celui, apparemment impardonnable, d'essayer, par le seul recours à la raison, de ranimer ce contrat du vivre ensemble qu'est le pacte national. Celui aussi de rejeter ces alliances extérieures qui, de manière bien plus grave aujourd'hui qu'à la veille de la proclamation du Grand Liban en 1920, se traduisent forcément par l'aliénation à l'étranger.

Issa Goraieb

igor@lorient-lejour.com.lb

Les temps ont changé, et le Liban n'est plus cet État que la puissance mandataire française façonna jadis à la mesure de ses protégés maronites. Ce qui n'a pas changé toutefois, en dépit des lois de la démographie et de l'évolution politique, c'est que sans ses chrétiens, le Liban n'aurait plus de raison d'exister. De cette société pluraliste – mieux encore, volontaire et...