Pour de diverses et multiples raisons, il faudra un jour remercier le peuple rebelle de Syrie. Notamment pour avoir obligé, même involontairement, Hassan Nasrallah à discourir, pérorer plutôt, avec (un peu) plus de bon sens, à peine (un peu) moins d’arrogance. Le patron du Hezbollah s’affiche désormais bon et magnanime : l’index ne s’érige plus ; c’est la paume, pleine de mansuétude, qui tapoterait presque, très paternelle, boursouflée de clémence, le costume de Mohammad Morsi, auquel il pardonne d’avance de ne pas ouvrir ses frontières, de ne pas lancer une opération pour libérer la Palestine. Mais ce que M. Nasrallah ne sait pas, c’est à quel point le président et tout le peuple d’Égypte (sans compter l’immense majorité des Palestiniens) se moquent désormais de ce que pense et dit celui qui envoie ses miliciens se battre aux côtés du gang Assad et assassiner les Syriens. Ou plutôt, il ne le sait que trop bien. Alors, désormais, Hassan Nasrallah s’invente des rôles, entre statue du Commandeur et stratège géopétrolier. Bientôt, il s’intronisera Pilier de défense à lui tout seul. Mais pour défendre qui ? Défendre quoi ? Décrédibilisé dans le monde arabo-musulman depuis le 15 mars 2011, décrédibilisé depuis bien plus longtemps dans son propre pays, Hassan Nasrallah insiste : il est Grand Timonier. Petit père du peuple. Nous sommes tous concernés au Liban par la situation à Gaza. Oui ? Bien sûr que oui. Les Libanais, tous les Libanais, pour en avoir été longtemps les récipiendaires, connaissent trop bien la barbarie des gouvernements israéliens pour ne pas ressentir un minimum d’empathie, guerre civile ou pas, avec les Palestiniens. Mais il est temps, plus que temps, qu’un quelqu’un de bonne volonté explique à M. Nasrallah que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés d’abord par leur propre (sale) sort. Que les Libanais, tous les Libanais, pensent d’abord à eux-mêmes. Aux dangers, aux défis qui ne les lâchent pas d’une semelle. Que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés en premier lieu par l’arsenal milicien du Hezbollah, écœurés, terrorisés par un nouveau mai 2008, si facile à ressusciter. Qu’ils sont concernés en tout premier lieu par les débordements de la crise syrienne sur leur territoire – des débordements que ce cher Hezb ne fait rien pour endiguer ; bien au contraire. Que quelqu’un explique à M. Nasrallah que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés en premier lieu par la crise économique, par leur pouvoir d’achat, par leur présent, par l’avenir de leurs enfants. Qu’ils sont concernés par le manque d’électricité, le manque d’eau, le rachitisme de leur connexion Internet, toutes ces inepties quotidiennes des Gebran Bassil et autres Nicolas Sehnaoui. Qu’ils sont concernés par ce tourisme, leur seule richesse, qui disparaît comme peau de chagrin. Qu’ils sont écœurés, terrorisés, aussi, de voir leur État réduit à sa portion crétine ; que tel est le bon plaisir du Hezbollah et de ses alliés. Que quelqu’un lui explique, à M. Nasrallah, que c’est ensuite, bien après, que ces Libanais, tous les Libanais, se sentiront concernés par la situation à Gaza, par les drames quotidiens que vivent les Palestiniens, la tragédie infligée jour après jour aux Syriens, les enfants de Somalie et d’ailleurs qui meurent de faim, les femmes de Tombouctou ou de Kaboul lapidées, les petites Malala pourchassées, les Rohyngias persécutés en Birmanie, les Ayoreo au Paraguay et les gays au Nigeria. Que quelqu’un explique enfin à M. Nasrallah les vertus sinon de l’égoïsme, du moins de cette charité bien ordonnée..., véritable kit de (sur)vie pour peuples maudits en général, pour Libanais éreintés en particulier. D’autant que rien n’empêche M. Nasrallah et sa milice de vouloir se mêler à tout prix de ce qui ne les regarde pas et d’envoyer dès ce matin des Fajr ou autres petits Zelzal contre Israël. Bien au contraire. Mais ce serait bien bête : cette fois, même sa communauté ne lui pardonnera(it) pas. Et ce serait bien dommage, surtout, de finir en Michel Samaha bis : C’est ce que voulaient les ayatollahs. Il est des excuses bien plus pathétiques que les fautes.
Liban - En dents de scie
Nasrallah 2.0
OLJ / Par Ziyad MAKHOUL, le 17 novembre 2012 à 00h06
Pour de diverses et multiples raisons, il faudra un jour remercier le peuple rebelle de Syrie. Notamment pour avoir obligé, même involontairement, Hassan Nasrallah à discourir, pérorer plutôt, avec (un peu) plus de bon sens, à peine (un peu) moins d’arrogance. Le patron du Hezbollah s’affiche désormais bon et magnanime : l’index ne s’érige plus ; c’est la paume, pleine de mansuétude, qui tapoterait presque, très paternelle, boursouflée de clémence, le costume de Mohammad Morsi, auquel il pardonne d’avance de ne pas ouvrir ses frontières, de ne pas lancer une opération pour libérer la Palestine. Mais ce que M. Nasrallah ne sait pas, c’est à quel point le président et tout le peuple d’Égypte (sans compter l’immense majorité des Palestiniens) se moquent désormais de ce que pense et dit celui qui envoie ses miliciens se battre aux côtés du gang Assad et assassiner les Syriens. Ou plutôt, il ne le sait que trop bien. Alors, désormais, Hassan Nasrallah s’invente des rôles, entre statue du Commandeur et stratège géopétrolier. Bientôt, il s’intronisera Pilier de défense à lui tout seul. Mais pour défendre qui ? Défendre quoi ? Décrédibilisé dans le monde arabo-musulman depuis le 15 mars 2011, décrédibilisé depuis bien plus longtemps dans son propre pays, Hassan Nasrallah insiste : il est Grand Timonier. Petit père du peuple. Nous sommes tous concernés au Liban par la situation à Gaza. Oui ? Bien sûr que oui. Les Libanais, tous les Libanais, pour en avoir été longtemps les récipiendaires, connaissent trop bien la barbarie des gouvernements israéliens pour ne pas ressentir un minimum d’empathie, guerre civile ou pas, avec les Palestiniens. Mais il est temps, plus que temps, qu’un quelqu’un de bonne volonté explique à M. Nasrallah que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés d’abord par leur propre (sale) sort. Que les Libanais, tous les Libanais, pensent d’abord à eux-mêmes. Aux dangers, aux défis qui ne les lâchent pas d’une semelle. Que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés en premier lieu par l’arsenal milicien du Hezbollah, écœurés, terrorisés par un nouveau mai 2008, si facile à ressusciter. Qu’ils sont concernés en tout premier lieu par les débordements de la crise syrienne sur leur territoire – des débordements que ce cher Hezb ne fait rien pour endiguer ; bien au contraire. Que quelqu’un explique à M. Nasrallah que les Libanais, tous les Libanais, sont concernés en premier lieu par la crise économique, par leur pouvoir d’achat, par leur présent, par l’avenir de leurs enfants. Qu’ils sont concernés par le manque d’électricité, le manque d’eau, le rachitisme de leur connexion Internet, toutes ces inepties quotidiennes des Gebran Bassil et autres Nicolas Sehnaoui. Qu’ils sont concernés par ce tourisme, leur seule richesse, qui disparaît comme peau de chagrin. Qu’ils sont écœurés, terrorisés, aussi, de voir leur État réduit à sa portion crétine ; que tel est le bon plaisir du Hezbollah et de ses alliés. Que quelqu’un lui explique, à M. Nasrallah, que c’est ensuite, bien après, que ces Libanais, tous les Libanais, se sentiront concernés par la situation à Gaza, par les drames quotidiens que vivent les Palestiniens, la tragédie infligée jour après jour aux Syriens, les enfants de Somalie et d’ailleurs qui meurent de faim, les femmes de Tombouctou ou de Kaboul lapidées, les petites Malala pourchassées, les Rohyngias persécutés en Birmanie, les Ayoreo au Paraguay et les gays au Nigeria. Que quelqu’un explique enfin à M. Nasrallah les vertus sinon de l’égoïsme, du moins de cette charité bien ordonnée..., véritable kit de (sur)vie pour peuples maudits en général, pour Libanais éreintés en particulier. D’autant que rien n’empêche M. Nasrallah et sa milice de vouloir se mêler à tout prix de ce qui ne les regarde pas et d’envoyer dès ce matin des Fajr ou autres petits Zelzal contre Israël. Bien au contraire. Mais ce serait bien bête : cette fois, même sa communauté ne lui pardonnera(it) pas. Et ce serait bien dommage, surtout, de finir en Michel Samaha bis : C’est ce que voulaient les ayatollahs. Il est des excuses bien plus pathétiques que les fautes.
commentaires (8)
Excusez mon ignorance, Mais que s'est-il passé le 15 Mars 2011?
Michel Fayad
02 h 07, le 18 novembre 2012