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Moyen Orient et Monde

Les Kurdes accusés de double jeu

Des miliciens kurdes et des habitants ont conquis une nouvelle localité dans le nord-est de la Syrie, près de la frontière avec la Turquie, mais sont soupçonnés de faire le jeu du régime qui les laisse agir à leur guise.
Ainsi, mardi, des centaines de personnes se sont rassemblées devant le quartier général des forces de sécurité à Derik, dernier bâtiment abandonné par l’armée et la police syriennes, écoutant de la musique kurde à pleins tubes et des discours en kurde, une langue officiellement interdite en Syrie. « Nous avons essayé de dire aux troupes d’Assad de partir pacifiquement. Nous sommes des gens pacifiques », affirme Abdi Karim, 56 ans, officier dans le Comité de protection du peuple kurde (YPG), bras armé du Parti de l’Union démocratique kurde (PYD), la branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (rebelles kurdes en Turquie). Cette prise de position est intervenue quelques jours après la conquête de trois autres villes proches de la Turquie par des habitants soutenus par la milice du PYD, mouvement kurde syrien, face auquel les troupes progouvernementales syriennes se sont retirées sans combattre.
Le nord et le nord-est de la Syrie abritent la plupart des deux millions de Kurdes du pays, dont les milices sont indépendantes et parfois hostiles à l’Armée syrienne libre (ASL). « Il y a des divergences entre les forces kurdes opposées au régime et l’opposition arabe, surtout en ce qui concerne la question du nationalisme kurde et la reconnaissance du kurde comme la deuxième langue la plus parlée du pays », estime le militant kurde indépendant Massoud Akko. Sur le terrain, Karim, milicien kurde, lance un avertissement : « Si l’ASL vient en tant qu’hôte, nous
 l’accueillerons », mais il n’est pas question que ces rebelles, très majoritairement des Syriens arabes, prennent le contrôle de la ville.
Selon M. Akko, les forces du régime syrien laissent volontairement le contrôle de certaines zones au PYD, ce qui expliquerait que la prise des localités de la région ait été relativement pacifique. « Le transfert d’institutions par le régime au PYD est un sale jeu », estime-t-il, y voyant « un message à la Turquie, car elle aide l’opposition syrienne ».
En fait, amis hier, les deux voisins sont devenus des ennemis irréductibles : si Ankara donne tout son appui à la rébellion armée contre le régime de Bachar el-Assad, Damas voit plutôt d’un bon œil le contrôle par la branche syrienne du PKK d’une partie de la frontière avec la Turquie. « Je ne sais pas si le gouvernement soutient l’offensive kurde, mais je peux vous dire que les Kurdes ont certainement plus le sens de l’honneur que les groupes armés », a affirmé un haut responsable syrien. « Je ne dis pas que ce parti collabore avec le régime, mais les deux parties se tolèrent mutuellement », assure M. Akko, soulignant que « les Kurdes n’ont pas la capacité militaire de prendre le contrôle des zones kurdes », notamment la vaste province de Hassaka.
Pour Karim Bitar, directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS) à Paris, « les mouvances kurdes (PYD surtout) ont réussi habilement à profiter du désordre ambiant pour établir des faits accomplis sur le terrain ». « Depuis des années, les Kurdes ont des aspirations d’autonomie : le pouvoir comme l’opposition ont du mal à les accepter et sont dans l’embarras. Les Kurdes se sont emparés de plusieurs régions dans le nord, et plus ça dure, plus ça devient irréversible », souligne ce spécialiste du Proche et du Moyen-Orient. « Je ne sais pas s’il y a un accord tacite entre le régime et les Kurdes. Mais il y a sûrement une conjonction d’intérêts, à court terme, et chacun en profite », conclut-il.
Des miliciens kurdes et des habitants ont conquis une nouvelle localité dans le nord-est de la Syrie, près de la frontière avec la Turquie, mais sont soupçonnés de faire le jeu du régime qui les laisse agir à leur guise.Ainsi, mardi, des centaines de personnes se sont rassemblées devant le quartier général des forces de sécurité à Derik, dernier bâtiment abandonné par l’armée et...

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