Rechercher
Rechercher

À La Une - Diplomatie

Le non retentissant de Riyad

L’Arabie saoudite refuse d’entrer au Conseil de sécurité de l’ONU.

Jeudi, le roi Abdallah d'Arabie saoudite recevait le président turc, Abdullah Gül, à Jeddah, pour des entretiens sur la situation régionale et internationale. Photo AFP

Dans un geste qui a surpris tout le monde, l’Arabie saoudite a refusé hier d’entrer au Conseil de sécurité de l’ONU, une décision sans précédent visant à protester contre « l’impuissance » de cette instance, en particulier face au drame syrien. Le royaume saoudien a été élu jeudi, pour la première fois, membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, en même temps que le Tchad, le Chili, le Nigeria et la Lituanie. Leur mandat de deux ans doit débuter le 1er janvier 2014.


Dans un communiqué publié quelques heures après l’élection de ce poids lourd du monde arabe, qui soutient sans réserve l’opposition syrienne, le ministère saoudien des Affaires étrangères a fustigé la politique de « deux poids, deux mesures » de l’institution au Proche-Orient. « L’Arabie saoudite (...) n’a pas d’autre option que de refuser de devenir membre du Conseil de sécurité jusqu’à ce que ce dernier soit réformé et qu’on lui donne les moyens d’accomplir son devoir et d’assumer ses responsabilités pour préserver la paix et la sécurité dans le monde », a affirmé le ministère. Il a également estimé que le fait « de permettre au régime en place en Syrie de tuer son peuple et de le brûler à l’arme chimique au vu et au su du monde entier sans sanctions dissuasives est une preuve claire de l’impuissance du Conseil de sécurité à accomplir son devoir et à assumer ses responsabilités ».


À New York, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a affirmé que Riyad n’avait pas encore notifié officiellement aux Nations unies son refus de prendre son siège au Conseil de sécurité.
Par ce geste, qui constitue une première, l’Arabie saoudite « veut exprimer son indignation face aux pays membres permanents du Conseil de sécurité », a déclaré l’expert saoudien Abdel Aziz al-Sager, directeur du Gulf Research Center. « Elle veut également exprimer son malaise face à la nouvelle politique de Washington et en particulier aux positions du président Barack Obama sur l’Iran, la Syrie et le Yémen », a-t-il ajouté. « C’est tout à fait inattendu, nous avons tous dû vérifier dans l’historique du Conseil pour trouver un précédent et il n’y en a pas », a déclaré un diplomate à New York.


La France a dit partager la « frustration » de l’Arabie saoudite, tandis que la Russie a critiqué Riyad, s’interrogeant sur les raisons « étranges » du refus saoudien. « Nous sommes étonnés (...). Les arguments du royaume suscitent la perplexité (...). Par sa décision, l’Arabie saoudite s’est exclue elle-même des efforts communs dans le cadre du Conseil de sécurité pour maintenir la paix et la sécurité dans le monde », a déclaré le ministère russe des Affaires étrangères. La Turquie a estimé pour sa part que la décision saoudienne faisait « perdre de sa crédibilité » à l’organisation, tandis que le Conseil national syrien (CNS, principal groupe d’opposition) a salué la « position historique » des autorités saoudiennes et rendu hommage à leur soutien au peuple syrien.

Des mesures efficaces
Fin septembre, lors de la session de l’Assemblée générale de l’ONU, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Saoud al-Fayçal, avait déjà refusé de s’exprimer à la tribune pour protester contre l’inertie du Conseil de sécurité face à la situation en Syrie et dans les territoires palestiniens. Depuis le début de la crise syrienne en mars 2011, la Russie et la Chine se sont opposées à toute résolution condamnant le régime du président Bachar el-Assad. Ce n’est que le 27 septembre, un peu plus d’un mois après une attaque à l’arme chimique qui a fait des centaines de morts le 21 août près de Damas, que le Conseil a adopté, face à la menace de frappes américaines, la résolution 2118 sur le désarmement chimique du pays d’ici à la mi-2014.
Riyad, un des principaux alliés de Washington au Proche-Orient, a estimé en septembre que l’intervention internationale dans la crise syrienne ne devait pas être réduite aux seules armes chimiques, dans une critique voilée de l’accord russo-américain ayant permis l’adoption de la résolution. Le royaume avait appelé la communauté internationale à prendre « des mesures efficaces » pour arrêter le bain de sang en Syrie.


Dans son communiqué d’hier, le ministère saoudien rappelle aussi que « la question palestinienne demeure depuis 65 ans sans règlement ». Il déplore également que le Conseil ait « échoué » à débarrasser le Proche-Orient des armes de destruction massive, « en raison de son incapacité à soumettre les programmes nucléaires de tous les pays de la région sans exception à la surveillance et aux inspections internationales », dans une allusion à Israël, ou en s’opposant « aux tentatives de tout pays de la région de posséder l’arme nucléaire », dans une référence à l’Iran.
« L’Arabie saoudite estime que l’Iran s’ingère en Syrie, en Irak, au Yémen et à Bahreïn (...) et les États-Unis acceptent que l’Iran joue un rôle dans les affaires de la région », explique l’analyste Abdel Aziz al-Sager.

 

Pour mémoire

Mécontent sur les dossiers syrien et palestinien, Riyad annule son discours à l’ONU

 

Syrie : Moscou parade, Téhéran se rassure, Riyad fulmine...
Dans un geste qui a surpris tout le monde, l’Arabie saoudite a refusé hier d’entrer au Conseil de sécurité de l’ONU, une décision sans précédent visant à protester contre « l’impuissance » de cette instance, en particulier face au drame syrien. Le royaume saoudien a été élu jeudi, pour la première fois, membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, en même...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut