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À La Une - turquie

Des artistes turcs appellent le gouvernement à cesser sa "rhétorique de haine"

Dans leur gestion du mouvement de contestation, les autorités ont pris pour cible les journalistes et artistes.

Des artistes, journalistes et écrivains turcs ont publié samedi, sur une pleine page dans plusieurs journaux, un appel au gouvernement lui demandant de cesser d'employer une rhétorique de division. AFP PHOTO/ADEM ALTAN

Des artistes, journalistes et écrivains turcs, dont le prix Nobel de littérature Orhan Pamuk, ont publié samedi, sur une pleine page dans plusieurs journaux, un appel au gouvernement lui demandant de cesser d'employer une rhétorique de division alimentant, selon eux, la haine dans le pays.


L'appel, signé par plus de 80 personnalités, intervient à la suite d'un mouvement de contestation sans précédent qui a visé pendant près de trois semaines le gouvernement islamo-conservateur du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.
"Nous sommes inquiets", "La rhétorique du +vous contre nous+ accentue les divisions au sein de notre société", avertissent les signataires, appelant le gouvernement à mettre fin aux pressions contre les militants.
"Il y a une atmosphère de frustration et de haine", note le texte, qui accuse implicitement M. Erdogan et son gouvernement de dérive autoritaire après une décennie au pouvoir.


Le Premier ministre n'a de fait cessé de fustiger les manifestants, issus pour la plupart de la classe moyenne, jeunes et éduqués, au moyen d'une rhétorique dévalorisante, les qualifiant de "voyous" et de "terroristes".
Les artistes, eux, ont été accusés par M. Erdogan d'appartenir à des "groupes marginaux".


Tandis que la fronde anti-gouvernementale, partie le 31 mai d'une mobilisation contre la destruction programmée d'un jardin public d'Istanbul, le parc Gezi, a rassemblé des dizaines de milliers de personnes - 2,5 millions de personnes dans 80 villes le weekend dernier -, M. Erdogan a poussé ses partisans à organiser des contre-manifestations. Il a ainsi déclaré: "Personne ne peut nous intimider (...) nous ne prenons d'ordre ou d'instruction de personne sauf de Dieu".


Dans leur gestion du mouvement de contestation, la plus grave crise politique depuis l'arrivée au pouvoir du Parti de la justice et du développement (AKP) en 2002, les autorités ont pris pour cible les journalistes et artistes.
Samedi, le quotidien pro-gouvernemental Takvim a annoncé avoir porté plainte contre la chaîne américaine d'informations en continu CNN et sa journaliste vedette Christiane Amanpour les accusant d'avoir incité la population à la haine par leur couverture des manifestations et la diffusion de "fausses nouvelles".


L'acteur turc Mehmet Ali Alabora a, lui, été pris à partie par M. Erdogan après avoir posté un tweet soutenant les manifestants. Le Premier ministre l'a accusé de susciter des troubles et l'a menacé de poursuites.
L'acteur avait signalé récemment avoir reçu des menaces après avoir été désigné comme un dirigeant d'un "complot visant à faire tomber le gouvernement" par le journal pro-gouvernemental Yeni Safak.


Et lundi, la BBC s'est dite inquiète de la campagne des autorités turques visant à "intimider ses journalistes". Le maire d'Ankara, Melih Gokcek, avait qualifié, sur son compte Twitter, la correspondante turque de la BBC Selin Girit d'espionne à la solde du Royaume-Uni.


Le pianiste turc de renommée internationale Fazil Say, 43 ans, a, lui aussi, subi l'ire des autorités turques. Connu pour son athéisme militant, il a été condamné le 15 mai pour blasphème pour ses tirades provocatrices contre la religion musulmane sur Twitter, provoquant une volée de critiques contre la Turquie à l'étranger.
Fazil Say, dont la condamnation a été annulée, doit être rejugé prochainement devant un tribunal d'Istanbul.


Le mouvement de contestation a fait quatre morts et près de 8.000 blessés et la répression violente par la police a été très critiquée dans le monde tandis que l'image de M. Erdogan a été écorné.
Les attaques répétées du Premier ministre contre les médias et les recours devant les tribunaux pour faire taire ses ennemis ont alimenté les inquiétudes quant au respect des droits de l'homme dans un pays candidat à l'adhésion à l'Union européenne. La Turquie est régulièrement critiquée par les ONG pour ses atteintes à la liberté d'expression et le nombre de journalistes ou d'avocats détenus dans ses prisons.


Les artistes soutenant le mouvement de contestation redoutent, par ailleurs, qu'en représailles il ne leur soit interdit de participer aux festivals ou spectacles organisés dans les municipalités dirigées par des membres du parti au pouvoir, l'AKP.

 

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