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À La Une - L’éclairage

L’équation gouvernementale et l’ouverture de Aoun

Le « sommet » des trois présidents (de la République, du Parlement et du Conseil des ministres), tenu au palais de Baabda en marge du dîner donné mercredi soir en l’honneur du président palestinien Mahmoud Abbas, n’a donc pas réglé le litige constitutionnel autour de la séance parlementaire qui avait été convoquée par le chef du législatif, Nabih Berry.


La séance avait été boycottée par le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, par le 14 Mars et par le CPL, les deux premiers parce qu’ils l’ont considérée contraire à la Constitution, le dernier parce que l’ordre du jour de la réunion prévoyait un vote sur le recul de l’âge de la retraite des dirigeants sécuritaires et militaires, ce à quoi le général Michel Aoun s’oppose. Il s’agit de permettre notamment au commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi, de se maintenir provisoirement à ce poste au-delà du mois de septembre, date à laquelle est censé intervenir son départ à la retraite.


On sait que le président de la Chambre se fonde sur le paragraphe trois de l’article 69 de la Constitution pour justifier le bien-fondé de sa décision de convoquer les députés à une séance législative. Ce texte stipule, il est vrai, qu’à l’ombre d’un gouvernement démissionnaire et hors des périodes constitutionnelles de session ordinaire, le Parlement est considéré d’office comme étant en session extraordinaire. Sauf que cette stipulation ne règle pas le problème de savoir à quel type d’activités la Chambre est en mesure de se livrer sous ce régime.


La « troïka » présidentielle a donc tenté de parvenir à une interprétation commune de l’article 69 pour en finir avec cette nouvelle querelle qui n’est constitutionnelle qu’en apparence et qui reflète surtout l’aggravation du conflit sunnito-chiite.
De fait, dans cette affaire, le président de la Chambre et le Premier ministre ont chacun de son côté le sentiment que ses prérogatives sont menacées par l’autre, d’où la difficulté de la conciliation qu’a tentée le président de la République, Michel Sleiman, qui a insisté sur le respect des prérogatives de chacun et sur la nécessité de maintenir l’équilibre et la coopération entre les pouvoirs.


Ainsi, M. Berry est resté attaché à sa vision des choses, estimant que l’article 69 permet dans les circonstances actuelles au Parlement de légiférer normalement. M. Mikati, quant à lui, a souligné que le législateur a fondamentalement mis l’accent sur l’équilibre entre les pouvoirs, de sorte que lorsqu’un pouvoir est démissionnaire, donc non responsable, l’autre n’est pas en mesure de fonctionner pleinement sous peine de sombrer dans le déséquilibre.


D’éminents juristes ont souligné que l’article 69 ne donne pas à la Chambre le droit de légiférer sur des questions ordinaires. Cet article anticipe sur une situation exceptionnelle de façon à éviter tout vide institutionnel, le but étant de permettre à la Chambre d’être en session uniquement pour voter la confiance au nouveau gouvernement.
Pour ce qui est de légiférer, et seulement sur des questions urgentes, la Chambre ne peut le faire qu’après la signature par l’exécutif d’un décret d’ouverture de la session extraordinaire, comportant la date d’ouverture et de fermeture de cette session, mais aussi les points à l’ordre du jour.


Il est vrai que la réunion des trois présidents a permis au moins de rétablir quelque peu les ponts et de réduire la crispation entre MM. Berry et Mikati. Preuve en est que le premier a mis l’accent, au terme de la réunion, sur la nécessité de hâter la formation du gouvernement, celle-ci étant de nature à mettre naturellement un terme à ce litige.
Il reste que, justement, la véritable équation du point de vue sunnite, surtout après les événements de Saïda, est la suivante : du moment que vous (les chiites) entravez l’action du Premier ministre désigné et la formation de son cabinet en posant des conditions rédhibitoires, nous ne permettrons pas à la Chambre de se réunir et nous paralyserons l’action du pouvoir législatif jusqu’au moment où le processus de formation du gouvernement sera libéré.


Face à la quadrature du cercle, certains observateurs pensent que la nouvelle politique d’ouverture tous azimuts du chef du CPL, le général Michel Aoun, pourrait mener à des changements. Un ancien ministre n’y croit pas beaucoup et pense plutôt que le général Aoun tente simplement de se renflouer. D’autres pensent toutefois qu’un repositionnement du CPL est possible, à partir de certaines offres qui lui auraient été faites au sujet du prochain gouvernement et de la direction de l’armée. Une réponse positive de la part du général n’est pas à exclure, disent-ils.

 

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